Origine et histoire de l'Église de la Madeleine
L'église de la Madeleine, située à l'angle de la rue Charles-de-Gaulle et de la rue de la Madeleine à Troyes (Aube), est une église catholique réputée pour la qualité de son patrimoine vitré et pour son jubé de pierre. Considérée comme la plus ancienne de la ville, elle relève de l'architecture gothique : la nef date du XIIIe siècle, le chœur et l'abside ont été reconstruits au XVIe siècle et la tour au XVIIe siècle. L'édifice est classé au titre des monuments historiques par la liste de 1840 ; la porte de l'ancien cimetière, datée du XVIe siècle, est inscrite depuis 1926.
Les verrières ornent plusieurs chapelles : la chapelle Saint-Louis, fondée par Simon Liboron, contient une vie du saint ; la chapelle centrale du chevet, ancienne chapelle de la Vierge et des orfèvres, présente une vie de saint Éloi, un arbre de Jessé et des épisodes de l'Ancien Testament ; la chapelle Notre-Dame, au sud, conserve une Passion attribuée à Nicolas le Muet et à sa femme Catherine Boucherat, une histoire de Madeleine offerte par les chaussetiers de Troyes en 1506 et un triomphe de la Croix portant le blason de la famille Tartier. D'autres verrières figurent des scènes comme le Jugement dernier, la vie de Madeleine, la Création avec Adam et Ève et un calvaire.
La décoration intérieure comprend trente-six bancs de fidèles datés du XVIIIe siècle et deux fonts baptismaux en marbre, l'un polyédral aux veines noires et brunes, l'autre en marbre noir portant l'inscription latine SPIRITUS DOMINI FEREBATUR SUPER AQUAS Gens, ainsi que plusieurs dalles funéraires (Margueron, Devienne, Kathelyne Lellygny et Franquelance). Le chœur est orné de lambris de chêne dorés, datés de la fin du XVIIIe ou du début du XIXe siècle ; le troisième pilier nord présente une guirlande et un trophée d'instruments de la Passion et des attributs de saint Pierre. L'autel, entouré de deux piliers décorés et pourvu d'une voûte et de stalles, est réalisé en trois marbres — blanc veiné de gris, noir veiné de blanc et brun rouge veiné de blanc — de la même époque que les lambris, et le mobilier comprend un fauteuil de célébrant et quatre tabourets d'époque Louis XVI.
Parmi les statues se trouvent une Vierge à l'Enfant, une représentation de saint Michel terrassant le dragon, un saint Étienne en bois, un saint Sébastien par Marc Bachot, une sainte Marthe attribuée au Maître de Chaource (XVIe siècle) et une sculpture en bois polychrome de Robert de Molesme. Les peintures comprennent une composition monumentale très abîmée du XVe siècle dans la première chapelle nord, un cycle de sept tableaux sur la vie de Madeleine et une Sainte Famille par Jean Nicot (XVIIe siècle), des œuvres de Jacques de Létin évoquant notamment saint Augustin, une toile "Christ et un capucin" et une scène anonyme du XVIe siècle représentant Pierre pleurant son reniement.
Le jubé de pierre, l'une des rares tribunes de ce type conservées, est un exemple marquant du gothique flamboyant par son ornementation foisonnante et l'audace de sa conception ; il est principalement réalisé en pierre de Tonnerre par le maître-maçon Jean Gailde entre 1508 et 1517, qui fut inhumé sous le jubé en 1519. Les panneaux de la tribune sont sculptés de feuillages et de choux frisés ; trois petites scènes en haut-relief, encadrées de quadrilobes et dues au maçon Nicolas Halins (1513), représentent le Christ prêchant entouré d'auditeurs. L'arc suspendu au-dessus du chœur forme une seule volée découpée en trois arcades séparées par des clefs pendantes ; les extrémités sont bloquées par de grosses masses sculptées portant les monogrammes IHS et AM et des blasons aux instruments de la Passion. Sur la face côté chœur, trois écus sont sculptés par Simon Mauroy (1515-1516) : l'écu central porte les initiales S M de sainte Madeleine, les deux autres portent les armes de France couronnées. Au-dessus de la corniche de feuillages se développe une balustrade à mouchettes et fleurs de lys couronnées, terminée par une main courante ornée de tiges à feuilles épineuses. Le monument a bénéficié d'une forte implication populaire, par des quêtes et la participation des paroissiens à la pose des pierres.
L'orgue actuel, œuvre de Charles et Frédéric Rollin, date de 1901 ; sa partie instrumentale est inscrite au titre des objets.