Origine et histoire de l'Église Notre-Dame-des-Blancs-Manteaux
L'église Notre-Dame-des-Blancs-Manteaux, située au 12 rue des Blancs-Manteaux dans le 4e arrondissement de Paris, est dédiée à la Vierge depuis 1258, date de l'installation des « Serviteurs de la Sainte Vierge » à la demande de Pierre Luillier et de son épouse Mahaut Boucher d'Orsay, et de la construction de la première église orientée est-ouest le long de la rue. Elle est aujourd'hui desservie par des prêtres de la communauté Saint-Martin. L'ordre des Serviteurs de la Sainte Vierge, approuvé en 1257 par Saint Louis et l'évêque Renaud III Mignon de Corbeil avec l'autorisation de Robert Ier de Clairbec, était surnommé « Blancs-Manteaux » en raison de son habit noir et de son manteau blanc. En 1274, le deuxième concile de Lyon supprima cet ordre et quatre frères rejoignirent l'ordre de Saint-Guillaume, dit des Guillemites, à l'origine du nom de la rue des Guillemites voisine. Le monastère comprenait de vastes bâtiments, une chapelle et des jardins ; au XVIIe siècle il abrita des bénédictins et la chapelle longeait alors la rue des Blancs-Manteaux. C'est dans cette église que fut déposé en 1407 le corps du duc Louis Ier d'Orléans après son assassinat, et en 1618 le cardinal de Retz ferma le monastère pour cause de « grand désordre ». L'église actuelle a été reconstruite perpendiculairement à la rue entre 1685 et 1690, sous le priorat d'Antoine de Machy selon les plans de Charles Duval, avec un nouveau couvent. Les religieux furent chassés pendant la Révolution et les bâtiments vendus comme biens nationaux ; une partie fut annexée par le mont-de-piété. Rachetée par la Ville de Paris, l'église fut rendue au culte par le concordat de 1801 et devint église paroissiale en 1807. La façade sud provient de l'église Saint-Éloi-des-Barnabites et fut remontée par Victor Baltard en 1863 ; cette façade avait été construite en 1705 par Cartaud, et Baltard ajouta une travée à la nef et un tambour d'entrée qui soutient la tribune de l'orgue, enrichie de boiseries du XVIIe siècle provenant de l'abbaye Saint-Victor. L'ancienne fontaine du monastère, datée de 1719, a été remontée contre le mur est de l'église en 1929. L'église, sa crypte et les vestiges du monastère font l'objet d'un classement au titre des monuments historiques depuis le 14 novembre 1983. De plan basilical sans transept, l'édifice est orienté nord-sud avec le chevet au nord ; son côté oriental est bordé par le square Charles-Victor-Langlois et l'entrée principale se trouve au sud rue des Blancs-Manteaux, l'entrée secondaire au nord au 53 rue des Francs-Bourgeois. À l'intérieur, la nef blanche et épurée est éclairée par de grandes fenêtres percées dans la voûte en berceau ; les arcs, rythmés par des pilastres corinthiens, relient la nef aux bas-côtés qui faisaient autrefois le tour du chœur, et des médaillons surtout consacrés aux apôtres ornent ces élévations. Sur l'entablement sous la fenêtre centrale apparaît l'inscription mn’ [Yahve] dans un triangle, et dix-neuf bas-reliefs répartis en vis-à-vis mettent en relation l'Ancien et le Nouveau Testament ; ces bas-reliefs sont séparés par des monogrammes de saints liés à l'histoire du lieu, tels que AM, SB ou SM. Dans l'axe de la nef, au-dessus de l'autel, une Vierge émergeant d'une nuée et écrasant un serpent forme la Gloire entourant l'Esprit saint : cette sculpture en argile peinte est l'œuvre de Jean-Julien Hérault datée de 1831, qui réalisa aussi les statues des quatre Évangélistes adossées aux boiseries provenant de l'abbaye Saint-Victor, tandis que Saint Louis et saint Guillaume de Malavalle se font face à l'entrée du chœur. Après les pillages de la Révolution, le clergé entreprit en 1802 de restaurer le décor et le mobilier liturgique en installant stalles, chaire, table de communion et en acquérant des œuvres d'art. Dans le bas-côté droit, sous des vitraux de Raphaël Lardeur créés en 1946 racontant l'histoire de l'église, se trouve une Vierge à l'Enfant en pierre de style champenois du XIVe siècle encadrée par deux tableaux du XVIIe siècle ; dans le bas-côté gauche la chapelle du baptistère présente une Sainte Famille et le Baptême de Jésus par Paul Jourdy, et vers l'orgue de chœur on remarque une toile de Jean Henry Marlet représentant Marie-Madeleine essuyant les pieds de Jésus. Les vitraux de Raphaël Lardeur datés de 1946 illustrent notamment la fondation du couvent par Saint Louis, la reprise par les Guillemites, la pose de la première pierre de la seconde église par le chancelier Le Tellier en 1685, ainsi que la fondation du couvent des Carmélites du faubourg Saint-Jacques par le cardinal de Bérulle et Barbe Acarie. La chaire, d'origine bavaroise et datée de 1749, fut acquise en 1864 et restaurée aux frais de la Fabrique ; son abat-voix porte une statue de saint Michel terrassant Lucifer entourée des quatre Évangélistes, tandis que la cuve, l'escalier et les panneaux de marqueterie illustrent des scènes bibliques accompagnées d'inscriptions. À droite en entrant, la chapelle Sainte Geneviève conserve La Mort de sainte Anne de Joachim von Sandrart (1640) et plusieurs grands tableaux de Ferdinand Elle représentant des épisodes de l'Ancien Testament ; un atelier dirigé par l'artiste Cédric Bregnard en janvier 2020 a conduit à la création de toiles qui, deux d'entre elles représentant sainte Geneviève, ont été accrochées en 2023 après restauration par le Conservatoire des œuvres d’art religieuses et civiles de la Ville de Paris. Parmi les autres œuvres figurent une toile acquise par la Ville de Paris en 1873, Laissez venir à moi les petits enfants de Charles-Henri Michel, et une Multiplication des pains de Claude Audran II (1683) située dans le bas-côté droit en face de la statue de saint Antoine de Padoue. On remarque également deux bénitiers en marbre du XVIIe siècle, un groupe en plâtre représentant la Vierge surmontant le globe du Monde derrière l'autel, ainsi que plusieurs statues et bustes. L'orgue de tribune, installé en 1863 sur la tribune réalisée par Varcollier, fut endommagé en 1944 par l'explosion d'une bombe avec les vitraux ; restauré par Kern entre 1962 et 1964, il fut inauguré par Xavier Darasse le 25 juin 1968. Une association des Grandes-Orgues existe depuis 1991 pour soutenir la vie musicale de la paroisse, et l'église possède en outre un orgue d'accompagnement placé dans la partie gauche du chœur. Enfin, parmi les personnes inhumées dans le couvent figurent diverses personnalités et membres de familles nobles citées dans les épitaphes et inscriptions, notamment Christophe de Marle, Denis de Soulfour, Catherine et Charlotte de Bourbon, François d'O, Jean Hurault, Jeanne Briçonnet et plusieurs membres des familles Allegrain, Gamin et Le Picart.