Origine et histoire de l'Église Saint-Leu
L'église Saint-Leu, située dans le quartier Saint-Leu d'Amiens, est l'une des plus anciennes églises de la ville après la cathédrale. Sa présence est surtout documentée à partir du XVe siècle, période à laquelle l'édifice fut reconstruit et rendu au culte en 1449, puis agrandi à la fin du siècle suivant grâce au financement majoritairement assuré par les paroissiens. Un cimetière pour enfants fut créé en 1495 sur un terrain donné par Jean de Normâtre, cimetière qui sera supprimé en 1597 ; des logettes et des places à louer furent établies contre les murs de l'église à la fin du XVe siècle. Le clocher primitif fut endommagé par une tempête en 1581, un événement qui causa de nombreuses victimes, et la tour fut reconstruite ensuite, ayant été placée bas de nef selon plusieurs auteurs. L'édifice subit de nombreuses réparations et campagnes de restauration aux XIXe et XXe siècles, dont des travaux dirigés par l'architecte municipal Vigreux au milieu du XIXe siècle, la construction d'une sacristie enjambant le canal en 1826 et des interventions ponctuelles sur les toitures et le presbytère aux XIXe et XXe siècles. Pendant la Révolution, l'église fut dépouillée de son mobilier et transformée en magasin de fourrage en 1793, puis rendue au culte en 1796 ; elle figure dans la première liste de la Commission des Monuments historiques en 1840 et a été classée au titre des monuments historiques en 1906. Les bombardements de 1918 détruisirent les derniers vitraux anciens et la seconde guerre mondiale épargna l'édifice.
D'un point de vue architectural, l'église présente un plan basilical de type halle, formé de trois nefs d'égale largeur et d'égale hauteur, construites en craie sur un soubassement en grès et relevant du gothique flamboyant. Le clocher-porche, érigé vers 1500, s'ouvre par un portail au sud dont le décor a été remanié au XIXe siècle ; la partie haute du clocher est percée d'arcatures aveugles flamboyantes, surmontée d'une balustrade, de gargouilles d'angle et d'une haute toiture à pavillon. Les nefs sont séparées par de larges arcades qui retombent sur des piliers ronds à base buticulaire, sans chapiteaux, et se terminent par des murs droits irréguliers ; la première travée du collatéral sud est occupée par le clocher.
L'intérieur conserve des voûtes en berceau brisé en bois réalisées au XVe siècle par Ernoul et Jean Le Messier, aujourd'hui enduites, ainsi que des clefs de voûte sculptées en forme d'anges portant des blasons peints au XIXe siècle, parmi lesquels figurent les armes de l'évêque, du chapitre cathédral et d'Adrien d'Hénencourt, doyen en 1530. Une tribune en bois sculpté, construite au XVIe siècle, occupe le revers de la façade et ses escaliers ; le chœur abrite un maître-autel sculpté par Jean-Baptiste Carpentier, surmonté d'une gloire du XIXe siècle réalisée par les frères Duthoit. Plusieurs autels latéraux sont ornés de statues, notamment des figures de saint Roch, de sainte Philomène, de la Vierge à l'Enfant, de saint Joseph, du Sacré-Cœur, de saint Louis et de sainte Élisabeth.
L'église conserve un ensemble d'œuvres d'art, dont un Christ de pitié en bois des XVe-XVIe siècles et diverses sculptures attribuées à Jean-Baptiste Carpentier, Jean-Baptiste Dupuis, Jacques-Firmin Vimeux et François Cressent ; la chaire provient de l'abbaye des Prémontrés d'Amiens. L'orgue de tribune a connu plusieurs campagnes de reconstruction et de restauration depuis le XVIe siècle : Charles Dallery intervenait au milieu du XVIIIe siècle, les Frères basiliens ont reconstruit l'instrument en 1839-1840 en réutilisant du matériel ancien, puis il fut modifié et agrandi à la fin du XIXe siècle et restauré au XXe siècle ; l'instrument est aujourd'hui hors service. Le buffet du XVIIIe siècle, composé d'un grand corps à cinq tourelles et d'un positif de dos à trois tourelles, a été inscrit en 1987 puis classé au titre d'objet en 2001, de même que l'orgue dans son ensemble.
Au pied de l'église, sur la Petite Rue Saint-Leu, se trouve la sculpture Demeure IV d'Étienne Martin, installée à cet emplacement depuis 1961 après avoir été initialement placée place Léon Gontier.