Origine et histoire de l'Église de la Major
L'église Notre‑Dame‑la‑Major d'Arles, ancienne collégiale romano‑gothique, domine la ville depuis l'extrémité nord de la colline de l'Hauture, entre le boulevard Émile Combes et les arènes. L'édifice primitif, dédié à Sainte‑Marie‑Majeure et élevé sur le site d'un ancien temple romain dédié à la « Bonne Déesse », aurait été consacré en 452, comme l'indiquait une inscription aujourd'hui disparue, et a accueilli un concile en 554. Sur ce même emplacement, une église romane provençale fut entreprise à partir de 1152, dont subsistent les trois travées de la nef. Érigée en collégiale au XVIe siècle, elle a connu d'importantes campagnes de reconstruction et d'embellissement, notamment la refonte complète du chœur et de l'abside, la reconstruction du clocher en 1579 et l'ajout de la Vierge à l'Enfant en 1867 ; les chapelles latérales et la façade ont aussi été remaniées aux XVIe et XVIIe siècles. Paroisse importante, elle abritait une relique de la mandibule de saint Marc, offerte par Venise, et couvrait la vaste Crau d'Arles, ce qui explique son rôle comme siège de confréries locales. Rattachée à Saint‑Julien pendant la Révolution, fermée puis rouverte après le Concordat, l'église fut endommagée par des bombardements en 1944 et a nécessité d'importants travaux de consolidation entre 1980 et 1988. Après avoir accueilli la confrérie de Saint‑Véran, elle est aujourd'hui le siège de la confrérie des gardians de Saint‑Georges, qui y viennent chaque 1er mai pour faire bénir leurs chevaux. L'édifice a été inscrit au titre des monuments historiques dans les années 1930 puis classé en 1945.
Architecturalement, la nef romane comprend trois travées voûtées en berceau légèrement brisé, soutenues par des piliers massifs, tandis que le chevet gothique comprend une travée de chœur voûtée d'ogives et une abside pentagonale de même hauteur et largeur que la nef. L'ancienne abside romane, semi‑circulaire, était ornée de colonnettes en basalte et porphyre issues du temple antique; huit de ces colonnettes furent offertes à Catherine de Médicis et perdues lors de leur transport, tandis que deux subsistent à l'ancienne cathédrale Saint‑Trophime. La façade sobre, refaite au début du XVIIe siècle dans un style Louis XIII, conserve une porte reconstruite au milieu du XVIIe siècle par Louis Ferran. Le clocher, de plan carré surmonté d'une pyramide, reçoit en 1867 une Vierge à l'Enfant d'après un dessin d'E. Lassale exécutée par B. Cusson; ses cloches et son horloge ont fait l'objet de remplacements et d'aménagements aux XIXe et XXe siècles, et l'une des cloches anciennes a été refondue puis remise en place au début des années 1940.
L'intérieur présente une riche accumulation d'œuvres et d'éléments mobiliers répartis entre collatéraux, nef et chœur. Dans le collatéral nord, la chapelle Saint‑Martin conserve une croix de mission sauvée en 1901, des fonts baptismaux en marbre vert, un tableau anonyme du XVIIe siècle représentant l'Apparition de la Vierge à sainte Rose de Lima (protégé) ainsi que plusieurs tableaux du XVIIe siècle sur les miracles de saint Antoine provenant de l'ancien couvent des Franciscains, et une statue polychrome de saint Jean‑Baptiste par Cournaud. La chapelle Saint‑Véran, dont le mobilier primitif a disparu, abrite aujourd'hui une statue de saint Roch. La chapelle du Sacré‑Cœur contient une statue en marbre du XIXe siècle dessinée par Overbeck et sculptée par Hauffman, ainsi que deux autres tableaux sur saint Antoine, tandis que la chapelle du Purgatoire présente un grand crucifix et un tableau de Carpenel de 1742 représentant la Vierge présentant l'Enfant à saint Blaise et saint Jean, œuvre intéressante par son unicité.
Dans la nef, l'autel de Notre‑Dame‑la‑Major entoure une niche où se trouvait autrefois un buste en argent de la Vierge fondu à la Révolution ; il abrite aujourd'hui une statue‑reliquaire de Charles Borromée et a été restauré en 2012. L'autel de Notre‑Dame de Pitié, en marbre polychrome, porte une toile de la Déploration du Christ et les armes de Louis d'Aube de Roquemartine, tableau inscrit parmi les objets protégés. La chaire en marbre polychrome du XVIIIe siècle, sculptée par Emmanuel Carvalho, complète l'ameublement liturgique et succède à un prédécesseur dont subsistent l'escalier et une porte en pierre de style maniériste due au maître‑maçon Pierre Piau.
Dans le collatéral sud, la chapelle dédiée à la Vierge, ancienne chapelle Saint‑Marc, conserve la clé de voûte figurant saint Marc et le lion ailé de Venise; elle abrite un autel néoclassique en marbre et une Vierge à l'Enfant en marbre du XIXe siècle de Raffaelle Monti, ainsi qu'un tableau du peintre François Huard consacré à l'Instauration du Rosaire, protégé au titre des objets. La chapelle Saint‑Joseph, auparavant dédiée à saint Charles‑Borromée, présente deux statues peintes de saint Joseph et de Jeanne d'Arc. L'espace de la confrérie des gardians expose une niche grillagée en forme de trident camarguais et une statue polychrome de saint Georges, inscrite parmi les objets protégés. Le maître‑autel en bois doré provient de l'ancienne église Saint‑Blaise; son retable, conçu pour recevoir une toile de Carpenel, fait actuellement l'objet d'une restauration et la peinture est provisoirement déposée.
Le chœur conserve l'ancien banc d'œuvre de la confrérie de Saint‑Véran, réemplois de panneaux plus anciens et inscrit parmi les objets protégés, ainsi qu'un maître‑autel en marbre polychrome dû à Emmanuel Carvalho. Les lambris, stalles et sellettes en noyer, réalisés en 1716 par des artisans arlésiens et inscrits, surmontent un retable qui réunit trois tableaux du XVIIIe siècle de l'atelier Parrocel, deux reliquaires en bois doré du XIXe siècle et plusieurs statues en bois. L'église a autrefois conservé deux reliques de saint Césaire désormais transférées au musée départemental de l'Arles antique.
L'orgue, installé à l'origine sur une tribune en pierre à la fin du XVIIe siècle, a fait l'objet de reconstructions au XVIIIe et au XXe siècle et se trouve aujourd'hui muet et en mauvais état depuis 1980. La tribune, finement sculptée, porte au centre le blason du chapitre et des écoinçons ornés d'angelots. Ces éléments, tout comme de nombreux tableaux, sculptures et ornements, bénéficient d'un statut de protection au titre des monuments historiques.