Origine et histoire
Un dolmen est une tombe généralement mégalithique, souvent incluse à l'origine dans un tumulus, formant une chambre sépulcrale destinée à recevoir plusieurs inhumations. Le terme, probablement d'origine bretonne, a été adopté dans de nombreuses langues européennes et désigne aujourd'hui, en archéologie préhistorique, des types d'architecture variés ; face à l'imprécision du mot, on emploie parfois « tombe mégalithique » ou « sépulture mégalithique ». Dolmens et menhirs constituent les deux types de mégalithes les plus fréquents et les plus emblématiques du mégalithisme. On en trouve surtout en Europe de l'Ouest, où ils furent édifiés tout au long du Néolithique, mais des constructions comparables existent aussi en Afrique du Nord, dans la Corne de l'Afrique, au Proche‑Orient et en Extrême‑Orient, parfois à des époques plus récentes.
Le mot apparaît dans la littérature au tournant du XIXe siècle : Théophile‑Malo de La Tour d'Auvergne‑Corret utilisa la forme « dolmin », Pierre Jean‑Baptiste Legrand d'Aussy parla de « dolmine » en 1799, et Jacques Cambry emploie la graphie « dolmen » en 1805, qui s'imposa ensuite en français et dans plusieurs autres langues. Des débats linguistiques ont opposé les partisans d'une étymologie formée de bas‑breton daol « table » et maen « pierre » aux défenseurs d'autres termes bretons authentiques comme lia ou liac'h ; différentes formes (tolmin, toulmin, an dolven, etc.) sont attestées.
Sur le plan architectural, le dolmen se définit comme une chambre sépulcrale ouverte, généralement constituée de grandes dalles brutes et couverte par un tumulus ou un cairn, aujourd'hui souvent disparu par érosion ou récupération. L'architecture varie selon les régions et les époques, de sorte que les dolmens sont classés en familles typologiques dont les appellations et limites font l'objet de débats entre spécialistes. On distingue cependant deux types fondamentaux : les dolmens simples et les dolmens à couloir, chacun déclinant de nombreuses variantes locales.
Les dolmens simples ouvrent directement sur l'extérieur ; la chambre, rectangulaire ou polygonale, est généralement formée de deux à trois orthostates et d'une dalle de chevet, et peut présenter des aménagements locaux tels que des compartimentations par dalle ou muret ou de petits cabinets latéraux. Les dolmens à couloir, parfois appelés tombes à couloir ou dolmens à galerie, sont caractérisés par un passage reliant la chambre à l'extérieur ; ce couloir peut être axial ou non, et sa longueur varie considérablement. Parmi leurs variantes se rencontrent des sépultures en V à chambre trapézoïdale, des dolmens transeptés avec chambres latérales formant une croix de Lorraine, des dolmens coudés, des dolmens à portique de grande taille précédés d'une antichambre, des chambres carrées ou rectangulaires parfois accompagnées d'une antichambre, des systèmes à chambres latérales et les allées couvertes, qui se distinguent par une chambre très allongée.
Le caractère funéraire des dolmens est fondamental : les fouilles scientifiques ont montré la présence d'ossements humains néolithiques, parfois en grandes quantités, faisant de nombreux monuments des ossuaires. Ces sépultures collectives étaient réutilisables et pouvaient recevoir successivement les restes de plusieurs individus sur des périodes parfois très longues ; en sols calcaires on retrouve en moyenne 15 à 25 individus, tandis que certaines allées couvertes ont livré les ossements accumulés de plusieurs centaines de personnes. Les pratiques observées incluent l'entassement ou la superposition des ossements, leur réduction ou évacuation hors de la chambre, ainsi que des cas d'incinération avec dépôts successifs de couches de cendres séparées par des lits de pierres ou d'argile. L'absence de restes humains dans certains dolmens peut résulter de phénomènes taphonomiques, d'érosion, de pillages ou de fouilles anciennes peu méthodiques, et non d'une fonction non funéraire.
Le mobilier associé aux dolmens — objets domestiques ou agricoles, armes, parures, objets rituels, offrandes, éléments en matières périssables — renseigne sur les rituels, les techniques, la richesse et les échanges des sociétés mégalithiques ; dans quelques monuments intacts, il peut être très abondant. En l'absence d'échantillons datables au radiocarbone, la chronologie de construction et d'utilisation des dolmens repose principalement sur l'étude de ce mobilier lithique, céramique ou métallique. Pour la France de l'Ouest et du Centre‑Ouest, les premiers dolmens à couloir apparaissent vers 5 000 av. J.-C., les allées couvertes vers 3 000 av. J.-C., puis ces formes évoluent et laissent place à des constructions moins spectaculaires jusqu'à la Protohistoire.
Sur le plan géographique, on estime à cinquante mille le nombre de dolmens recensés dans le monde, dont vingt mille en Europe, avec de fortes concentrations en Europe de l'Ouest et des présences notables autour de la mer Noire. De nombreuses régions d'Afrique du Nord présentent des nécropoles concentrées pouvant compter des centaines voire des milliers de monuments, principalement sous la forme de grands coffres mégalithiques, et le Proche‑Orient comporte aussi des concentrations analogues. En Asie, des dolmens existent en Inde, en Corée et au Japon à des périodes plus récentes, et l'Indonésie est signalée comme le seul pays où l'on continue encore d'ériger des dolmens dans certaines provinces. Enfin, par extension, on applique parfois le terme « dolmen » à des monuments de morphologie ou d'usage apparentés mais édifiés ailleurs ou à d'autres époques, et certains chercheurs évoquent l'existence hypothétique d'équivalents en bois.