Origine et histoire de la Chapelle Notre-Dame de Pritz
La chapelle Notre‑Dame de Pritz, située à Pritz près de Laval, est un édifice à dominante romane dont la construction s’étend du VIIIe au XIIe siècle. Elle occupe un emplacement à environ 1 500 mètres sur la route de Changé, près d’un ancien gué sur la Mayenne ; Pritz est aussi le nom d’un ruisseau affluent long de 3 760 mètres. Une niche de la façade a été inscrite au titre des monuments historiques en 1926 et la chapelle a été classée en 1938. Propriété privée depuis sa vente le 12 germinal an II pour 1 805 livres, elle est restée dans la même famille qui l’a préservée.
Le lieu est sans doute l’ancien monastère désigné Prisco Siccino ; le testament de l’évêque Béraire, daté du 21 février 710, évoque des dispositions qui concernent cet établissement, et des parties de la chapelle pourraient remonter à cette époque. L’édifice n’est guère mentionné entre le VIIIe et le XIe siècle ; l’auteur des Actus pontificum Cenomannis, qui écrivait vers 830, ne le cite pas. La fondation de la ville de Laval vers 1020 et son rattachement initial à l’église de Priz témoignent toutefois du rôle paroissial ancien de la chapelle.
Des vestiges datés de la période intermédiaire entre le VIIIe et le XIe siècle montrent que le culte ne s’y est pas interrompu. Les bénédictins de la Couture y établirent un prieuré et confièrent l’administration paroissiale à un chapelain. En 1150, le cimetière de Priz restait le seul lieu d’inhumation pour les habitants de Laval, moyennant un honoraire de 13 deniers, et jusqu’à la fin du XIIe siècle l’église primitive fit encore fonction de paroissiale. À cette époque l’édifice fut agrandi : le chœur, les bas‑cotés et les absides subsistent, tandis que la nef primitive fut en grande partie démolie et remplacée par les trois travées de la nef actuelle, qui doublent alors la longueur de l’édifice (travaux datés de 1080 à 1085). Le titre paroissial fut ensuite transféré vers l’église de la Trinité, édifiée au centre du nouveau bourg, mais la chapelle conserva un prieuré et demeura un lieu de pèlerinage.
Le prieuré fut richement décoré : on y relève des peintures, dont douze tableaux sous l’arcade du transept et un zodiaque, ainsi que des sépultures notables comme celle d’André Merienne, dont la statue et l’inscription ont été conservées. Le sanctuaire a attiré des dévotions locales, des bénédictions de mariages et des offices solennels, et demeura vénéré malgré la commende. Lors de la vente révolutionnaire la chapelle présentait deux autels à baldaquin du XVe siècle, une clôture ajourée du XVIe siècle séparant le chœur et la nef et des statues en bois du XVe siècle représentant la Vierge et saint Jean ; des éléments de jubé plus anciens subsistent encore. Le retable du maître‑autel, daté de 1677, est attribué avec probabilité au Lavalloise Michel I Lemesle, les statues de saint Pierre et de saint Paul portant sa signature. La liste des prieurs, documentée du XVe au XVIIIe siècle, témoigne d’une succession de religieux issus de divers ordres et institutions.
La Charité de Priz, ou l’Aumônerie, existe au plus tard depuis le début du XIVe siècle et se distingue par une organisation originale : elle distribuait chaque année, le jour de l’Ascension, des pains et des deniers dans le cimetière de Priz. Des mentions antérieures, notamment un legs en 1364, et des comptes conservés montrent une structure de receveur‑prêtre, de recettes et de contrôles par des commissaires. En 1510, ses revenus en argent s’élevaient à 30 livres 15 sols 5 deniers et ses revenus en nature à 30 septiers, une mine et un boisseau de grains (soit 245 boisseaux). La distribution mobilisait boulangers et ouvriers : on préparait quelque quatre mille pains, on édifiait des enclos pour les recueils et on assurait la garde durant l’opération. L’institution cessa d’exister en 1550 et ses revenus furent rattachés à l’hôpital Saint‑Julien, avec une gestion encore partielle pendant quelques années.
Au plan féodal, le fief de Priz comprenait une closerie et d’autres dépendances ; il relevait des seigneuries de Plusiers en Ruillé‑Froidfond et sa féodalité s’étendait sur plusieurs paroisses voisines. Diverses familles se succédèrent dans la seigneurie et des transactions y sont documentées, notamment une vente de dépendances au monastère de Patience de Laval en 1398, dont il est fait mention d’une vente nationale en 1791 pour 15 911 livres.
L’intérieur de la chapelle conserve d’importantes peintures murales médiévales, dont des campagnes allant du premier quart du XIIe siècle au début du XIIIe siècle : le calendrier des saisons sur l’intrados de l’arc du chœur (début du XIIIe siècle) recouvre un calendrier plus ancien du XIIe siècle ; de la première campagne subsistent six vieillards de l’Apocalypse et un cycle de la Vierge (Annonciation, Nativité, Vierge allaitante). Dans la nef se lisent un martyre de sainte Catherine, des orants probablement liés à la famille Merienne, et deux peintures superposées de saint Christophe des XVe et XVIe siècles, accompagnées d’une grande statue du même saint.
Sur le mur sud de la nef deux enfeus jumelés conservent les gisants d’André Merienne et de son épouse. La nef est séparée par une clôture en bois datée de 1776 et signée J. Gentil ; des éléments d’un jubé plus ancien subsistent démontés dans l’espace liturgique. Un groupe de sculptures en terre cuite, correspondant à une station d’un chemin de croix monumental, comprend notamment sainte Véronique ; ces pièces auraient été préservées pendant la Révolution, tandis qu’une statue de Marie‑Madeleine placée à l’extrémité du groupe semble d’une facture différente. Deux statues remarquables figurent encore : saint Christophe et saint Roch.
Une inscription sur la porte en bois de l’entrée porte la date de 1662 ; les marches descendant dans la nef et la dalle du seuil sont des dalles funéraires mérovingiennes provenant du cimetière qui entourait la chapelle et sur lequel la nef a été prolongée au XIe siècle.