Période
XIIe siècle
Patrimoine classé
L'ancien cellier, dit salle de Saint-Gilles ; une partie des vestiges subsistants du cloître (cad. N 1132, 1150 à 1152) : classement par arrêté du 28 décembre 1984 - L’ensemble des vestiges situés sur ou sous les parcelles N 1120 et 1121, 1128 à 1132, 1149 à 1152, 1154, 1156, 1157, 1159 à 1164, 2094, 2095, 2993, avec le sol de l’aire du cloître (cad. N 2994), de la place Emile-Zola à l’exclusion des halles (cad. N 1158), du parvis sur la place de la République, ainsi que le sol de la rue du Vieux-Choeur et d’une partie de la place Ernest-Blanc, ensemble délimité sur le plan annexé à l’arrêté : inscription par arrêté du 17 février 2014 ; L'ensemble des parties bâties et non bâties et des vestiges de l'ancienne abbaye de Saint-Gilles, situés sur et sous les parcelles section N n° 1129 à 1131, 1152, 1154, 1156, 1157, 2094, 2095 et 2993, 2994, ainsi que le sols du parvis de la place de la République, de la rue du Vieux-Choeur, d’une partie de la place Ernest-Blanc et de la place Emile Zola, domaine public non cadastré, à l’exclusion des halles (parcelle n°1158), tels que délimités et hachurés en rouge sur le plan annexé : classement par arrêté du 23 avril 2018 et du 13 juin 2018.
Origine et histoire de l'Abbatiale
L'ancienne abbaye de Saint-Gilles, située dans le Gard, est un centre monastique et de pèlerinage attesté dès le IXe siècle. Elle fut un lieu de dévotion à saint Gilles, une étape sur les chemins de Saint-Jacques et un port d'embarquement sur le Rhône vers Rome et la Terre sainte. La présence d'une communauté est mentionnée en 814 dans un diplôme de Louis le Pieux, et en 879 le pape Jean VIII plaça le monastère sous la dépendance directe du Saint-Siège. Les premières mentions du culte de saint Gilles datent d'environ 925 et sont consignées dans la Vie de saint Gilles, récit monastique qui insiste sur l'inviolabilité du lieu. Aux Xe et XIe siècles, l'abbaye reçut dons et soutiens seigneuriaux et attira des pèlerins, suscitant l'intérêt des comtes de Toulouse. En 1066 la comtesse Almodis et son fils Raymond donnèrent Saint-Gilles à Cluny, geste inscrit dans le contexte de la réforme grégorienne et des interventions pontificales. Cette période se manifesta par la délimitation d'un espace sacré autour de l'abbaye, des confirmations pontificales et la promotion des comtes qui prirent le titre de « comte de Saint-Gilles ». Les comtes raimondins cherchèrent cependant à maintenir leur emprise, ce qui entraîna des affrontements violents au début du XIIe siècle et des interventions pontificales et conciliaires. Vers 1116 les moines démolirent les anciennes églises et entreprirent la reconstruction de l'abbatiale pour mieux accueillir les pèlerins. Aux XIIe et au début du XIIIe siècle, l'abbaye connut son apogée : le pèlerinage attira de grandes foules, le Liber miraculorum renforça sa renommée, et l'institution obtint exemptions, privilèges pontificaux et diplômes royaux. La construction de l'église abbatiale actuelle et de sa façade monumentale fut engagée vers 1160-1170. Parallèlement, l'abbaye développa une seigneurie et un réseau d'intérêts économiques et religieux liés aux échanges des croisades. Après l'assassinat du légat Pierre de Castelnau, un jugement de légats en 1210 confia à l'abbaye l'ensemble des droits comtaux sur la ville et le territoire, et les rapports avec la maison toulousaine furent définitivement réglés en 1226 lorsque la ville se soumit au roi Louis VIII. Du XIVe au XVIIIe siècle l'abbaye subit crises démographiques, guerres, schismes et la commende ; elle fut dévastée en 1562 et connut des tentatives de démolition et d'appropriation. La bulle de Paul III de 1538 institua la sécularisation et transforma l'abbaye en chapitre séculier tout en maintenant la dignité abbatiale. À partir de 1650, des travaux et une restauration furent menés, notamment sous l'impulsion d'abbés commendataires et de la congrégation de Saint-Maur. La Révolution entraîna la vente des biens nationaux en août 1791 ; les bâtiments servirent de caserne et de prison et les moines furent dispersés. L'abbatiale fut classée au titre des monuments historiques en 1840 et des campagnes de fouilles et de restauration se déroulèrent depuis le XIXe siècle, avec des opérations archéologiques entre 1970 et 1982 puis entre 2004 et 2010. Sur le plan architectural, d'imposants vestiges monastiques subsistent au sud de l'église, aujourd'hui enclavés dans des habitations. Autour d'un jardin, sur l'emplacement du cloître, se trouve une salle de trois travées voûtées d'arêtes dont deux travées et leurs murs sont d'origine, la troisième travée ayant une maçonnerie et un couvert modernes ; lui succède une pièce voûtée en berceau. Au nord de la cour, un long mur conservant la trace des arcs s'élève sur six à sept mètres, percé de fenêtres romanes et d'une grande baie à meneau et croisée datée des XVe ou XVIe siècles, et ouvert en son centre pour former un passage vers le jardin. À l'ouest, en contrebas de la cour, une vaste salle — probablement l'ancien réfectoire — forme un vaisseau de trois travées voûtées sur croisées d'ogives et doubleaux ; au sud s'ouvre une porte du XVIIe ou XVIIIe siècle donnant sur une courette. En contrebas de la place de l'église se trouve le cellier médiéval, un bâtiment de trois travées qui communique avec une galerie reprise au XVIIe siècle et la galerie occidentale du cloître ; l'ensemble, voisin de la crypte, remonte au plus tard au début du XIIIe siècle. Divers vestiges du cloître et le cellier ont fait l'objet de protections par arrêtés en 1984, 2014 et 2018. L'abbaye compta de nombreuses dépendances et églises affiliées en France et à l'étranger liées à l'essor du pèlerinage ; des abbés sont attestés du XIe au XIIIe siècle et, à partir de 1472, des abbés commendataires furent nommés par le roi de France.