Origine et histoire de l'Église Saint-Ambroise
L'église Saint‑Ambroise, située dans le 11e arrondissement de Paris et dédiée à saint Ambroise, a donné son nom au quartier et est desservie par la station de métro Saint‑Ambroise. Une première chapelle fut édifiée en 1659 par les religieuses du couvent des Annonciades de Popincourt, installées rue Popincourt depuis 1636. Les religieuses quittèrent le couvent en 1782 et la chapelle, devenue bien national, fut vendue le 21 mai 1797. Elle devint succursale de la paroisse Sainte‑Marguerite en 1802, puis fut rachetée par la Ville de Paris le 31 août 1811 et restaurée et agrandie par Étienne‑Hippolyte Godde; elle fut bénite le 15 novembre 1818. Cette première église, appelée Notre‑Dame de la Procession, était globalement orientée nord‑sud dans l'axe de la rue Popincourt et entourée de bâtiments à l'ouest et au sud. Elle fut détruite lors du percement du boulevard du Prince‑Eugène (devenu boulevard Voltaire) et son emplacement a été transformé en square Saint‑Ambroise. La reconstruction de l'église fut déclarée d'utilité publique le 24 janvier 1863 et l'édifice actuel, situé vers le 71 boulevard Voltaire, fut construit de 1863 à 1868 d'après les plans de l'architecte Théodore Ballu. Le premier office y eut lieu le 21 mars 1869 et la bénédiction des cloches se déroula le 29 avril en présence de l'impératrice Eugénie, marraine de l'une d'elles. Le style de l'édifice mêle néoroman, néogothique et néobyzantin, courant alors à Paris, et ses deux flèches élancées évoquent celles de certaines cathédrales. Mgr d'Hulst a été vicaire de la paroisse. Pendant la Commune de 1871, sans interrompre le culte, l'église a hébergé le Club Ambroise, dit Club des prolétaires, qui publiait le journal Le Prolétaire et accueillait des oratrices féministes; à partir du 23 mai 1871 elle servit aussi de poudrerie. L'église Saint‑Ambroise a été consacrée par le cardinal Léon Adolphe Amette le 7 décembre 1910. Le 14 février 1907, environ cinquante mille personnes se massèrent dans et autour de l'église pour les obsèques de la fillette Marthe Erbelding, victime d'un meurtre et dont le corps fut découvert dans une malle déposée à la gare de l'Est. Son assassin, Albert Soleilland, voisin des parents, fut condamné à mort le 24 juillet par les Assises de la Seine, puis gracié et envoyé au bagne de Guyane où il mourut de tuberculose en mai 1920; cette affaire, très médiatisée, retarda le débat sur l'abolition de la peine de mort qui, devant la Chambre des députés, se solda le 8 décembre 1908 par le maintien de la peine capitale par 330 voix contre 201. Le 18 mars 1996 l'église fut occupée par environ trois cents personnes originaires d'Afrique et en situation irrégulière réclamant leur régularisation; en raison de risques sanitaires le curé demanda l'évacuation et les forces de l'ordre intervinrent le 22 mars au petit matin. La médiatisation de cette occupation et de son expulsion est à l'origine du mouvement des sans‑papiers, dont certains occupèrent ensuite l'église Saint‑Bernard. L'église Saint‑Ambroise est inscrite au titre des monuments historiques depuis le 2 juin 1978. Construite dans un style éclectique parfois qualifié de « Second Empire », l'église marie des éléments néoromans et néogothiques, rappelant certaines églises romanes renforcées de flèches gothiques. Elle est bâtie en pierre dure de l'Yonne et de la Meuse pour les fondations, les tours et les piliers, le remplissage étant réalisé en moellons venus des carrières de Saint‑Maximin. L'édifice mesure 87 mètres de long et 37 mètres de large au transept et possède deux clochers identiques de 68 mètres de hauteur, aux flèches octogonales cantonnées de quatre pinacles et coiffées d'une croix en fer surmontée d'une girouette en forme de coq. Le porche, saillant, ouvre sur trois portes dont les tympans portent des peintures en lave émaillée de style néobyzantin réalisées par Giuseppe Devers (1823‑1882), représentant notamment des allégories et saint Ambroise. La nef, haute de vingt mètres, comporte un triforium ouvert par des triplets de baies à arcades en plein cintre; les voûtes reposent sur des croisées d'ogives en plein cintre, caractéristiques de l'art roman normand. Le mobilier et les œuvres sont de facture modeste; on y a toutefois signalé des sculptures de Louis‑Denis Caillouette, dont L'Espérance et La Foi (1829) aujourd'hui disparues, et L'Immaculée Conception, présentée au Salon de 1824. La cuve baptismale en marbre blanc, soutenue par huit colonnettes en marbre rouge, était autrefois surmontée d'un couvercle couronné d'une croix et de l'Agneau mystique qui ont disparu; on trouve également un autel à baldaquin, des lustres, une statue de saint Jean‑Baptiste et un bénitier. Dans le transept gauche la chapelle de saint Augustin reçoit deux peintures murales de Jules Lenepveu illustrant des épisodes du concile de Carthage et la fin d'un usage guerrier barbare, tandis que la chapelle de saint Ambroise, dans le transept droit, présente deux toiles de Lenepveu montrant saint Ambroise face à l'empereur Théodose et rachetant des prisonniers avec les vases sacrés de son église. Les vitraux datent de 1868 et sont l'œuvre du maître‑verrier Charles‑Raphaël Maréchal de Metz, parmi lesquels figurent des scènes comme Joseph charpentier et la Fuite en Égypte. Le grand orgue de tribune, construit par Merklin‑Schütze en 1869, compte 32 jeux, trois claviers et un pédalier; il a été restauré et complété par Gutschenritter au XXe siècle puis par Bernard Dargassies au XXIe siècle, et Georges Mac‑Master en a été organiste et maître de chapelle. Un orgue de chœur, également de Merklin et placé derrière l'autel, comprend 13 jeux répartis sur deux claviers manuels et un pédalier. Trois cloches sont installées dans la tour de droite sous une charpente en bois; elles sont baptisées Sainte Eugénie (1 650 kg), Sainte Marie (1 100 kg) et Sainte Catherine (816 kg). Parmi les curés passés figure Jean‑Baptiste Marc Mireur, prêtre du diocèse de Digne né le 25 avril 1751 à Riez, qui desservit la paroisse au début du XIXe siècle et mourut le 26 octobre 1817; le curé actuel, depuis 2020, est le père Pascal Nègre. Dans son Dictionnaire superflu à l'usage de l'élite et des biens nantis (1985), Pierre Desproges écrivit à propos de l'église Saint‑Ambroise : « Ne me parler pas de l’église Saint‑Ambroise ; quand je la croise, j’ai honte pour Dieu ».