Chartreuse Notre-Dame-du-Val-de-Bénédiction à Villeneuve-lès-Avignon dans le Gard

Crédit photo : Véronique PAGNIER - Sous licence Creative Commons

Propriété privée ; propriété de la commune ; propriété de l'Etat

Période

XIVe siècle, XVe siècle, XVIIe siècle, XVIIIe siècle

Patrimoine classé

Origine et histoire de la Chartreuse Notre-Dame-du-Val-de-Bénédiction

La chartreuse Notre‑Dame‑du‑Val‑de‑Bénédiction, située à Villeneuve‑lès‑Avignon (Gard, Occitanie), est un vaste ensemble monastique médiéval protégé au titre des Monuments historiques, classé dès 1862. Fondée par le cardinal Étienne Aubert devenu le pape Innocent VI, elle s’organise autour d’un ensemble de cloîtres, chapelles, salles conventuelles et bâtiments annexes datés du XIVe siècle et remaniés aux siècles suivants. Innocent VI fit édifier, à l’est de son palais, le grand tinel et la chapelle Saint‑Jean‑Baptiste, décorés par Matteo Giovannetti, et dota la chartreuse d’une communauté et de biens qui en firent l’un des monastères les plus riches du royaume. La construction initiale comprit le grand cloître dit « des morts » entouré de cellules, le petit cloître dit « du colloque », la salle capitulaire et l’église conventuelle ; des agrandissements et aménagements se poursuivirent sous l’impulsion des neveux du pape.

Le monastère reçut d’importants dons fonciers, sur les rives du Rhône et au‑delà, ainsi que des revenus tirés de l’assèchement et de la mise en culture d’étangs, ce qui permit des embellissements et la fondation d’une chartreuse à Marseille. Au XVIIe siècle, la porte monumentale et la fontaine Saint‑Jean‑Baptiste furent réalisées par François de Royers de la Valfenière ; le portail fut franchi en grande pompe par Louis XIV lors d’une visite solennelle.

La Révolution entraîna la suppression des ordres et la vente des bâtiments en lots, qui furent transformés en habitations et usages agricoles ; la parcellisation perdura au XIXe siècle. Le site connut des détériorations mais aussi des sauvetages d’œuvres, et le tombeau d’Innocent VI, démonté puis retrouvé, réintégra sa chapelle funéraire. En 1909 Jules Formigé effectua des relevés et des premiers travaux de restauration, tandis que l’État acquit progressivement les parcelles.

Depuis 1973 la Chartreuse est un centre culturel de rencontre — d’abord le CIRCA, puis le Centre national des écritures du spectacle — consacré à la création et à l’accueil d’auteurs et d’artistes, avec des résidences, manifestations et programmes internationaux ; en 2019 le ministère de la Culture l’a désignée « lieu de référence pour les écritures dramatiques issues de la francophonie ». Le site accueille chaque année des dizaines de milliers de visiteurs et de spectateurs ainsi qu’une centaine d’auteurs et de nombreux artistes du spectacle.

Le plan conserve des éléments variés : pavillon d’entrée et cour des femmes, la porte de la clôture et la fontaine, allée des mûriers, quartiers des officiers et des convers, la boulangerie, la bugade et la prison, l’hospice, des jardins et plusieurs cloîtres, ainsi que l’église conventuelle avec ses chapelles dont la chapelle de la Sainte‑Trinité abritant le tombeau d’Innocent VI. L’entrée principale a été remaniée au XVIIIe siècle et plusieurs blasons ont été martelés à la Révolution ; la porte monumentale de La Valfenière conserve une copie de son décor original déposée dans le petit cloître.

L’église, édifiée par Innocent VI, présente la qualité du savoir‑faire des maîtres tailleurs avignonnais du XIVe siècle, avec doubleaux et nervures retombant sur culots sculptés et marques de tâcherons sur certaines pierres ; son abside s’est effondrée au XIXe siècle. Le petit cloître et la salle du chapitre appartiennent à la première phase de la fondation ; la galerie méridionale, dite « du colloque », permettait exceptionnellement la parole communautaire.

Les cellules, organisées autour d’un petit jardin et d’un balcon couvert, restent conformes à la règle cartusienne avec trois pièces principales et un dispositif de passe‑plat évitant le contact visuel entre frères ; la plupart servent aujourd’hui d’hébergement pour les artistes en résidence, une cellule‑témoin étant aménagée pour les visites. La bugade conserve des aménagements de lavage et la prison comprend plusieurs cellules pour la pénitence ou la détention, avec des hagioscopes permettant au reclus de suivre l’office.

La chapelle Saint‑Jean‑Baptiste, vestige du palais d’Étienne Aubert, conserve des fresques de Matteo Giovannetti représentant notamment des scènes de la vie de saint Jean‑Baptiste, des apôtres, la Crucifixion et une image du pape agenouillé devant la Vierge ; ces peintures, partiellement altérées, sont les seuls vestiges substantiels du décor peint d’origine encore visibles sur le site.

Le tombeau d’Innocent VI, exécuté de son vivant et conservé en pierre de Pernes avec un gisant en marbre blanc, un dais à clochetons et de nombreuses niches ayant abrité des statuettes, a été réalisé sous la direction de Bertran Nogayrol et le gisant attribué au sculpteur Bartholomé Cavallier ; il a fait l’objet de déplacements puis de restitutions jusqu’à sa réinstallation dans la chapelle funéraire.

Le mobilier et les tableaux de la chartreuse furent largement dispersés après la Révolution ; plusieurs œuvres majeures et meubles se trouvent aujourd’hui dans le musée Pierre‑de‑Luxembourg et au musée Calvet, parmi lesquels Le Couronnement de la Vierge d’Enguerrand Quarton et des peintures de Reynaud Levieux, Nicolas Mignard, Philippe de Champaigne, Cesare Gennari et d’autres artistes cités dans les inventaires.

Liens externes

La Chartreuse Notre-Dame-du-Val-de-Bénédiction Wikipédia

La Chartreuse Notre-Dame-du-Val-de-Bénédiction sur le site officiel

Chartreuse Notre-Dame-du-Val-de-Bénédiction sur Monumentum