Origine et histoire
La chapelle-ossuaire, datée de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle, se trouve dans le cimetière de Wihr-au-Val, dans le Haut-Rhin. Elle est située au nord de l’église Saint-Martin, reconstruite en 1873, alors que l’ancienne église paroissiale se trouvait plus au nord, à l’emplacement approximatif du cimetière actuel. Avant le XIXe siècle, le cimetière entourait l’église et la chapelle ; un terrain situé en amont, nommé « Gräber », a livré des tombes non datées, de même que des sépultures en prolongement du chœur de l’église. L’édifice servait à la fois de chapelle et d’ossuaire pour Wihr-au-Val et desservait aussi le village de Walbach jusqu’en 1696. Décrite en mauvais état vers 1870, la chapelle a bénéficié d’une réparation sommaire de la toiture en 1871, puis d’une restauration importante en 1889 au cours de laquelle la charpente, le plancher et les vitrages ont été remplacés et les derniers vestiges d’un autel en briques et pierre déposés. Une restauration conduite en 1987 par l’architecte Claude Gwinner a porté sur de nouveaux enduits extérieurs, un nouveau plancher, la révision de la couverture et du vitrage, ainsi que la pose d’une balustrade et d’une vitre protégeant les ossements. L’édifice est inscrit au titre des monuments historiques depuis le 9 juillet 1986.
Le plan de la chapelle est rectangulaire, d’environ 11 m de long sur 8,70 m de large ; elle est partiellement encastrée dans la pente au nord, de sorte que l’étage est de plain-pied de ce côté. La construction, haute de 12 m, se développe sur trois niveaux séparés par des planchers ; le pignon occidental porte un clocheton ouvert coiffé d’une croix. Les murs sont principalement en moellons enduits, avec des chaînages d’angle et des encadrements de portes et fenêtres en blocs de grès taillés. Le rez-de-chaussée, occupé par l’ossuaire, s’ouvre vers le sud sur le cimetière par une porte et deux baies en accolade ; il se compose d’une unique pièce pavée de galets de la Fecht et divisée par une balustrade baroque en deux espaces : au sud un lieu de prière avec autel, au nord l’entrepôt des ossements. L’étage abrite la chapelle, autrefois dédiée à Saint-Michel ; la seule entrée, une porte percée dans le mur occidental et jadis desservie par un escalier depuis le cimetière, a été remplacée par une rampe en terre. La porte porte un arc en accolade entouré des armoiries de Wihr-au-Val, de la branche à l’étoile des Hattstatt et d’un troisième blason non identifié. L’intérieur est une pièce quadrangulaire au sol en plancher posé sur solives ; le mur oriental est percé d’une baie gothique à deux lancettes avec réseau flamboyant, complétée par deux fenêtres simples en vis-à-vis au nord et au sud, et par une petite fenêtre à arc en plein cintre dans l’angle sud-ouest, sans doute réemploi.
Le rez-de-chaussée conserve plusieurs memento mori du XVIIIe siècle : une fresque carrée d’environ 1,20 m portant une citation en allemand extraite du deuxième Livre des Maccabées (chap. 12, v. 46) et, aux extrémités de la balustrade, des têtes de mort accompagnées des inscriptions « Den Frommen gut / Den Bösen bös » à l’ouest et « Heut an mir / Morgen an dir » à l’est. On y trouve également une toile représentant la résurrection des morts, peut‑être issue de l’ancienne église paroissiale ; des vestiges d’un portail gothique du XVe siècle et un bénitier gothique du XIVe siècle y sont aussi conservés et pourraient provenir de cette même église. L’étage ne contient plus de mobilier : au début du XIXe siècle il existait un autel et plusieurs retables — dont un retable baroque, un retable représentant Saint-Michel et un groupe sculpté de la Vierge de Pitié — mais l’autel a été détruit en 1889 après avoir déjà été dépouillé.
En 1997, vingt-trois images pieuses imprimées sur vélin ont été découvertes dans l’ossuaire, roulées en boules au milieu d’une couronne végétale posée sur les ossements. Il s’agit de feuillets rectangulaires de six à dix centimètres représentant la Vierge, des saints ou des emblèmes religieux comme le Sacré-Cœur ; certains conservent des traces de couleurs et la plupart portent des perforations ou des traces de colle indiquant qu’ils étaient fixés. Ces images, majoritairement datées du XVIIIe siècle avec quelques exemplaires plus anciens du XVIIe siècle, semblent provenir des régions d’Augsbourg et d’Anvers plutôt que d’Alsace, ce qui correspond à une production liée à la Contre‑Réforme. Leur présence dans l’ossuaire est incertaine, mais il est probable qu’elles avaient été apposées sur la croix ou placées dans les cercueils avant d’être transférées avec les ossements lorsque les tombes ont été relevées.
Le cimetière conserve aussi plusieurs monuments funéraires anciens, parmi lesquels un pinacle du XVe siècle issu du portail de l’ancienne église détruite vers 1873, le monument d’Anna Maria Schumacher (1842), les monuments des curés François Antoine Biellmann (décédé en 1845 à 38 ans) et J. Michel Eschbach (décédé en 1832 à 73 ans), ainsi qu’une dalle funéraire datée de 1732 portant l’âge de 35 ans mais dont le nom n’est plus lisible.