Origine et histoire de l'Église Saint-Léger
L'église Saint-Léger, ancienne abbatiale romane, se dresse à Ébreuil, dans l'Allier, sur la rive gauche de la Sioule et jouxte des bâtiments conventuels du XVIIIe siècle. Elle a été édifiée à partir du Xe siècle par des moines de Saint-Maixent du Poitou, réfugiés avec les reliques de saint Léger, autorisés à s'installer par le roi Charles le Simple; le roi Lothaire leur donna la terre d'Ébreuil en 961, ce qui permit la construction du monastère et d'une nouvelle église. La partie principale de l'édifice visible aujourd'hui date du début du XIe siècle. À la Révolution, l'abbatiale devint l'église paroissiale d'Ébreuil, succédant à l'ancienne église Notre-Dame aujourd'hui disparue, et l'édifice a été classé monument historique en 1914.
La nef actuelle repose sur l'emplacement de l'église construite entre 961 et 1025; elle comprend cinq travées rythmées par des piliers rectangulaires sans sculpture et une avant-nef dont la largeur rejoint celle de l'édifice. La nef, datée du XIe siècle, est couverte par une charpente en bois à deux versants. Le bras nord du transept, de la même époque, présente un triplet — deux baies en plein cintre flanquantes d'une baie aveugle en mitre — et l'entrée d'une chapelle bouchée encadrée par des colonnes et chapiteaux du XIe siècle.
Le chevet carolingien primitif fut remplacé en 1171 par un chevet à cinq chapelles rayonnantes, de style proto-gothique ou roman tardif selon les analyses. Le style de transition se manifeste par des baies en plein cintre encadrées de colonnes aux chapiteaux à crochets d'influence gothique; les arcs-boutants entaillant les voussures indiquent des retouches ultérieures. L'intérieur du chœur et du chevet s'organise avec élégance autour d'un rond-point ouvert par deux piliers fasciculés; les deux colonnes et leurs chapiteaux à l'entrée du chœur sont attribués à la fin du Xe siècle par Bernard Craplet. Le déambulatoire mène à des chapelles absidiales dont les cellules voûtées d'ogives portent des clés sculptées, notamment un ange thuriféraire et un agneau pascal; deux chapelles latérales sont semi-circulaires et les trois autres sont polygonales.
Les peintures murales romanes, bien conservées, ornent la tribune au-dessus du narthex sur les murs sud, ouest et nord et datent du XIIe siècle. D'après l'étude de Georges Jousse, la paroi sud serait réalisée entre 1085 et 1090, les parois ouest et nord entre 1115 et 1120. Sur le mur sud figurent des personnages en pied — l'évêque saint Austremoine, le pape saint Clément et un saint non identifié — ainsi qu'une scène de décollation représentant le martyre de saint Pancrace. Le mur ouest narre en quatre phases le martyre de sainte Valérie, tandis que le mur nord illustre trois scènes faisant intervenir les archanges. Dans la nef, des peintures gothiques postérieures à 1416 ornent le deuxième et le troisième piliers sud : le deuxième présente saint Blaise, saint Laurent, saint Antoine et saint Léger, le troisième montre saint Georges terrassant le dragon et une scène de crucifixion sur le thème de la Mater dolorosa.
Le clocher-porche, massif, témoigne de l'influence de l'art roman du Val de Loire et rappelle l'abbatiale de Saint-Benoît-sur-Loire, observation faite par Éliane Vergnolle. Les portes d'entrée sont remarquables : les vantaux de bois sont recouverts de peaux marouflées et teintes en rouge, et les heurtoirs en bronze représentent un protomé de lion supportant un anneau posé sur une platine circulaire ornée d'inscriptions latines, dont l'une se lit : « adest porta per quam justi redeunt ad patriam ».