Origine et histoire de la Collégiale Saint-Mexme
La collégiale Saint-Mexme de Chinon, ancienne abbaye située en Indre-et-Loire, est classée au titre des monuments historiques par la liste de 1840 et fut le principal édifice religieux de la ville jusqu'à la Révolution. Selon Grégoire de Tours, Saint-Mexme (Maxime), disciple de saint Martin, s'installe au Ve siècle dans un ermitage troglodytique à l'est du castrum et y fonde une première église qui devient le noyau d'un petit monastère. Vers l'an Mil, ce monastère se transforme en collégiale ; l'église est alors reconstruite sur un plan basilical. Dès 1050-1054, l'édifice est agrandi par l'adjonction d'un massif occidental comprenant un narthex encadré de deux tours. Le chevet est reconstruit au XIIe siècle ; la clé de voûte sculptée représentant la reine Radegonde, vestige de cette époque, a été déposée au musée de la chapelle Sainte-Radégonde de Chinon. La nef est prolongée vers l'ouest au XIIe siècle et un transept avec chœur à déambulatoire et chapelles rayonnantes achèvent d'en faire un vaste sanctuaire de pèlerinage. Un quartier canonial se développe au sud et certaines maisons de ce secteur subsistent encore. Après la Révolution, des travaux sont entrepris pour rendre l'édifice au culte, mais un effondrement au début du XIXe siècle entraîne la ruine des parties orientales. Les parties restantes, la nef et le massif occidental, sont alors transformées en école et conservent cette fonction jusqu'en 1980. Un chantier de restauration et des fouilles permettent ensuite de mieux connaître l'histoire de l'édifice et de lancer sa réhabilitation. La collégiale est aujourd'hui un lieu culturel : la nef de l'an Mil accueille depuis 2002 un petit théâtre en bois pour des spectacles estivaux, et le massif occidental reçoit des expositions temporaires.
La nef de l'an Mil est conservée dans son intégralité ; construite en moyen appareil, elle présente deux niveaux d'élévation avec de grandes arcades en plein cintre au rez-de-chaussée et des fenêtres hautes au niveau supérieur, soulignées par un cordon à billettes. Elle a toujours été charpentée et est actuellement couverte d'une fausse voûte en bois datant du XVIIIe siècle ; des peintures murales ont été retrouvées sous les arcs des fenêtres hautes et de certaines arcades lors des restaurations. Le massif occidental, ajouté vers 1050, constitue un exemple remarquable de façade harmonique en Touraine ; il se compose d'un narthex voûté en plein cintre animé d'arcatures et d'une tribune voûtée à l'étage, séparée de la nef par un mur postérieur percé de trois baies. La tour sud a été entièrement reconstruite au XVe siècle tandis que la tour nord a été surélevée à la même époque et renferme aujourd'hui un escalier du XVIIIe siècle qui relie le rez-de-chaussée et le premier niveau.
Dans la chapelle nord, une peinture romane du XIIe siècle représentant la partie haute du Christ en majesté encadrée d'une grecque a été découverte en 1983 et déposée à l'église Saint-Étienne. Le décor peint se développe aux XIIIe, XIVe et XVe siècles : au XIIIe siècle, une crucifixion inscrite dans un médaillon et des séraphins inspirés d'Ézéchiel ornent la tribune, ainsi que des fragments plus lacunaires dans la tour nord. Au XIVe siècle, sous plusieurs arcs côté nord, figurent des scènes du Nouveau Testament dont un Jugement dernier et ce qui semble être un massacre des innocents. Au rez-de-chaussée de la tour sud se trouve un cycle peint du XVe siècle associant un Jugement dernier et une Fontaine de vie ; ces fresques ont été restaurées au XIXe siècle par le comte de Galembert puis en 2001 par Brice Moulinier, et une niche représente Dieu le Père entouré d'anges, rapprochant l'ensemble de l'école de Tours de la fin du XVe siècle.
La façade de 1050 portait un riche décor sculpté largement détruit à la Révolution ; subsistent des panneaux à motifs végétaux ou géométriques en très bas-relief, que l'on retrouve également dans le narthex, les arcatures et les chapiteaux conservés. Les claveaux sculptés de la porte du fond du narthex, d'un style différent, sont généralement attribués au XIIe siècle. Dans la tribune subsistent des fragments de la façade de l'an Mil, notamment un réseau de joints rouges formant motifs décoratifs et une crucifixion en cuvette, témoins des débuts de la sculpture romane. En 2006, quatre verrières abstraites inspirées de cartons du peintre Olivier Debré ont été réalisées pour les fenêtres du massif occidental par l'Atelier Vitrail-France, selon le souhait d'obtenir de grandes plages de couleur sur des lames de verre antique sans réseau métallique.