Origine et histoire de l'Église de la Conception
L'oratoire de l'Immaculée-Conception, dit A Cuncezziò, se situe à Bastia, rue Napoléon dans le quartier de Terra Vechja, près de la place du Marché, et a été classé monument historique en 2000. La confrérie qui l'a fondé remonte à la fin du XVIe siècle et la chapelle a été achevée au début du XVIIe siècle. Le bâtiment, simple rectangle maçonné, conserve dans ses grandes lignes un décor originel daté de 1618 avec une voûte en berceau percée de lunettes et un rythme vertical marqué par des pilastres corinthiens soutenant un riche entablement à modillons. Deux petites chapelles ont été aménagées dans l'épaisseur des murs de la nef en 1701 et 1704, et le portail baroque de la façade a été ajouté en 1704. La façade a ensuite été remaniée et des plaques de marbre de Carrare y ont été posées en 1858-1859. L'oratoire a joué différents rôles au cours de son histoire : il fut église paroissiale du quartier de Terra Vechja entre 1636 et 1666 pendant la reconstruction de Saint-Jean-Baptiste, puis, au XVIIIe siècle, salle de délibérations politiques. En 1795 il servit de parlement du royaume anglo-corse, où un trône fut placé devant l'autel pour symboliser la présence du roi George III, et il a aussi été utilisé comme hôpital militaire. Les décors intérieurs relèvent du style baroque et comptent parmi les plus riches de Bastia, fruits du travail de peintres, sculpteurs, stucateurs, doreurs, marbriers, ébénistes, orfèvres et tapissiers. Les stucs des chapiteaux, corniches et moulures de la voûte datent de 1618-1619 ; ils ont été dorés à la feuille au début du XIXe siècle. Le décor peint de la voûte, de composition soignée et riche en coloris et dorures, date du XVIIe siècle et a été complété en 1855 par une équipe de peintres italiens dirigée par le florentin Bernardo Francesci Sieni. Les murs sont ornés de damas de soie et les pilastres sont recouverts d'un velours de Gênes daté de la fin du XVIe siècle, un usage introduit à Bastia par la tradition génoise dès 1589. Les stalles en noyer sculpté, réalisées à la fin du XVIIIe siècle, sont l'œuvre de plusieurs ébénistes bastiais. Le maître-autel en marbres polychromes date de 1763 ; le retable, daté de 1624, présente des incrustations de marbre polychrome, des colonnes imposantes et trois statues. Un chandelier d'argent en forme de demi-lune (meza luna), réalisé par l'orfèvre siennois Gaetano Macchi vers 1856-1857, figure sur l'autel et n'était utilisé que lors de grandes fêtes. De grands lustres commandés à Gênes éclairent l'oratoire depuis 1864. L'oratoire abrite également une statue polychrome en bois de l'Immaculée Conception, datable du XVIIIe siècle. Le parvis présente une mosaïque de galets représentant le soleil et la lune, selon une tradition régionale d'origine génoise. Parmi les tableaux, on trouve au maître-autel une copie de l'Assomption de Murillo commandée à Léon Olivié, et, derrière l'autel de droite, un Portement de croix anonyme du début du XVIe siècle, l'un des plus anciens tableaux de Bastia. Ce Portement de croix, qui rappelle le Spasimo di Sicilia attribué à Raphaël, pourrait provenir d'une des anciennes églises disparues de la ville ; il a fait l'objet d'une restauration en 2019. L'ensemble témoigne de l'évolution du lieu du XVIIe au XIXe siècle et de l'importance des arts décoratifs dans le patrimoine religieux bastiais.