Origine et histoire de la Commanderie de Jalès
La commanderie de Jalès se situe dans la plaine de la Berrias, sur la commune de Berrias-et-Casteljau en Ardèche. L'essentiel des archives relatives à cette commanderie et au grand prieuré de Saint‑Gilles est conservé aux archives départementales des Bouches‑du‑Rhône (cotes 56‑H 5218 à 5246). Fondée vers 1140 par les Templiers, elle voit parfois mentionnés Hugues de Payns et Raymond Pelet parmi ses fondateurs. Comme la plupart des commanderies occidentales de l'Ordre, Jalès n'avait pas de vocation militaire mais servait à réunir des ressources financières et vivrières. La commanderie subit les persécutions liées à l'affaire de Philippe le Bel, puis passe au XIVe siècle sous la tutelle des Hospitaliers de l'ordre de Saint‑Jean de Jérusalem, qui l'adaptent et la remanient. Jalès connaît un important déclin aux XVIe et XVIIe siècles, les commandeurs n'y résidant plus alors régulièrement. À partir de 1740, le commandeur Pierre‑Emmanuel de Lauberivière de Quinsonas restaure le château et en fait sa résidence : il rétablit des droits seigneuriaux, améliore la gestion des terres, introduit de nouvelles cultures et développe l'élevage du ver à soie, ce qui accroît les revenus. Il aménage trois appartements au premier étage des ailes est et ouest, fait édifier un corps d'entrée face au midi appuyé sur le grand cellier, et dote les intérieurs d'éléments décoratifs raffinés (portes en noyer, rampe en fer forgé, tapisserie de cuir doré, cheminées et boiseries sculptées, pavés vernissés). Malgré ces aménagements du XVIIIe siècle, l'ensemble conserve l'allure austère d'une maison forte médiévale, avec murailles crénelées, guérites et un grand portail protégé par une sarrasine et un pont‑levis. En 1782, la commanderie est confiée à Pierre André de Suffren ; il y séjourne à plusieurs reprises en 1786 et 1787, y fait des travaux pour améliorer le confort des appartements et en parle comme d'une demeure « fort logeable ». La tradition locale rapporte des anecdotes sur ses réceptions familiales et sur une table adaptée à son embonpoint ; sa santé déclinante l'empêche de s'y rendre après 1787. Le site de Jalès est également associé aux épisodes contre‑révolutionnaires connus sous le nom des Camps de Jalès.
Malgré les dégradations subies, notamment pendant la Révolution, une grande partie des constructions romanes a été préservée ; la transformation progressive opérée par les Hospitaliers a contribué à conférer au site l'aspect d'une maison forte en entourant les bâtiments de hautes courtines et en protégeant l'entrée par une tour et des échauguettes. La chapelle, au sud, remonte au XIIe siècle : elle conserve une abside semi‑circulaire voûtée en cul‑de‑four, une nef de trois travées, un portail en plein cintre et deux petites baies romanes, tandis que des ouvertures et des peintures murales sont d'époques plus tardives. Dédiée à la Vierge en 1151, elle est placée au XIIIe siècle sous l'invocation de sainte Marie‑Madeleine et a été transformée en grenier au XVIe siècle. La cour intérieure avec puits, le logis seigneurial et l'escalier complètent l'ensemble des éléments notables du site.
La commanderie accueille aujourd'hui une antenne du CNRS rattachée au laboratoire Archéorient de la Maison de l'Orient et de la Méditerranée à Lyon, unité spécialisée dans l'étude du Proche‑Orient ancien du Paléolithique final au début de l'époque antique et qui associe recherches sur les sociétés et sur leur environnement ; Archéorient regroupe statutaires, chercheurs associés et doctorants de disciplines variées. Par ailleurs, des concerts du festival Labeaume en Musique se tiennent chaque juin dans la cour du XVIIIe siècle.