Origine et histoire de l'Église de la Madeleine
L'église Sainte-Marie‑Madeleine, dite église de la Madeleine, est l'église paroissiale principale du vieux Montargis ; son chevet de la Renaissance, qui fait face à la place Mirabeau, constitue sa véritable façade, tandis que l'entrée principale s'ouvre à l'ouest sur la rue du Cerceau. Bâtie entre le XIIe siècle et la Renaissance, elle a fait l'objet d'agrandissements aux XVe, XVIe et seconde moitié du XVIIe siècle, puis d'une importante restauration engagée à partir de 1860 sous l'impulsion du curé Alfred Chauvet, avec des plans de Viollet‑le‑Duc et la supervision d'Anatole de Baudot pour le beffroi néo‑gothique élevé en 1863. Enserrée dans un tissu urbain dense, l'édifice comprend trois vaisseaux avec chapelles latérales, un transept court à croisillons asymétriques et un vaste chœur traité en église‑halle : vaisseau central, déambulatoire et collatéraux de même hauteur, se terminant par un chevet plat aux angles adoucis. De l'édifice primitif subsistent la base du clocher, ainsi que des piliers et chapiteaux de la nef ; les voûtes de la nef et des chapelles du bas‑côté droit datent des travaux de 1860. Située au centre ancien, l'église est bordée au nord par la rue de Triqueti et au sud par la rue du Général‑Leclerc qui conduit à la colline du château.
La construction d'une chapelle débutée en 1183 marque les origines du site ; l'édifice est agrandi au début du XIIIe siècle par une nef et un chœur élargi, puis devient église paroissiale en 1377, moment où lui sont ajoutés chœur et transept. En juillet 1525 une partie de la ville, dont l'église, est incendiée ; le roi apporte une aide dès 1526 pour une reconstruction qui va durer près d'un siècle, interrompue par les troubles des guerres de Religion (1562‑1567) et les pillages huguenots. Les voûtements des chapelles et la reconstruction du chœur selon le modèle de l'église‑halle se poursuivent aux XVIe et XVIIe siècles, avec des étapes datées dans les sources (voûte d'une chapelle en 1545, voûtes du flanc gauche en 1571‑1572, marché de construction signé en 1574, achèvement du chœur au début du XVIIe siècle). Après des modifications limitées aux XVIIe et XVIIIe siècles et la reconstruction du clocher en 1656, l'édifice est transformé pendant le XIXe siècle par la mise en place de voûtes en briques, la surélévation du clocher et l'installation de nouvelles cloches fondues par Dormoy. La sacristie et le portail du transept nord datent de 1898 ; des restaurations récentes ont concerné le crépi des deux premières travées (1968‑1969) et la remise en état de la chapelle Sainte‑Monique et de la chapelle Saint‑Vincent (2010‑2013).
Le chœur est la partie la plus remarquable : traité en église‑halle, il montre des vaisseaux très élancés de même hauteur, évoquant certaines églises gothiques tardives d'Italie et d'Allemagne. Le déambulatoire conserve des décors peints fragmentaires — quadrilobe avec tête de bœuf et griffes d'aigle — et trois parois ornées d'un motif de pélican ; la chapelle Saint‑Vincent et la chapelle Sainte‑Monique ont été restaurées entre 2010 et 2013. La nef, dont la datation se situe entre la fin du XIIe et le début du XIIIe siècle, présente une élévation à deux niveaux avec arcades en arc brisé sur piles composées et fenêtres hautes ; l'ensemble est couvert de voûtes d'ogives quadripartites.
Le mobilier de l'église comprend de nombreux éléments classés et inscrits au titre des monuments historiques : credence en bois sculpté et marbre de style Louis XVI, stalles et prie‑dieu du XVIe siècle, panneaux et dossiers sculptés, banc d'œuvre avec Noli me tangere, confessionnal du XVIe siècle, chaire à prêcher de style Louis XIV, crucifix du XVIIe siècle, calice en argent doré réalisé par l'orfèvre Séverin Parisy, plusieurs statues en pierre ou bois doré du XIVe au XVIIIe siècle (certains éléments ayant été dérobés), un haut‑relief de la Cène du XVIe siècle, et plusieurs tableaux datés des XVIe et XVIIe siècles dont une Sainte‑Madeleine attribuée à l'école des Carrache. S'y ajoutent des objets inscrits tels que châsses‑reliquaires, tabernacle, lustres, un grand ensemble de stalles du XVIIIe siècle et le tableau monumental Le concert des Anges (1807) d'Ange René Ravault.
L'ensemble des vitraux de l'église compte 42 verrières visibles, dont 34 proviennent de l'atelier Lobin (Julien‑Léopold et/ou Lucien‑Léopold) posées entre 1859 et 1873, formant un ensemble de grande unité chromatique. Parmi ces vitraux se trouve l'unique scène en France représentant des Japonais convertis, rappelant l'évangélisation japonaise par saint François‑Xavier, ce qui attire encore des visiteurs japonais ; d'autres verrières évoquent des épisodes locaux, armoiries de familles donatrices et faits d'histoire régionale, tandis que le vitrail de la Cène a bénéficié d'une restauration en 1995. Un vitrail illustre aussi la célèbre scène du chien de Montargis aux côtés de la représentation de Marie‑Madeleine en prière.
L'orgue connaît une histoire documentée depuis un accord de 1600 ; il est réparé et modifié à plusieurs reprises aux XVIIIe et XIXe siècles, transféré sur sa tribune actuelle en 1778 et profondément remanié par divers facteurs jusqu'à l'installation, en 1883, d'un instrument de 12 jeux proposé par Cavaillé‑Coll. Une reconstruction importante, signée en 1968 avec le facteur Haerfer‑Erman, a doté l'orgue de 24 jeux sur deux claviers et pédalier ; il a été inauguré en 1969 et reste l'objet d'un entretien courant, bien que des problèmes d'étanchéité et d'empoussièrement affectent encore son fonctionnement.
Le clocher, de type kreisker en position latérale, a été sensiblement exhaussé au XIXe siècle et son beffroi, de style néo‑gothique, remonte à 1863 ; les cloches signées Dormoy ont été installées dans cette période. À l'exception de la tour‑clocher, l'église a été classée monument historique en 1909 ; la tour‑clocher a fait l'objet d'une procédure d'inscription et de reclassement à la fin du XXe siècle.