Origine et histoire
Le Hartmannswillerkopf, rebaptisé Vieil-Armand après la Première Guerre mondiale, est un éperon rocheux pyramidal du massif des Vosges qui domine la plaine d'Alsace à 957 mètres d'altitude. Il a été le théâtre de combats intenses pendant le premier conflit mondial, notamment en 1915, et accueille aujourd'hui un monument national élevé en mémoire de ces affrontements. Le sommet était alors stratégique car il se trouve en ligne à proximité de Thann et de Cernay, entre secteurs disputés par les armées françaises et allemandes. Le nom Hartmannswillerkopf associe celui du village de Hartmannswiller à la butte dite "kopf", tandis que Vieil-Armand est une francisation populaire de Hartmannsweiler, issue d'une déformation phonétique opérée par les soldats français. Le site porte aussi les surnoms de "Mangeur d'hommes" attribué par des soldats français et de "Montagne de la Mort" donné par des soldats allemands. Le sommet est partagé entre les communes de Hartmannswiller, Wuenheim, Wattwiller et Soultz. Le Hartmannswillerkopf domine la plaine rhénane entre Colmar au nord et Belfort au sud, avec Mulhouse à proximité. Il surplombe les communes de Hartmannswiller, Wattwiller, Uffholtz et Cernay. Le cimetière militaire dit du Silberloch se trouve près de la route des Crêtes des Hautes‑Vosges et le monument national comprend un promontoire‑observatoire offrant une vue sur la plaine d'Alsace et l'agglomération mulhousienne. Par temps clair, la ville de Bâle est visible, ainsi que la ligne bleue de la Forêt‑Noire — en particulier le Belchen et le Feldberg — et, par conditions exceptionnellement favorables, les Alpes bernoises, dont le Finsteraarhorn. Les principaux combats se sont déroulés en 1915, notamment les 19 et 20 janvier, le 26 mars, les 25 et 26 avril et les 21 et 22 décembre, et firent près de vingt‑cinq mille morts, en majorité français. Parmi les victimes figurent le général Marcel Serret et le capitaine Joseph Ferdinand Belmont. Après ces offensives, le front se stabilisa et se réduisit à des duels d'artillerie, ce qui valut au sommet des appellations telles que "Montagne sacrée d'Alsace". Au niveau de la croix sommitale, les lignes ennemies se trouvaient à une vingtaine de mètres l'une de l'autre, ce qui imposait une grande vigilance et limitait les possibilités d'action. Le site se compose aujourd'hui de deux entités complémentaires : le monument national, avec sa crypte et la nécropole du Silberloch, et le champ de bataille lui‑même, marqué par des vestiges et des monuments. Le monument national, construit au col du Silberloch au‑dessus de la nécropole, figure parmi les quatre monuments nationaux consacrés aux combattants de la Grande Guerre, aux côtés de l'ossuaire de Douaumont, du mémorial des batailles de la Marne et de la nécropole de Notre‑Dame‑de‑Lorette. Deux statues ailées gardent l'entrée de la crypte‑ossuaire et une statue de la Vierge se situe dans l'axe central ; ces œuvres sont signées du sculpteur Antoine Bourdelle. La nécropole nationale du Silberloch, située sur la commune de Wattwiller, couvre 1,67 hectare et rassemble 1 640 dépouilles de soldats français, dont 1 256 tombes individuelles et 384 sépultures regroupées dans six ossuaires. Sur le champ de bataille subsistent de nombreux vestiges : tranchées, abris et fortins bétonnés, ainsi que des monuments commémoratifs. Les deux monuments les plus connus sont la croix sommitale illuminée en béton armé, haute de 20 mètres, et le monument en bronze du 152e régiment d'infanterie, surnommé "monument des diables rouges", installé en 1954 pour remplacer une œuvre de 1921 détruite après l'annexion. L'emploi massif de béton armé du côté allemand contraste avec des tranchées françaises plus sommaires, traduisant la volonté défensive allemande et la logique offensive française à l'époque. De nombreux ouvrages allemands restent visibles autour du Hartmannswillerkopf, comme la tranchée de la "Suisse Lippique" ou la "cantine Zeller". Le champ de bataille et ses vestiges sont protégés au titre des monuments historiques par arrêté du 2 février 1921. Le site conserve 45 kilomètres de tranchées et un réseau de sentiers qui permettent de le visiter. Dans la perspective du centenaire de la Première Guerre mondiale, les installations ont fait l'objet d'un projet de rénovation et de mise en valeur, incluant un diagnostic du Bureau de recherches géologiques et minières sur l'instabilité des anciens souterrains et des propositions de sécurisation. Le 3 août 2014, les présidents François Hollande et Joachim Gauck se sont rendus au Hartmannswillerkopf pour une commémoration du centenaire de la Grande Guerre, première cérémonie de ce type sur ce site. Le 10 novembre 2017 a eu lieu la cérémonie inaugurale de l'historial franco‑allemand de la Grande Guerre, présidée par les présidents Emmanuel Macron et Frank‑Walter Steinmeier. Le Hartmannswillerkopf a inspiré photographes et peintres, parmi lesquels François Flameng, et le cimetière militaire apparaît dans une scène du film Jules et Jim ; un documentaire de 2004, HWK, la mangeuse d'hommes, réalisé par Daniel Ziegler, traite de la bataille.