Origine et histoire
Croix sculptée dont le costume du chevalier en prière suggère une datation possible à la fin du XIVe ou au début du XVe siècle. Sur la face orientale, un Christ en croix est entouré de quatre anges aux ailes déployées tenant des calices ; en dessous, dans une petite niche, un chevalier en armure, coiffé d’un casque, est agenouillé et tourne la tête vers la croix. La face occidentale montre une Vierge en gloire entourée d’anges. La colonne et le socle ont été refaits et portent la date de 1883.
La croix monumentale est une croix chrétienne figurée, en bois, pierre ou métal, isolée — comme les croix de chemin ou de mission — ou intégrée à un calvaire. L’art insulaire développe dès le VIIe siècle le type de la haute croix ; sur le continent, la croix ne devient généralement monumentale qu’à partir de l’émergence de l’art roman au XIe siècle. Les croix monumentales connaissent un apogée aux XVIe siècle, tandis que les croix de chemin et les calvaires se multiplient particulièrement au XIXe siècle, devenant alors des lieux de rassemblement pour la prière ou pour implorer la protection contre les fléaux.
L’histoire chrétienne fait de la croix l’emblème principal à partir du IVe siècle, époque à laquelle la tradition situe la découverte de la « vraie croix » par Hélène, mère de l’empereur, entre 325 et 327 ; Constantin fit édifier une croix monumentale en or sur le mont Golgotha et, selon saint Jean Chrysostome, la croix est passée d’un instrument de supplice à l’un des plus saints emblèmes. Ce sont des moines irlandais qui, du VIIe au IXe siècle, transforment la croix en monument gravé, puis à la crucifixion, et, à partir de 1095, le concile de Clermont étend le droit d’asile aux croix de chemins, qui jouent un rôle de guide et de protection.
La disparition partielle de ces monuments résulte du vandalisme — notamment lors des guerres de religion et de la Révolution —, des intempéries, de l’usure du temps, mais aussi du passage de véhicules et de la mécanisation agricole ; les ateliers qui produisaient ces œuvres ont cessé leur activité au début du XXe siècle, et certaines croix monumentales ont néanmoins été protégées comme trésors nationaux. Les fonctions et les formes varient : croix de bornage qui matérialisent des limites, croix de bourg utilisées pour la criée d’héritage, croix de justice, croix de mission, croix de processions (Rameaux, Rogations, Saint-Sacrement, chemins de croix) et croix de pèlerinage qui commémorent souvent le donateur plutôt qu’une étape.
Dans les cimetières, les croix centrales dites hosannières servent aux bénédictions des rameaux et sont souvent ouvragées ; certaines croix funéraires sont réemployées en croix de chemin. Parmi les calvaires ou « croix couvertes » remarquables figurent plusieurs ensembles du Finistère et du Morbihan, comme les calvaires de Saint-Jean-Trolimon, Pleyben, Plougastel-Daoulas, Guimiliau, Saint-Thégonnec ou Plougonven, ainsi que le calvaire du cimetière de Guéhenno. Les croix de chemin jalonnent bourgs, hameaux, villes et routes et symbolisent la foi collective ; des exemples cités vont de Malguénac ou Ténuel en France à des croix situées à El Arenal (Mexique) ou à Jauru (Brésil).
La croix de peste ou antipesteuse se reconnaît à des écots — excroissances en forme de bourgeon — qui symbolisaient les bubons ; on y déposait des offrandes et certains malades se frottaient à la croix en quête de guérison, pratique qui a souvent favorisé la transmission de la maladie. La croix sommitale, généralement simple et en bois ou métal, marque un point culminant ; certaines sont cependant d’un caractère plus monumental et visibles de loin, comme la croix du Nivolet ou des exemples cités à Hollywood, Aizawl ou Mekele.
Sur le plan structurel, une croix monumentale peut comporter un soubassement formant base ou emmarchement, un piédestal monolithe ou appareillé parfois inscrit d’un texte, un support vertical (colonne, pilier, fût) et la croix sommitale nue ou ornementée. On y trouve aussi inscriptions, épigraphes et une variété d’accessoires — pierres des morts, reposoirs, pupitres, bénitiers, porte‑cierges, girouettes, cadrans solaires, blasons — ainsi que les instruments de la Passion sur les croix de la Passion. Les matériaux varient (bois, granite, fonte, fer forgé, ciment depuis le XIXe siècle) : les croix de fer forgé, souvent l’œuvre du forgeron local, relèvent de l’art populaire, tandis que les croix de granit existent sous de multiples types — latine simple, grecque, fleurdelisée, fleuronnée ou pattée — aux formes et ornements divers.