Origine et histoire de la croix de chemin
Calvaire datant du XVIIe siècle, la croix de chemin est une croix monumentale placée au bord d'un chemin ou d'une route. Ces croix se sont développées depuis le Moyen Âge et se sont multipliées à partir de 1095, lorsque le droit d'asile leur a été étendu, leur conférant un double rôle de guide et de protection. De formes, de tailles et de matières variées — bois, granite, fonte, fer forgé ou ciment — elles agrémentent bourgs, hameaux, villes et voies de communication et symbolisent la foi de la communauté. Certaines sont l'œuvre de la volonté publique des paroisses, d'autres résultent d'initiatives privées, souvent d'une famille qui souhaitait marquer sa piété, protéger les siens ou rendre un hommage. Les croix de carrefour guident le voyageur, servent d'étapes lors de processions ou de rogations et, sur la voie des morts, ponctuent parfois le trajet funéraire pour la récitation de prières. Certaines croix ont vocation de pèlerinage, comme la croix des Rameaux qui recevait une procession importante et la bénédiction du buis, et d'autres ont été érigées en ex-voto, en mémoire d'un événement heureux ou tragique. D'autres encore rappellent des épidémies ("croix de peste"), marquent un itinéraire de pèlerinage ou délimitent juridiquement ou spirituellement l'entrée et la sortie des villages. Les croix couvertes, composées d'une croix abritée par un portique de bois ou de pierre, sont relativement rares et se rencontrent surtout en Provence; beaucoup datent des XIVe et XVe siècles. Aux croix en bois, que l'on remplaçait pieusement tous les vingt ans environ, ont succédé des croix en pierre réalisées par les tailleurs de pierre locaux grâce aux libéralités de propriétaires aisés, assurant une plus grande longévité. Lors de leur érection, les croix étaient généralement bénies et faisaient l'objet de pratiques cultuelles : processions, arrêts lors des missions paroissiales ou gestes plus humbles comme l'accrochage d'un rameau de genêt ou le dépôt d'un bouquet. Si certaines traditions se sont estompées, de nombreuses croix restent encore fleuries et font l'objet d'un entretien local soutenu par les habitants des hameaux. Sur les alpages et les sommets, des "croix alpestres" ont été érigées ; près de 70 d'entre elles ont été répertoriées sur les sommets fribourgeois. Vers le milieu du XXe siècle, des croix dites de Mission ont été portées en montagne, puis, avec le développement de l'alpinisme, d'autres croix sont apparues dans les Alpes et les Préalpes, parfois en hommage à des alpinistes disparus. Chaque croix de montagne bénéficie souvent de la protection d'un "gardien" qui organise réparations et le maintien du carnet de la croix, placé dans une boîte où figurent relevés météorologiques, notes poétiques et confidences des visiteurs. Ces croix sommitales s'inscrivent dans le même paysage religieux que les chemins de croix, chapelles et oratoires; les messes et offices en plein air contribuent à leur popularité et offrent une manière conviviale et proche de la nature de vivre la foi.