Origine et histoire de l'Église Saint-Caprais
L'église Saint-Caprais est une église catholique située à Saint-Caprais-de-Bordeaux, en Gironde. Elle se trouve à l'ouest du bourg, sur la route départementale D240 en direction de Camblanes-et-Meynac. Le premier édifice remonte vraisemblablement au XIe siècle, implanté sur des fondations d'une église paléochrétienne des Ve ou VIe siècles. Une nouvelle église construite au XIIe siècle a laissé l'abside voûtée en cul-de-four et l'élévation de la façade occidentale. À l'entrée de la nef se trouvent un puits et un enfeu creusé dans le mur sud de l'abside. L'abside a été surélevée et la nef consolidée au XVe siècle. Le clocher est élevé au XVIIIe siècle; la cloche actuelle provient de l'ancienne église Saint-Jean de Madirac, démolie entre 1815 et 1825 lors de la réunion des deux paroisses. Le porche et les baies ont été remaniés au XIXe siècle, et des restaurations ont eu lieu au XXe siècle. L'édifice est inscrit au titre des monuments historiques en 1925.
L'église se distingue par une iconographie romane remarquable : huit chapiteaux historiés dans le presbytérium et une série extérieure de 45 modillons sous la corniche du chevet. Les huit chapiteaux du presbytérium, destinés au clergé, comprennent quatre grands chapiteaux aux retombées des arcs doubleaux et quatre plus petits ornant les colonnettes des fenêtres; ils datent du milieu du XIIe siècle et développent un thème religieux axé sur l'obéissance, la pauvreté et la chasteté. L'arc triomphal nord représente le sacrifice d'Isaac : Abraham, tenant Isaac au-dessus d'un autel, lève son glaive tandis qu'un ange intervient pour retenir son bras. Une créature non humaine, identifiée comme l'émissaire de Satan Sammaël, apparaît derrière Isaac et un bélier est dissimulé dans un roncier, rappelant le Midrach selon lequel Sammaël aurait caché le substitut sacrificiel. L'arc triomphal sud met en scène l'indiscipline et la désobéissance par la figure d'un petit homme en équilibre entre deux lions dont il saisit les langues, entouré d'une végétation luxuriante symbolisant la tentation. Le chapiteau nord de l'arc du chœur illustre l'avarice : le Diable, assis en majesté, tient une corde attachée aux passions et enchaîne un riche cupide, tandis qu'un serpent chuchote à son oreille et qu'un assassinat est représenté à proximité, renvoyant à la Psychomachie. Le chapiteau sud de l'arc du chœur montre deux reptiles qui, formant un X, avalent par les pieds une femme et un homme nus, allusion probable au péché de fornication ou d'adultère.
Parmi les chapiteaux des fenêtres, le chapiteau occidental de la fenêtre nord porte l'image d'un lionceau en position héraldique, la colonnette orientale étant végétale. À la fenêtre sud, un chapiteau présente un félin en interaction avec un homme, surmonté d'un petit personnage à tête d'oiseau ; le sens de cette fable reste obscur. Le chapiteau nord de la fenêtre orientale montre une sirène bicaudale aux deux petites poitrines, placée dans la fenêtre axiale du chevet, situation observée également dans d'autres églises locales. Le chapiteau sud de la fenêtre orientale offre une composition pseudo-héraldique où deux mammifères à tête d'oiseau ou de reptile flanquent un protomé de lion, leurs queues se transformant en lianes ; cette mise en scène évoque des attributs du péché. Dans la nef subsistent quelques petites consoles hautes le long des murs latéraux, qui servent d'appui aux entraits moisés et dont certaines portent des sculptures.
La corniche du chevet comporte 45 modillons d'importance majeure, disposés du mur sud au mur nord et exécutés avec une qualité variable, de l'apprenti au sculpteur confirmé. La moitié sud (n°1 à 20) expose principalement des thèmes dénonçant la luxure, formant parfois des ensembles narratifs lus de droite à gauche, tandis que la moitié nord (n°21 à 45) est surtout géométrique et végétale, avec deux masques démoniaques aux numéros 36 et 37. La série sud inclut une séquence moralisatrice contre l'adultère : une femme en lecture se voyant offrir un fruit, des symboles de sexualité, des scènes d'étreinte puis de copulation, et une image mettant en garde contre l'eucharistie profanée figurée par des rapaces tenant une hostie et des fruits défendus. D'autres modillons sud montrent un homme chevauchant une bête cornu, un penseur méditatif, deux hommes à genoux aux bras liés en avertissement contre les relations impures, un monstre tirant la langue, une figure féminine impudique de type Sheela Na Gig, un tonnelet de vin et une sirène-oiseau ; les modillons dialoguent souvent entre eux pour opposer exemple et contre-exemple.
L'intérieur abrite un mobilier important, notamment une série de bas-reliefs en albâtre d'origine anglaise datés des XIVe et XVe siècles, ainsi que les fonts baptismaux, des bénitiers, la chaire et un sarcophage. La croix de cimetière, datée du XVIe siècle, présente un fût élevé sur un socle carré décoré de fleurs, des instruments de la Passion et des représentations du Christ et de la Vierge, motifs traditionnels des croix hosannières. L'église conserve également des vitraux aux fenêtres sud, est et nord, et ses vues du porche, du portail roman et du sanctuaire renforcent son intérêt patrimonial.