Origine et histoire de l'Église Saint-Agnan
L'église Saint-Aignan d'Arthies, située au cœur du Vexin français, est une église catholique paroissiale et l'une des plus anciennes églises romanes de la région. Son clocher en bâtière, daté de la seconde moitié du XIe siècle, présente une base percée d'arcades en plein cintre retombant sur de lourds chapiteaux à sculpture archaïque d'influence normande, et un étage de beffroi ajouré de baies géminées très étroites, cantonnées de colonnes monolithiques aux chapiteaux criblés de trous et surmontées de linteaux monolithiques sculptés de dents de scie. La nef, également d'origine romane, conserve quelques fenêtres primitives et a été profondément modifiée lors du voûtement d'ogives réalisé au cours du XVIe siècle ; des voûtes de la Renaissance masquent une charpente en carène renversée du XVe siècle conçue pour être lambrissée. Le petit chœur rectangulaire, plaqué contre la base du clocher, n'est pas d'origine mais conserve deux formerets et colonnettes à chapiteaux du second quart du XIIe siècle. Deux grandes chapelles latérales de longueurs inégales forment avec le chœur un chevet plat ; elles datent du premier tiers du XVIe siècle, la chapelle nord ayant été remaniée à la fin du XVIe siècle et la chapelle sud remaniée ou agrandie en 1605. La chapelle nord communique par un arc-doubleau oblique avec la troisième travée de la nef ; la chapelle sud s'ouvre sur la nef par un passage dit berrichon. L'édifice est inscrit aux monuments historiques par arrêté du 4 juin 1926 ; il a fait l'objet de restaurations au XIXe siècle grâce au legs de l'abbé Bernay et de nouvelles campagnes depuis les années 1980, et il dépend aujourd'hui de la paroisse de Magny-en-Vexin où les messes dominicales sont célébrées de façon irrégulière.
Implantée au centre du village, au croisement de la rue de la Mairie et de la rue de l'Église près de la RD 983, l'église n'est pas alignée sur la voirie; son petit parvis occidental, qui donne accès à l'unique portail, se trouve à l'étroit entre la nef et une maison particulière. Le pourtour sud de l'édifice est bordé d'habitations mais il reste possible d'en faire le tour ; l'élévation méridionale du chœur et le chevet donnent sur une grande pelouse arborée correspondant à l'ancien cimetière déplacé en 1879.
L'histoire du site est ancienne : l'église s'élève près d'un cimetière mérovingien attesté par des sarcophages et des objets funéraires, et des découvertes de sépultures carolingiennes près du chevet montrent qu'un lieu de culte antérieur a existé à cet emplacement. Sous l'Ancien Régime, la paroisse relevait du doyenné de Magny-en-Vexin et de l'archidiocèse de Rouen et la cure était sous la collature de l'archevêque de Rouen ; l'église est placée sous le vocable de saint Aignan d'Orléans. Les parties les plus anciennes conservées sont la base du clocher et la nef, bien que la datation précise de certains éléments fasse l'objet d'interprétations divergentes parmi les auteurs. Des remaniements et reprises structurelles sont documentés aux XVIe et XVIIe siècles, avec des interventions attestées pour la construction et le paiement des chapelles, le renforcement des maçonneries, la reconstruction d'autels et divers travaux de couverture et d'ouverture de baies entre les XVIe et XVIIIe siècles. Au XIXe siècle et au début du XXe siècle des travaux et aménagements sont encore réalisés, le portail latéral sud datant de 1893, avant l'inscription comme monument historique en 1926.
Le plan de l'église, orienté de façon légèrement déviée vers le sud-est, est dissymétrique : une large nef unique de trois travées, la base du clocher, un chœur rectangulaire et deux collatéraux inégaux au nord et au sud formant un chevet plat ; la longueur intérieure totale est d'environ 31 mètres. La base du clocher est voûtée d'arêtes tandis que les autres travées sont couvertes d'ogives ; la nef et la chapelle nord partagent une toiture à deux pans tandis que la chapelle sud a une toiture perpendiculaire. Les proportions de la nef — grande largeur du vaisseau central et faiblesse de l'espace entre piliers — renvoient au plan roman primitif typique du Vexin.
À l'intérieur, outre les vestiges romans visibles dans la nef et la base du clocher, les voûtements et les clés de la Renaissance témoignent des campagnes de la fin du Moyen Âge et de l'époque moderne ; des formerets et chapiteaux romans subsistent dans le chœur, dont certains étaient autrefois masqués sous un enduit et ont été révélés lors des restaurations récentes. La charpente en carène renversée du XVe siècle, prévue pour un lambris jamais posé, illustre un changement de projet au profit du voûtement d'ogives. Les décors des embrasures romanes encore lisibles conservent une polychromie architecturale médiévale à base d'ocre et de motifs cruciformes.
À l'extérieur, l'édifice est construit en pierre calcaire locale, taillée pour les éléments architecturaux et en moellon pour les remplois, avec des enduits localement simulant un appareil régulier. La façade occidentale a été remaniée à l'époque moderne et le clocher conserve son appareil roman singulier : linteaux et colonnettes monolithiques aux chapiteaux troués, compositions et proportions peu communes dans le pays, et la couverture en bâtière qui caractérise l'élévation. Les parties orientales montrent des reprises successives, des contreforts obliques et des remplages Renaissance ou flamboyants correspondant aux diverses campagnes de la fin du Moyen Âge et de l'époque moderne.
Le mobilier comporte des éléments remarquables : les fonts baptismaux du XIIe siècle, classés monument historique au titre d'objet, présentent une cuve oblongue ornée de deux frises sculptées et mesurent près de 95 × 85 × 55 cm ; d'autres pièces datées par les archives comprennent une petite cloche de 1641 à inscription latine, deux statues anciennes, une chaire à prêcher et deux stalles des premières décennies du XVIIe siècle offertes par le curé Gaston Le Bas, une clôture de chœur de style Renaissance, un maître-autel d'époque Louis XIV, un tabernacle en bois partiellement doré et un grand tableau de saint Aignan acquis en 1787 et retaillé en 1855. Plusieurs plaques funéraires et de fondation, notamment celle de Jacques Falaize et Guillemette Binet (inscription liée à 1587 mais signée en 1627) et celle du curé Charles Lamette, complètent l'ensemble mobilier documenté par les archives de la fabrique.