Origine et histoire de la croix de cimetière
La croix de cimetière de Saillans est une croix hosannière située en face du portail occidental de l'église Saint‑Seurin, en Gironde. Les croix de cimetière apparaissent à partir du XVe siècle ; lorsqu'elles occupent le centre du cimetière on les qualifie de croix hosannières, associées à la prière Hosanna lors de la bénédiction des rameaux. Construites le plus souvent par des maîtres maçons et offertes par de riches seigneurs, elles mettent habituellement en valeur le saint patron de la paroisse, figuré sur un côté de la croix sommitale. Datée de 1573, celle de Saillans présente un fût sculpté richement orné et des statues réparties sur trois niveaux. Sous sa base carrée se trouve le caveau funéraire des curés de Saillans. Pour Léo Drouyn, c'est la mieux conservée du département ; il la décrit comme composée d'une base carrée avec une table d'autel, d'un fût rond orné de statuettes et d'ornements, et d'une croix richement décorée de fleurons et de statuettes. Le fût est structuré en quatre étages horizontaux, séparés verticalement par quatre pilastres à clochetons qui s'élèvent jusqu'au quatrième étage, lui‑même délimité par une moulure saillante. Dans l'étage inférieur s'élèvent quatre colonnes dont les chapiteaux servent de consoles à quatre statuettes formant le second niveau ; ces dernières sont surmontées de dais qui portent à leur tour quatre autres statuettes au troisième niveau. Orientée vers le solstice d'été, la croix présente au troisième niveau, dans les angles nord‑est, sud‑est, sud‑ouest et nord‑ouest, sainte Madeleine tenant un vase de parfums et ses cheveux, saint Antoine avec un marteau et une clochette, sainte Catherine coiffée d'une couronne fleurdelisée portant une épée et un livre avec la roue de son supplice à ses pieds, et saint Jean‑Baptiste vêtu de poils de chameau portant un agneau sur la main gauche. Les statuettes supérieures représentent, aux mêmes angles, saint Pierre coiffé de la tiare et portant les clefs, l'ange Gabriel tenant une fleur et bénissant, saint Paul armé d'une épée, et saint Michel en cotte de mailles tenant le dragon enchaîné. Entre saint Michel et saint Paul, un écusson porte la date 1543, indication qui, selon Drouyn, montre que l'on exécutait au milieu du XVIe siècle des monuments encore inspirés du style du XVe siècle. Les huit statuettes se détachent presque complètement du fût, tandis que les symboles des Évangélistes couvrant le quatrième étage sont traités en bas‑relief. La croix sommitale est très élégante et couverte d'ornements de la décadence gothique ; les extrémités des branches étaient ornées de larges fleurons en feuilles frisées encadrant une tête d'ange, dont un seul motif est resté intact. À l'occident figure un crucifix vêtu d'une simple bande d'étoffe, les pieds attachés par un seul clou et une tête de mort placée au‑dessous ; à l'orient on trouve saint Seurin, patron de la paroisse, tenant une crosse et bénissant. Malgré une dégradation légère, le monument est d'ensemble remarquable ; Drouyn estime toutefois que les statuettes, d'un dessin médiocre, rendent la composition inférieure à celles de Saint‑Projet et de Marcillac, et que si la croix sommitale avait davantage d'ampleur, le monument aurait pu être un chef‑d'œuvre. La croix fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques depuis le 20 décembre 1907.