Origine et histoire du Château de la Forest
Le château de la Forest, aussi appelé la Grande Forest ou la Grande-Forêt, est une maison forte du XIVe siècle située à Saint-Jean-de-Chevelu, en Savoie, qui formait le centre de la seigneurie de La Forest. Il est inscrit au titre des monuments historiques en 1995. Aujourd'hui abandonné, il menace de s'effondrer ; un premier éboulement en 2007 a ouvert un trou dans la partie haute de la façade est.
La maison forte occupe un contrefort du Mont du Chat, au pied de forêts de hêtres et d'épicéas, et se trouve à gauche en sortant du tunnel du Chat, accessible depuis le bourg par la route nationale. Elle est proche du château de Chevelu, dit de Cinne, et a longtemps constitué le centre d'une seigneurie. Selon l'érudit Jean Létanche, le nom du fief viendrait de la forêt dont une partie subsiste encore et se retrouve dans le sinople des armes de la famille La Forest.
La famille de La Forest possédait la maison forte au XIVe siècle, filiation noble prouvée en 1398, et l'a conservée jusqu'au milieu du XVIIe siècle. Des mentions antérieures citent Berlion de La Forest, témoin en 1232, Sicamore de La Forest en 1296, et Pierre de La Forest qui, en 1302, fit reconnaissance de biens tenus en fief. Guillaume de La Forest apparaît dans des actes et événements du milieu du XIVe siècle : il participa au tournoi de Chambéry en 1348 et reçut en 1358 des biens de Guillaume de Chevelu. Aux XVe et XVIe siècles, les actes montrent des partages et ventes entre membres de la famille, des reconnaissances d'hommage et des testaments rédigés entre 1422 et 1477. Au XVIe siècle François de La Forest vivait au château ; son fils Claude épousa Antoinette de Seyssel en 1538, et vers 1590 Philibert de La Forest est mentionné comme seigneur de La Forest, de Chevelu et du Châtelard. Par son testament du 24 décembre 1646, Philibert fit des legs en faveur de ses filles Marguerite et Isabeau, cette dernière étant mariée à Pierre de Grenaud, seigneur de Condaminaz, avec la volonté que leur fils reprenne le nom et les armes de La Forest. Dès 1675 l'héritier porte les titres de Grenaud et de La Forest ; la famille de Grenaud conserve la terre pendant le XVIIIe siècle, successivement Jacques, Joseph et Jean-Jacques de Grenaud de La Forest. En 1792 Joseph de Grenaud afferma la terre à François Million Rousseau ; en 1793 le domaine, possédé par Marie Victoire de Grenaud, fut mis sous séquestre puis, après radiation de la liste des émigrés, la levée du séquestre permit la vente de La Forest le 1er vendémiaire an XII (24 septembre 1803) à François Million-Rousseau.
Situé à quatre kilomètres de Yenne, le château illustre l'architecture militaire de la fin du XIIIe et du début du XIVe siècle. Élevé sur une terrasse en gros appareil, il présente une enceinte quadrangulaire flanquée de quatre tours d'angle aujourd'hui arasées au niveau du corps de logis. L'accès s'effectue par une étroite porte en arc brisé, protégée par une cinquième tour au centre de la façade ouest qui, avec la tour d'angle, forme un châtelet d'entrée. On observe encore les restes de la herse et les traces d'un hourd qui, remplacé par un balcon au siècle dernier, jetait jadis une galerie de bois entre les tours pour défendre les murailles. Le château comporte un rez-de-chaussée et un étage ; une chapelle adossée au mur sud-est, construite à l'extérieur, sert aujourd'hui d'étable. Les cinq tours, découronnées sur l'ordre du représentant de la Convention pendant la Révolution, étaient autrefois en poivrière à mâchicoulis et protégées par des barbacanes ou casemates. Les ouvertures comprennent plusieurs fenêtres à meneaux, au-dessus de l'une desquelles sont sculptées les armes de la famille La Forest. À courte distance, la "Petite Forest" conserve les fondations d'un donjon carré posé sur une butte ; à côté, des pans de mur ruiné et deux granges aux bases gothiques proviennent probablement du château primitif, tandis que le donjon conserve une fenêtre à meneau. Dans le paysage environnant, la Dent du Chat se détache en arrière-plan à gauche.