Origine et histoire de l'Église Saint-Agnan
L’église Saint-Aignan, située à Chartres, porte le nom d’Aignan d’Orléans et s’appuie sur l’emplacement d’une église pré-romane antérieure. L’édifice actuel remonte au début du XVIe siècle; son portail principal, vestige gothique, date du XIVe siècle et la crypte est datée de la fin du XVe siècle. La tradition fait de l’église le lieu d’inhumation du saint et rappelle qu’elle fut la paroisse des comtes de Blois et de Chartres. Implantée entre l’ancien château des comtes et le rempart reconstruit au IXe siècle, elle a subi des incendies aux XIIe siècle et en 1262 avant d’être reconstruite puis transformée. La terrasse sud recouvre l’ancien cimetière et le chevet s’étend sur le haut du rempart devenu inutile. L’édifice est classé au titre des monuments historiques depuis 1840.
La construction présente des éléments gothiques et des détails de la première Renaissance : colonnettes d’inspiration antique, profils de piliers et décors de tympans flamboyants. Le petit portail nord porte la date de 1541; l’architecte est peut‑être le même que celui de l’église Sainte‑Foy, dont une voûte projetée pour la nef fut finalement abandonnée. La tourelle située à gauche appartient aux XVIe–XVIIe siècles et est reliée à l’édifice par un arc‑boutant muni d’un escalier daté du projet de 1541; les culées prévues pour d’autres arcs‑boutants restent visibles sans emploi. La galerie du second étage a été élevée en 1625 sous Louis XIII; la nef est couverte d’un bardeau de bois et les bas‑côtés conservent un triforium.
Déclarée bien national à la Révolution, l’église fut convertie en hôpital militaire, servit de prison puis fut vendue et utilisée comme magasin de fourrage, ce qui contribua à la préserver; elle a été rendue au culte en 1822. En 1869 la peinture intérieure en fresques polychromes a été confiée à Émile Boeswillwald, collaborateur d’Eugène Viollet‑le‑Duc. Depuis 1988 divers instruments de surveillance — convergencemètres à fil, fissuromètre, jauge Saugnac G1, témoin à lame de verre — évaluent les déformations structurelles pour assurer la sécurité et la conservation. En juillet 2024 l’accès public au déambulatoire a été interdit pour risque de chute de pierres et la chapelle axiale dédiée à la Vierge est devenue inaccessible.
L’intérieur comprend de nombreuses chapelles latérales et un ensemble remarquable de vitraux. La chapelle axiale est dédiée à la Vierge et encadrée par deux verrières de 1857 réalisées par la Fabrique du carmel du Mans. Sur le mur nord se succèdent la chapelle des fonts (baie n°15) avec un vitrail en fragments « macédoine » classé MH, l’ancienne chapelle Saint‑Étienne (baie n°13, fragments de 1566 portant l’inscription du donateur Jean Vacher, classée MH) et l’ancienne chapelle Sainte‑Anne (baie n°7, lancettes refaites par les ateliers Lorin en 1893, classée MH). Sur le mur sud, la chapelle du Sacré‑Cœur conserve une Crucifixion de Jean Villette (1949, baie n°8), la chapelle Saint‑Michel présente une voûte Renaissance et trois vitraux de 1547 représentant le combat de l’archange Saint‑Michel contre Lucifer avec les armes de la famille Chaline (baie n°12, classée MH), la chapelle Givès et Bouvart compte trois vitraux dont la baie n°14 porte les armes d’Harcourt (classée MH), la chapelle Saint‑Joseph contient un vitrail des ateliers Lorin vers 1865 (baie n°16), et la chapelle Saint‑Roch et Saint‑Christophe conserve un vitrail de la Passion de 1543 montrant Simon de Cyrène aidant Jésus à porter la croix, avec les armes de la famille Godeffroy (baie n°18, classée MH). La chapelle ouvrant sur l’ancien cimetière possède une porte murée, des clés de voûte en forme de crâne et, dans le tympan, un Crucifiement de saint Pierre du XVIIe siècle tandis que les lancettes furent reprises par les ateliers Lorin en 1894 (baie n°20, classée MH).
L’église présente au total un ensemble de vingt verrières classées comme objets aux monuments historiques, dont des vitraux du XVIe siècle en partie détériorés lors du siège de Chartres en 1568. Huit verrières figurées ornent les fenêtres basses du chœur et de la nef (baies 7, 9, 11 à 15, 18), les onze fenêtres hautes du chœur correspondent aux baies 100 à 110, et le tympan du Martyre de saint Pierre se trouve en baie 20; la rose de la façade ouest, dite « Jésus soleil de justice », date du début du XVIIe siècle. Parmi les verrières plus récentes, les ateliers Lorin et la Fabrique du carmel du Mans ont réalisé plusieurs baies finales : on peut citer la baie 3 (Daniel dans la fosse aux lions, 1888), la baie 5 (Adam et Ève chassés du Paradis, 1887) et la baie 4 (scènes de la vie du Christ, Baptême de Jésus).
Le mobilier comporte des peintures et tableaux dont six sont classés monuments historiques, notamment Le Baptême du Christ (huile sur toile, quatrième quart du XVIIe siècle), Le Repos en Égypte ou La Vierge à la source (huile, école italienne, XVIe siècle), La Sainte Famille (huile, quatrième quart du XVIe siècle), Le Christ au jardin des Oliviers (huile, école française, XVIe siècle), Le Portement de croix (XVIIe siècle, œuvre réputée disparue) et Le Christ devant Pilate de Claude Vignon (1630), ce dernier ayant été déplacé au musée des Beaux‑Arts de Chartres. Les fresques polychromes du XIXe siècle couvrent la nef, le chœur, la voûte et le mur du portail ouest et confèrent à l’édifice son caractère distinctif.
L’orgue construit par Joseph Merklin à la fin du XIXe siècle a été électrifié en 1969 par la maison Danion‑Gonzalez, qui a modifié la composition en ajoutant des mixtures et des mutations; l’instrument comporte une pédale de 30 notes et deux claviers de 56 notes avec jeux de fonds, flûtes et registres de trompette et de voix humaine. L’église Saint‑Aignan dépend de la paroisse Notre‑Dame, Chartres ville, rattachée au doyenné de Chartres; elle est desservie depuis 2008 par la Fraternité sacerdotale Saint‑Pierre et la messe y est célébrée six jours par semaine selon la forme extraordinaire du rite romain.