Origine et histoire
Le domaine de Nacqueville, dit aussi château de Fourneville, est une demeure des XVe–XVIe siècles remaniée au XIXe siècle et partiellement inscrite aux monuments historiques ; il se situe dans le Nord‑Cotentin, sur la commune nouvelle de La Hague, à la limite de Querqueville. La seigneurie résulte de la réunion de deux fiefs voisins, Fourneville et des Marets (ou Marais), à l’origine du manoir appelé château de Nacqueville. Aux XIIIe siècle, la famille Carbonnel est seigneur des Marets, puis la seigneurie est échangée ou vendue à Pierre de Saint‑Gilles en 1505. La portion de Fourneville appartient dès 1501 à Jean de Grimouville, qui entreprend la construction sur l’emplacement du manoir actuel. En 1525, Jean VI de Grimouville épouse Renée de Saint‑Gilles et, vraisemblablement dans la seconde moitié du XVIe siècle, Pierre de Grimouville et son épouse Guillemette d’Argouges achèvent le manoir tel qu’il est parvenu jusqu’à nous. En 1610, les fiefs de Fourneville et des Marets sont réunis en une seule seigneurie. Acquis en 1689 par Bernard Mangon des Marest, le château voit son enceinte défensive rasée l’année suivante, à l’exception de la porterie, et un pavillon est ajouté au logis sur la droite. Lors de la guerre de Sept Ans, des troupes anglaises occupent le château en août 1758, à l’occasion de l’attaque et du pillage de Cherbourg, après un débarquement dans l’anse d’Urville avec 12 000 hommes. Pendant la Révolution, en 1794, le propriétaire Jean‑Baptiste Barbout de Querqueville abrite des royalistes cherchant à gagner l’Angleterre ; il est arrêté, présenté devant le conventionnel Le Carpentier et y meurt. En 1826, Hippolyte Clérel de Tocqueville hérite du château par son épouse Émilie Érard de Belisle de Saint‑Rémy et engage des travaux de restauration ; vers 1830 il fait dessiner un parc paysager par un paysagiste anglais. À la mort d’Hippolyte, le manoir est acheté en 1877 par Hildevert Hersent, qui le modernise, le remeuble et améliore le réseau hydrographique du parc. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le château est successivement occupé par des troupes allemandes, notamment issues des jeunesses hitlériennes, puis par un état‑major américain ; en 1945 le parc sert à l’entassement de 60 000 prisonniers et, du 30 juillet à novembre 1945, un programme d’enseignement appelé « Projet Tournesol » est organisé dans la cour sous des tentes pour 632 d’entre eux. En 2018, la propriété appartient à Florence d’Harcourt, arrière‑arrière‑petite‑fille d’Hildevert Hersent. Le château, bâti au XVIe siècle par trois générations de Grimouville, a été transformé au XVIIe siècle et restauré à la fin du XIXe siècle. De l’ancien château médiéval subsiste la porterie, aujourd’hui isolée du corps de logis, encadrée de deux tours rondes coiffées en poivrière et reliée par un long porche charretier surmonté d’une grande fenêtre à meneaux. On lit encore les rainures de l’ancien pont‑levis au‑dessus des anciennes douves, dont une partie reste en eau, et une fenêtre centrale à meneaux porte les armes sculptées du couple de Tocqueville. Le logis Renaissance du XVIe siècle présente un long corps de bâtiment flanqué à gauche d’une tour ronde au toit en poivrière et prolongé à droite par un pavillon ; il est haut d’un étage et éclairé par des fenêtres d’époque surmontées de lucarnes hautes refaites au XIXe siècle dans le style du XVIe. Une inscription gravée sur la façade rappelle le débarquement anglais du 7 août 1758. À l’intérieur subsistent notamment une cheminée Renaissance à double manteau sans hotte soutenue par des consoles et deux pieds‑droits en colonnes engagées ; aux étages, les manteaux sculptés s’inscrivent entre piliers carrés au premier et colonnettes rondes au second. Le parc à l’anglaise, aménagé vers 1830 par un paysagiste anglais pour le comte Hippolyte de Tocqueville, s’étend sur 35 hectares, est traversé par le ruisseau des Castelets et comporte de nombreuses variétés florales, des étangs, cascades et fontaines ainsi que des palmiers, gunneras et autres plantes exotiques. Le domaine comprend par ailleurs un parc plus vaste de 110 hectares qui est classé « site naturel ». Au titre des monuments historiques, la porte et son pont‑levis ainsi que les façades et toitures du château et le parc avec l’ensemble de ses aménagements hydrauliques sont inscrits par arrêté. En juillet 1922, René Le Somptier y tourne le long métrage muet La dame de Monsoreau, dont quelques scènes sont également réalisées au château de Martinvast. Seul le parc est ouvert au public ; le hall d’entrée du château n’est accessible que lors des Journées du patrimoine, où la propriétaire reçoit les visiteurs, et la poterne est également ouverte au public.