Origine et histoire de l'Église Saint-Jean-Baptiste
L'église Saint-Jean-Baptiste, située sur la place Saint-Jean dans la vieille ville de Valence (Drôme), occupe le point le plus élevé de la cité et témoigne de son ancienneté comme l'un des premiers lieux de culte chrétiens de Valentia. Des documents mentionnent la tenue de conciles en son sein, notamment ceux de 374 et de 855, et l'édifice apparaît pour la première fois dans l'inventaire du chapitre de Valence en 1189. La tradition retient une fondation au haut Moyen Âge, mais ses origines précises demeurent incertaines. L'église est inscrite au titre des monuments historiques depuis le 4 août 1978.
La partie basse du clocher-porche semble remonter au XIIe siècle et l'édifice connut, aux XVe et XVIe siècles, diverses campagnes de réparations ; le clocher était alors équipé d'un jacquemart. Lors des guerres de religion, Saint-Jean-Baptiste souffrit d'incendies et, au cours de la nuit de la Toussaint de 1567, des protestants mirent notamment le feu à la cathédrale Saint-Apollinaire et à Saint-Jean. De premiers travaux de restauration eurent lieu au début du XVIIe siècle, la nef restant à cette époque sans bas-côtés. En 1720 l'évêque Jean de Catelan fit reconstruire l'église et interdit les inhumations ; le cimetière accolé au chevet fut déplacé à l'est, vers le Faubourg Saint-Jacques, en 1776, bien qu'il existât avant 1284. Seule subsiste aujourd'hui la tombe de Christophoro d'Authier de Sisgau, évêque du diocèse de Bethléem et fondateur du premier séminaire de Valence en 1639. En 1785 un incendie détruisit le sommet du clocher, le jacquemart étant remplacé par un campanile en fer forgé.
Pendant la Révolution, après l'assassinat du comte de Voisins en 1790, l'édifice cessa progressivement ses fonctions religieuses : en 1793 les offices s'arrêtèrent et l'église servit de lieu de réunion, d'entrepôt militaire puis de geôle pour prisonniers de guerre. Un arrêté du 24 mars 1801 autorisa la réouverture au culte et fit de Saint-Jean une annexe de la cathédrale Saint-Apollinaire. Le corps de l'église fit l'objet d'une reconstruction entre 1840 et 1849, d'après des plans du diocésain H. Epailly ; les travaux furent lents et plus coûteux que prévu, notamment en raison de fondations approfondies à cause de pierres mêlées d'ossements.
L'architecture intérieure présente des rappels à Saint-Apollinaire, avec arcatures en plein cintre, ouvertures en colonnettes et chapiteaux, frises d'arcatures aveugles sous le toit et cordons de denticules. Le clocher-porche, rénové en 1861 après la restauration de 1849, avait à l'origine des arcs brisés le rattachant aux XVe-XVIe siècles ; l'architecte Auguste Chauffeur chercha à conserver le caractère primitif tout en réparant les façades et fit sculpter un bas-relief de Saint-Jean-Baptiste dans le tympan. Pour cette intervention, il réemploya des éléments du premier âge roman : ouvertures en plein cintre, baies géminées à archivolte saillante ornée de billettes et bandes lombardes liées par des arcatures aveugles. L'aspect médiéval est renforcé par l'usure et la patine de la molasse de Châteauneuf-sur-Isère, matériau présent dans d'autres édifices valentinois comme la maison des Têtes.
À l'entrée du clocher subsistent huit chapiteaux romans : quatre à décor feuillagé parfois agrémenté de poissons ou de têtes, deux présentant des masques crachant du feuillage et deux historiés placés aux angles nord-est et sud-ouest. Le chapiteau dit « Femme aux serpents » montre un personnage nu entouré d'animaux hybrides mi-oiseaux mi-serpents, image relevant d'une iconographie médiévale de la luxure. Le chapiteau représentant Tobie capturant le poisson montre Tobie hissé sur le poisson et tenant un instrument tranchant, tandis qu'un autre personnage, peut-être l'archange Raphaël ou le père aveugle, figure sur l'arête ; un décor aquatique ponctué de petits trous et une tête sculptée au centre complètent la composition. Le traitement des chapiteaux présente des similitudes avec ceux de la cathédrale Saint-Apollinaire.
Le 15 août 1944 un bombardement souffla les vitraux de l'église ; dès 1945 les maîtres verriers Thomas et Balayn restaurèrent les verrières du chœur et des bas-côtés. L'intérieur fut refait en 1966 : le chœur fut réaménagé conformément à la réforme liturgique issue du concile Vatican II et le mobilier liturgique fut réalisé par l'architecte J. Hartman, notamment des chandeliers, une croix et des statues de la Vierge et de saint Joseph. En 2005-2006, dans le cadre de la Convention patrimoine de Valence, l'église a bénéficié d'une restauration des façades du corps et du clocher, avec ravalement, nettoyage et rejointoiement ; la baie originelle du portail sud a été rouverte et dotée d'un vitrage permettant d'admirer les chapiteaux du clocher sans les exposer aux intempéries. L'église conserve les reliques de saint Venant, évêque de Viviers au VIe siècle.