Origine et histoire de l'Église Saint-Jean-de-Malte
L'église Saint-Jean-de-Malte, située place Saint-Jean-de-Malte à Aix-en-Provence, est considérée comme la première église gothique de Provence et se dresse à l'angle de la rue d'Italie et de la rue Cardinale ; son clocher culmine à 67 mètres, en faisant le point le plus haut de la ville. Elle a été édifiée sur l'emplacement d'une chapelle fondée par les Hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem à leur arrivée à Aix au XIIe siècle, et son élévation actuelle est traditionnellement datée entre 1272 et 1277, attribution qui reste toutefois incertaine. L'importance funéraire du lieu, liée aux comtes de Provence, a motivé des agrandissements destinés à recevoir des sépultures, en particulier à la demande de Charles Ier d'Anjou pour accueillir le tombeau de Béatrice de Provence. Des découvertes antérieures signalent la présence d'un autel à Minerve lors d'aménagements avant 1593, et le premier acte documentaire parlant d'une maison des Hospitaliers à cet emplacement remonte à 1192. Un édifice religieux fut consacré à Aix en 1251, mais l'identification précise de ce bâtiment avec l'église actuelle ou son antécédent reste controversée. Le chœur et les transepts ont vraisemblablement été achevés au plus tard en 1277, les chapelles latérales ayant été ajoutées ultérieurement. Originellement isolée au milieu des champs et hors des remparts, l'église fut progressivement entourée par l'urbanisation, notamment par la création du quartier Mazarin au XVIIe siècle, qui l'intégra et modifia son environnement. Pour défendre l'édifice, trois hautes tours furent élevées entre la fin du XIIIe et le début du XIVe siècle ; une démolition envisagée au XVIe siècle fut finalement évitée. Aux XVIIe–XVIIIe siècles, des hôtels particuliers disposés en damier et des remparts nouveaux encadrèrent le site, tandis que le prieur Jean-Claude Viany entreprit d'importants travaux et l'ajout de chapelles entre 1670 et 1695, les interventions majeures se situant entre 1692 et 1694. L'entrée latérale fut refaite en 1683 et ornée en 1694 d'un médaillon en marbre de Félix Veyrier représentant la décollation de saint Jean-Baptiste. Le tombeau original des comtes de Provence fut détruit en 1794 ; une copie, réalisée en 1828 par souscription publique à laquelle participa Charles X, occupe aujourd'hui le bras nord du transept, tandis que des fragments retrouvés en 1902, dont des têtes, sont conservés au musée Granet. La nef unique repose sur des fondations plus anciennes et le chevet plat ainsi que le transept, légèrement postérieurs, traduisent l'évolution de l'édifice qui servit successivement l'ordre des Hospitaliers, puis les commanderies de Rhodes et de Malte et dépendit du grand prieuré de Saint-Gilles. Le clocher, autorisé dès 1292 à recevoir quatre cloches, présente une base carrée massives épaulée par des contreforts sans percements, un premier étage percé de quatre baies verticales abritant alors l'unique cloche, et une flèche entourée de quatre clochetons et ajourée par huit lucarnes ; l'ancien épi métallique fut remplacé en 1755 par une croix de Malte après un orage, et la foudre a régulièrement exigé des restaurations de la flèche. Des quatre cloches médiévales, seule subsista la plus lourde (1 260 kg) après la réquisition de fonte de 1793 ; trois nouvelles cloches, fondues par la maison Paccard à partir de bronze donné par la ville de Toulon, ont été réinstallées en 2018. La façade, d'origine XIIIe mais remaniée au XVIIe siècle et restaurée par Henri Révoil entre 1851 et 1858, est dominée par un pignon portant une croix de Malte, flanquée de deux tours octogonales hautes de trente-deux mètres, percées de meurtrières et coiffées en pyramide ; ces tours encadrent un balcon qui surmonte une grande rose de quatre mètres de diamètre. Le portail, dont les vantaux datent de la fin du XVIIe ou du début du XVIIIe siècle, présentait autrefois des croix de Malte supprimées depuis, et deux gargouilles en forme de tête de chien rappellent les armoiries du prieur Viany. Le chevet plat visible rue d'Italie fut dégagé et restauré après l'acquisition et la démolition d'une maison qui avait obstrué une grande fenêtre en tiers-point de onze mètres. L'intérieur surprend par sa luminosité, la couleur de la pierre et une sobriété propice à la contemplation ; l'église, aujourd'hui paroissiale et confiée à la Fraternité des Moines apostoliques, reste fréquemment ouverte au public grâce aux offices monastiques. Parmi les œuvres exposées, la Crucifixion de Delacroix attire un grand nombre de visiteurs ; le vitrail du chevet de 1854 représente le Baptême du Christ. L'église conserve également des tableaux et pièces d'origine variée, comprenant notamment des œuvres de Jean Armelin, André Boisson, Michel-François Dandré-Bardon, Louis Finson, Gilles Garcin, André Gaudion, Reynaud Levieux, Guillaume Martin dit Adam, Nicolas Mignard, Nicolas Pinson, Michel Serre et une Vierge de Lorette anonyme, plusieurs ayant été commandées pour des chapelles ou transférées d'autres églises. Après une succession d'instruments, l'orgue actuel a été construit par la maison Kern et inauguré le 25 juin 2006 ; des orgues antérieurs remontent au XVIIe siècle, ont été remplacés en 1670 par un instrument commandé à Charles Rouyère, puis en 1843 par un orgue Daublaine et Callinet transformé en 1896 par Joseph Merklin et amélioré en 1929. L'église est classée au titre des monuments historiques depuis la liste de 1840.