Origine et histoire de la Collégiale Notre-Dame
La collégiale Notre-Dame de Mantes-la-Jolie prend forme au milieu du XIIe siècle : le premier niveau de la façade occidentale est daté de 1155 et des études situent la mise en chantier autour des années 1150-1160. Sa construction suit les étapes du gothique d'Île-de-France : les parties basses relèvent du premier art gothique, avec un haut vaisseau encadré de bas-côtés et un chœur sans chapelles rayonnantes, tandis que l'élévation des parties supérieures et des tribunes appartient au deuxième âge gothique. Des campagnes datées de 1170-1175 témoignent de cette seconde phase ; les baies hautes sont achevées avant 1200 et le voûtement sur croisée d'ogives de la nef intervient au début du XIIIe siècle. Les voûtes commencent par l'abside et les travées voisines de la nef pour se poursuivre vers l'ouest, et la datation des charpentes par dendrochronologie confirme que leur pose suit l'achèvement des baies hautes. La façade occidentale, achevée sous l'influence de Laon, présente le principe du triplet de baies surmonté d'une rose. Les travaux semblent connaître une interruption avant la reprise vers 1240 pour la construction des étages des tours ; par la suite, des chapelles rayonnantes sont ajoutées au chevet entre la fin du XIIIe et le début du XIVe siècle, et des chapelles latérales sont aménagées le long des bas-côtés. La chapelle de Navarre est fondée en 1313 et le portail des échevins est exécuté vers 1320. Pendant la guerre de Cent Ans, à partir de 1351, Charles de Navarre fortifie l'église avec une clôture, un pont-levis et des aménagements intérieurs tels qu'un puits, des moulins et des fours ; la collégiale reprend sa fonction cultuelle en 1432. La tour nord est reconstruite à partir de 1492 et achevée en 1508 après un effondrement antérieur. L'édifice subit de graves dégradations à la Révolution : pillage du mobilier et martellement de nombreuses statues en 1794 ; il est alors successivement converti en temple de la Raison, fabrique de salpêtre et forge, puis rendu au culte en 1795 avec des réparations sommaires. Au début du XIXe siècle, les architectes signalent l'état alarmant des toitures, des tours, des voûtes et du pavage ; les interventions initiales restent limitées faute de crédits. Après la création des Monuments historiques, l'État finance des campagnes de restauration ; sous la direction de Postel, puis du contrôle de Labrouste, on intervient sur la façade sud (1839) et la façade ouest (1840-1842), mais ces travaux sont critiqués et Labrouste démissionne. Questel engage des travaux urgents sur la tour nord, que l'on démolit à partir de 1845 pour la relever après reprise des parties basses ; en 1846 Alphonse Durand lui succède et reconstruit la tour nord sur le modèle de la tour sud, réunissant les deux tours par une haute galerie inspirée de Notre-Dame de Paris, ouvrages achevés en 1855. La tour sud est consolidée en 1858, les voûtes hautes reprises de 1867 à 1870, puis plusieurs voûtes s'effondrent en 1870 à la suite de la destruction du pont et sont aggravées par un ouragan en 1872 ; les réparations sont financées et engagées en 1873. Durand restaure encore le portail droit entre 1877 et 1880, et l'architecte Simil dirige de 1888 à 1895 des travaux de consolidation de la tour sud. Au XXe siècle et après la Seconde Guerre mondiale les restaurations se poursuivent, notamment la restitution des remplages, puis des campagnes récentes ont porté sur la réfection de la toiture (1998-2003) et la restauration des portails de la façade occidentale (1996-1998) sous la maîtrise d'œuvre de l'ACMH Bernard Fonquernie. Le décor en tuiles polychromes, documenté par un dessin de Durand vers 1850 et décrit dès 1791 par Millin, a été restitué à l'identique au XIXe siècle et constitue aujourd'hui l'un des éléments visibles de cette phase de restauration. Par son élévation à trois niveaux et par certains choix stylistiques, la collégiale reflète l'influence des grands chantiers parisiens et exprime l'ampleur des ambitions et des moyens liés à sa proximité avec le pouvoir royal depuis l'époque médiévale.