Origine et histoire de l'Église Saint-Laurent et Notre-Dame
L'église Saint-Laurent-et-Notre-Dame de Gargilesse-Dampierre est une église catholique située sur la Via Lemovicensis, à Gargilesse-Dampierre (Indre, Centre-Val de Loire). Elle dépend de l'archidiocèse de Bourges, du doyenné du Val de Creuse et de la paroisse d'Éguzon-Orsennes. L'origine de l'édifice reste incertaine : la base Mérimée évoque le XIe siècle, tandis que les données archéologiques et stylistiques le rattachent plutôt au deuxième tiers du XIIe siècle ; la construction a pu se dérouler en deux campagnes, d'abord le chœur et le transept, puis la nef. Hugues de Naillac est associé à la fondation de l'église Notre-Dame et la chapelle servait de chapelle castrale, desservie par des chanoines augustins et communiquant avec le château par la crypte. Hugues Ier de Naillac partit pour Jérusalem et, en 1187, transigea avec André de Chauvigny en faisant hommage de son château et de Gargilesse. La démolition du château par les troupes royales en 1650 a probablement entraîné la disparition des travées occidentales de la nef, et la suppression de la paroisse Saint-Laurent en 1786 fit de Notre-Dame la seule église paroissiale. Classé au titre des monuments historiques en 1840, l'édifice a fait l'objet de travaux de restauration après la demande de Prosper Mérimée en 1849 ; les interventions ont été menées successivement par l'architecte Jules de Mérindol, puis par Denis Darcy (1823-1904) pour l'assainissement de la crypte, Mayeux pour les contreforts et Gabriel Brun pour la couverture. L'église est fondée sur le socle granitique de la vallée de la Creuse, mais édifiée en calcaire provenant de la région d'Argenton-sur-Creuse. Elle comporte deux parties distinctes : un chevet à abside et absidioles polygonales et une nef montrant les premières tentatives de voûtement d'ogives. Le chevet se caractérise par des arcs de décharge brisés soutenus par des colonnes d'angle ; la disposition, proche de certains chevet limousins, est singulière en ce que les deux absidioles partagent un mur commun avec l'abside, donnant l'impression d'un chevet à sept pans. Le transept, peu développé, est couvert d'une voûte en demi-berceau et d'une coupole sur pendentifs percée au centre ; quatre passages en arc brisé permettent la circulation autour de la croisée et relient les chapelles au chœur, tandis qu'au-dessus de la croisée s'élève une tour carrée ornée d'une double arcature aux archivoltes brisées. Le mélange de voûtements en berceau brisé et en plein cintre est caractéristique du milieu du XIIe siècle. La nef, composée de deux travées et située trois marches plus bas que le transept, présente un vaisseau central plus large que le chœur ; les deux piliers occidentaux de la croisée portent des traces d'arrêt des travaux, ce qui corrobore l'hypothèse d'une suppression de travées. Au bas de la nef se trouve le gisant de Guillaume de Naillac, seigneur de Gargilesse, dont l'épitaphe rappelle sa participation aux croisades et sa mort le 7 novembre 1266. La façade occidentale a été remaniée et pourrait constituer un remplissage après la disparition d'une ou plusieurs travées. L'intérêt de l'église réside notamment dans sa remarquable série de chapiteaux romans : vingt-quatre Vieillards de l'Apocalypse répartis sur huit chapiteaux à la croisée du transept, des scènes de l'enfance du Christ (Annonciation, Visitation, Nativité, Rois mages) dans l'absidiole nord, et un cycle de Daniel (Daniel dans la fosse aux lions, le prophète Habacuc, la Tentation du Juge) dans le croisillon sud, accompagnés de motifs d'animaux fantastiques, de rinceaux et de personnages. Ces sculptures, réalisées par plusieurs mains, présentent des parentés stylistiques avec des œuvres berrichonnes, bourguignonnes et limousines, notamment à Déols, Bommiers, La Charité-sur-Loire et Vigeois. Sous le chevet et le transept, la crypte romane, qui compense le dénivelé du terrain, est décorée de fresques des XIIIe, XVe et XVIe siècles. Parmi le mobilier, une statue de la Vierge dite "Sedes Sapientiae" est inscrite comme objet aux Monuments historiques ; la tradition locale la fait remonter aux Croisades.