Origine et histoire de l'Église Saint-Jean
L'église Saint-Jean, de style roman, se dresse en ruines à Forcalquier, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Au XIXe siècle, certains auteurs, dont Léon de Berluc-Pérussis, ont proposé qu'elle ait pu être un ancien baptistère ; depuis le milieu du XXe siècle cette hypothèse n'est pas rejetée mais est jugée fragile, reposant surtout sur un vocable incomplet et l'absence de preuves archéologiques. Au XIe siècle, l'évêque de Sisteron Géraud Chabrier l'intègre au temporel de la concathédrale de Forcalquier. Les spécialistes restent partagés sur son statut ancien : certains, comme Berluc-Pérussis et Guy Barruol, la considèrent comme une paroisse urbaine à l'intérieur du bourg, tandis que Jean-Yves Royer la voit plutôt comme une paroisse rurale ; Mariacristina Varano, s'appuyant sur l'orientation d'autres monuments médiévaux forcalquiériens, penche pour une implantation urbaine sur le versant sud de la colline. La construction est généralement datée des XIIe–XIIIe siècles ; selon Raymond Collier, le chœur serait plus ancien, peut‑être de la fin du XIe ou du début du XIIIe siècle, la nef et la façade étant postérieures d'environ un siècle. La crise du XIVe siècle entraîne une baisse de population et des revenus qui conduisent à la suppression de la paroisse et à sa réunion à Notre‑Dame‑du‑Bourguet en 1415, sans empêcher la célébration de messes aux XIVe et XVe siècles. Une partie de la voûte commence à s'effondrer au XVIIe siècle, des travaux sont réalisés pour les pénitents bleus à la même époque, puis l'édifice est abandonné avant la Révolution. Sous le régime concordataire, il est réaffecté à une confrérie issue de la fusion des pénitents gris et bleus, puis définitivement désaffecté en 1937. La voûte des deux premières travées s'est effondrée au XXe siècle et l'édifice continue à se délabrer.
Dans son état actuel, l'édifice apparaît comme une reconstruction romane des XIIe–XIIIe siècles, parfaitement orientée et mesurant 26 mètres de long sur 10 mètres de large. La nef compte cinq travées — les quatre travées orientales mesurent entre 3 et 3,7 mètres, la travée occidentale 5,6 mètres — et est voûtée en berceau brisé ; elle est éclairée par trois fenêtres à double ébrasement, soigneusement appareillées avec des piédroits harpés. La fenêtre occidentale a été démontée puis relevée un peu plus haut lors de l'aménagement d'une tribune au XVIIe siècle. La nef s'ouvre sur une abside semi‑circulaire profonde de 4 mètres, voûtée en cul‑de‑four et orientée assez nettement vers le nord, ce qui décale l'arc triomphal par rapport à l'axe de la nef. Cette désaxation peut s'expliquer soit par la conservation d'un chœur plus ancien orienté différemment — argument soutenu par l'amincissement et la différence d'appareil du mur extérieur de l'abside et par la présence d'un jour axial aujourd'hui condamné —, soit par l'adaptation à la pente du terrain, constat également dans d'autres édifices du secteur ; Guy Barruol, pour sa part, attribue l'abside à la même campagne que les deux travées orientales. La façade, peu ornée mais soigneusement bâtie, est fissurée après l'effondrement partiel de la voûte ; le portail est surmonté de deux voussures crénelées encadrées d'une frise de pointes de diamant et d'un oculus, éléments attribués à la fin du XIIe ou au début du XIIIe siècle. Fragilisée par des percements dans le mur sud, la voûte des premières travées s'est effondrée ; après une période sans protection un toit métallique a été posé et des murets intérieurs ont été élevés au XXe siècle pour tenter de stabiliser l'ouvrage. Sur le mur nord subsistent trois départs de murs orthogonaux qui pourraient correspondre à des arcs rampants ensuite supprimés.