Origine et histoire
La chapelle Notre‑Dame‑de‑la‑Gorge se situe au fond du Val Montjoie, commune des Contamines‑Montjoie (Haute‑Savoie), à 1 210 mètres d’altitude, en bordure du Bon‑Nant. Présente depuis au moins le XIe siècle, elle a été reconstruite dans un style baroque entre 1699 et 1707. Elle se trouve sur l’itinéraire qui, depuis la vallée de l’Arve via Saint‑Gervais, mène au col du Bonhomme puis vers l’Italie, et un ancien ermitage lui est rattaché en amont du cours d’eau.
Un ermite se serait installé dès le Xe siècle pour abriter les voyageurs ; le sanctuaire était alors dédié à saint Antoine et finit par devenir paroisse. En 1338 le village de la Gorge comptait trente feux ; en 1443, lors de la visite de Mgr Vittelschi, il n’en restait plus que quatorze et l’évêque signala l’état dégradé de la toiture. Un incendie détériora l’église en 1518, et en 1606 saint François de Sales constata une nouvelle diminution des foyers, à dix feux. Le curé Nicolas Gouttry, en poste de 1629 à 1653, fit édifier une maison pour accueillir les voyageurs. Entre 1699 et 1707 le curé Colliex entreprit la reconstruction de l’église, confiée à l’architecte Jean La Vougna. Pendant la Révolution française l’édifice servit d’écurie et ses cloches furent réquisitionnées ; la paroisse fut supprimée en 1804 et rattachée aux Contamines, tandis que l’église devint un lieu de dévotion mariale. À partir de 1838 le pèlerinage de Notre‑Dame de la Gorge retrouva son rayonnement, la chapelle fut restaurée et les biens de l’ancienne paroisse aliénés à la Révolution furent rachetés. Le pèlerinage du 21 août 1873 rassembla près de 10 000 personnes ; la sacristie conserve les bannières confectionnées pour cette occasion.
L’édifice se compose d’une nef unique flanquée au nord d’un clocher carré couronné d’un bulbe. Sur la façade, une niche au‑dessus de la porte abrite une Vierge à l’Enfant polychrome ; le fronton supérieur, percé d’un oculus, porte la devise EGO MATER PVLCHÆ BONITATIS. Deux cartouches de part et d’autre de la porte portent les inscriptions QVI MARIAM INVENERIT INVENIET VITAM et FVNDAMENTA EJVS IN MONTIBVS SANCTIS. L’intérieur est orné de stucs et de trois retables dorés de style baroque au‑dessus des autels.
Le retable central représente la Vierge de l’Assomption honorée par deux anges et, tout en haut, Dieu le Père avec la Vierge à sa gauche et le Christ à sa droite, places inversées au XVIIIe ou XIXe siècle ; ce retable serait l’œuvre de Jacques Clairant. Les statues latérales actuelles, saint Bernard de Clairvaux et saint Antoine, ne sont pas d’origine. Le retable de gauche présente des colonnes ajourées et une frise figurant les anges gardiens consolant les âmes du purgatoire. Les piliers portent des croix de consécration reprenant les armes de Savoie et l’un d’eux accueille une statue de saint François de Sales ; une poutre de gloire, unique dans le Faucigny, complète le chœur.
En 1728 le curé Gaillard fit édifier quatorze petits oratoires le long du chemin des processions, formant un rosaire composé de cinq Mystères Joyeux, cinq Mystères Douloureux et cinq Mystères Glorieux, le quinzième mystère, le Couronnement, étant représenté dans l’église. Vers 1840 cet ensemble fut transformé en chemin de croix ; les oratoires actuels, restaurés, sont de dimensions plus modestes.
Après des travaux autour de 1900, une restauration du sanctuaire commença en 1952 ; le grattage fit apparaître les couleurs d’origine de la voûte et des murs, notamment une voûte bleu foncé étoilée d’or, et des statues des XVIIe et XVIIIe siècles retrouvées dans les greniers ou les oratoires extérieurs furent replacées dans les niches vidées au début du siècle. L’édifice est inscrit au titre des monuments historiques depuis 2015.
À deux cents mètres en amont, une petite chapelle accrochée à la paroi rocheuse remplace une construction antérieure située au ras du Bon‑Nant, emportée par une crue en 1914 ; la tradition attribue ce site au premier ermite de la Gorge. Les 15 août, jour de l’Assomption, et 8 septembre, fête de la Nativité de la Vierge, une procession relie encore Notre‑Dame‑de‑la‑Gorge à la Sainte‑Chapelle.