Origine et histoire de la Chartreuse de la Verne
L'ancienne chartreuse de la Verne, dite monastère Notre-Dame de Clémence de La Verne, est une fondation chartreuse de 1170 située à Collobrières, au cœur du massif des Maures, à la limite des diocèses de Fréjus et Toulon, dans le Var ; elle est classée au titre des monuments historiques. Plusieurs hypothèses expliquent l'origine du nom « La Verne » : verna (esclave), vernium ou verno (aulne) en latin populaire et en provençal, la déesse païenne Laverna, l'usage pour désigner des descendants sarrasins de Fraxinet, ou l'analogie avec La Verna toscane liée à saint François d'Assise. Le bourg castral de Gibouel apparaît dans des actes liés à la délimitation du domaine de La Verne en 1174 et 1223, et plusieurs donations datées de 1204 à 1244 par la famille de Felgueriis et d'autres coseigneurs concernent des terres en territoire de Felgueiras. La chartreuse a été fondée vers 1170 par Pierre Isnard, évêque de Toulon, et Frédol d'Anduze, évêque de Fréjus, sous le vocable de la Vierge, l'ordre des Chartreux étant déjà présent à Montrieux ; la première église romane fut consacrée le 3 octobre 1174. L'édifice roman fut partiellement détruit par un incendie puis reconstruit ; il fut pillé en 1416 par les seigneurs de Bormes et la communauté subsista jusqu'au départ des Chartreux pendant la Révolution. L'Assemblée constituante décréta la confiscation des biens de La Verne le 2 novembre 1789 ; l'inventaire de juin 1790 fait état d'une communauté de seize membres, onze pères et cinq convers. Des éléments romans subsistent : le mur nord de l'église et une partie de l'abside. La cloche d'origine, datée du XVIIe siècle, a été placée sur un socle dans le grand vestibule de la mairie de Collobrières, et la cloche d'appel (tintenelle) a été classée au titre des objets mobiliers le 26 juin 1982. La chartreuse était alimentée par un réseau de mines d'eau : quatre galeries, fermées par une grille, s'ouvrent en retrait du bassin de recueil des eaux en bordure de la piste, près de la poterne. Parmi les prieurs successifs figurent Didier et Étienne, évêques de Toulon, Bertrand de Correns (prieur en 1190), ainsi que des religieux des XVIIe et XVIIIe siècles tels que Denys de Sailli, Jean-Baptiste Giraud, Mathias Régis, Alexandre Perraud et Joseph-Claude de Geoffroy, dont les carrières et fonctions sont mentionnées dans les archives. La chartreuse a subi des incendies en 1214, 1271 et 1318 qui détruisirent l'ensemble des bâtiments sauf l'église, et elle fut reconstruite à plusieurs reprises, continuant d'exercer un rayonnement spirituel jusqu'à la Révolution. En 1790 les biens furent séquestrés puis, après le départ des chartreux, les bâtiments et terrains furent vendus comme biens nationaux en 1792. Le site fut affecté à l'administration des Eaux et Forêts le 1er mars 1961, qui participa aux premiers travaux d'entretien pour l'hébergement de son personnel. Les bâtiments actuels datent principalement de la fin du XVIIe et du XVIIIe siècle ; pour les parties monumentales on utilisa la serpentine des Maures, pierre verte extraite dans les carrières de La Môle. Les ruines de la chartreuse ont été classées au titre des monuments historiques par décret du 18 janvier 1921 ; le classement porte sur le cloître, la cour, les communs, la chapelle, le jardin, le four à pain, le moulin et la fontaine, à l'exception du bâtiment d'exploitation agricole et de la cour hors cloître. Une étude d'ensemble conduite par l'architecte en chef des monuments historiques Dominique Larpin, suivie d'un repérage mené par l'association des Amis de la Verne et le Groupement REMPART, puis d'une maîtrise d'œuvre assurée par Francesco Flavigny, a permis des travaux de restauration, de restitution et de réutilisation de grande qualité. Le Conseil général du Var a aménagé la piste d'accès et créé un parking afin de faciliter l'approche du site. Depuis 1983, la chartreuse accueille une communauté de la Famille monastique de Bethléem, d'abord de moines puis de moniales, qui a rendu au lieu sa vocation monastique tout en le maintenant ouvert au public. Une trentaine de moniales se partagent des ermitages ; un ermitage témoin, ouvert à la visite, présente un agencement inspiré du modèle chartreux. L'ancien maître-autel de la Verne a été transféré à la chartreuse de Montrieux et, au-dessus de la poterne, la statue de Notre-Dame de Clémence a été restaurée et retrouve sa place pour accueillir les visiteurs. La documentation sur la chartreuse est fournie : on y trouve un DVD réédité en 2014, plusieurs monographies et guides, des articles de presse et des fonds d'archives, des notices et ressources en ligne, ainsi que des mentions littéraires, notamment dans L'Homme pressé de Paul Morand. Le site est par ailleurs illustré dans des galeries photographiques et relié à des notices et articles consacrés à l'ordre des Chartreux, à la liste des chartreuses et à la chartreuse de Montrieux, qui est à l'origine de la fondation de La Verne.