Origine et histoire de l'Église Saint-Martin
L’église Saint‑Martin de Plailly, située au centre du bourg dans le Parc naturel régional Oise‑Pays de France (département de l’Oise, région Hauts‑de‑France), est une paroisse catholique inscrite sur la liste des monuments historiques depuis 1862. Elle a été reconstruite dans le style gothique primitif pendant les années 1160–1170 ; au début du siècle suivant, son chœur a été remplacé par un édifice pré‑rayonnant dont les trois travées du chevet forment un vaisseau transversal de même hauteur. Par certaines analogies, la construction puise des influences dans les chantiers des cathédrales Notre‑Dame de Senlis et Notre‑Dame de Paris. La nef, prévue à l’origine pour rester charpentée, se caractérise par de grandes arcades brisées retombant sur d’imposants piliers cylindriques isolés dont les chapiteaux sculptés montrent une grande variété de motifs. Dans le chœur, trois piliers similaires supportent, par superposition, des faisceaux de colonnettes formant l’ordre supérieur ; cette solution originale, élégante et inspirée par les grands chantiers de l’époque est l’un des éléments remarquables de l’édifice. L’ensemble du chevet offre un vaste espace bien éclairé, en contraste avec la pénombre de la nef. La fine flèche octogonale en pierre, élevée dans la seconde moitié du XIIIe siècle, apporte une note de raffinement à l’extérieur sobre de l’église.
Le chevet regarde la rue Georges‑Bouchard ; les autres élévations s’ouvrent sur la place de l’Église où se trouve une fontaine des XVIIIe–XIXe siècles inscrite aux monuments historiques depuis 1970. Le plan au sol est rectangulaire : une nef de cinq travées avec bas‑côtés, un chœur de trois travées à chevet plat, deux collatéraux et deux travées latérales atteignant la même hauteur que le chevet, de sorte que les dernières travées forment un chœur‑halle. Le clocher s’élève au‑dessus de la première travée du collatéral sud et une sacristie a été adjointe au nord de la chapelle latérale ; les accès sont situés au portail occidental et sur des portes latérales dans les bas‑côtés.
La façade occidentale conserve essentiellement sa partie centrale avec le portail et la fenêtre supérieure ; son décor sobre repose sur des contreforts à ressauts et des rétractations successives des murs. Le portail et l’archivolte de la fenêtre présentent un décor de cordon en dents de scie, de tores et de chapiteaux à crochets, tandis que le tympan est resté nu. Les bas‑côtés sont éclairés à l’ouest par des baies en plein cintre issues d’une campagne de la seconde moitié du XIIIe siècle ; les contreforts, plus élevés que les murs gouttereaux, et la corniche de corbeaux de la nef marquent l’élégante sobriété extérieure. Le clocher, de plan simple et austère, comprend un étage de beffroi percé d’ouvertures abat‑son et une tourelle d’escalier conique ; la flèche octogonale, cantonnée de pyramidons et ornée de fleurons, est si légère qu’elle n’a pas nécessité de renforts supplémentaires.
Intérieurement, la nef voûtée tardivement à la fin du XVIe ou au début du XVIIe siècle présente des voûtes à losange à liernes et tiercerons, des clés pendantes sculptées de feuillages et des consoles en doucine ; ce voûtement a entraîné la suppression des fenêtres hautes qui rendaient autrefois la nef plus lumineuse. Les grandes arcades en tiers‑point, d’une facture austère, retombent sur des piliers cylindriques appareillés en tambour et sont coiffées de chapiteaux très finement sculptés — palmettes, feuilles d’acanthe, tiges perlées et volutes — témoignant d’un savoir‑faire proche de Senlis. Des traces de reprise d’appareil et des croix de consécration peintes subsistent sur certains piliers.
Le chœur se distingue par la superposition des supports : gros piliers cylindriques à l’ouest accueillant faisceaux de colonnettes, puis faisceaux de cinq colonnettes au revers du chevet, et minces colonnettes encadrant de grandes baies en arc brisé dépourvues de remplage, annonçant l’art rayonnant. Certains chapiteaux du second ordre sont placés nettement plus bas que la naissance des voûtes, et l’un d’eux porte des têtes humaines dont l’une est supposée représenter Philippe Auguste. Les premières travées des collatéraux, et notamment la base du clocher, conservent des dispositions plus massives et des arcades plus basses liées aux contraintes structurelles.
Le mobilier comporte des éléments notables : les fonts baptismaux datés de 1570, classés avec l’édifice, sont sculptés de bas‑reliefs représentant le Baptême du Christ, la Charité de saint Martin, les saints Gervais et Protais et la Cène ; la cuve, fendue puis réparée, n’est plus utilisée pour l’eau. Un panneau sculpté du XIVe siècle, découvert en 1853 et provenant d’un retable de la Vierge, a été remis au musée de Cluny en 1854. La nef conserve un ensemble d’ébénisterie de qualité — bancs, chaire et banc d’œuvre — attribué aux années 1720 et restauré à la fin des années 1990. Quinze dalles funéraires subsistent, dont quatre lisibles, et plusieurs croix de consécration peintes demeurent sur les piliers. Les autels et la plupart des vitraux sont d’époque XIXe, réalisés notamment par les ateliers Lévêque de Beauvais et la Société artistique de peinture sur verre de Paris ; aucun vitrail médiéval n’a survécu.
L’église, qui a connu des restaurations importantes au XIXe siècle sous la direction de l’architecte en chef Aymar Verdier (1853–1900), a vu notamment la reprise du clocher en sous‑œuvre et la restitution à l’identique des éléments sculptés défectueux ; les toitures furent également refaites en 1725. Aujourd’hui, elle demeure au centre de la paroisse Saint‑Esprit du Serval et conserve la réputation d’un exemple remarquable de la première architecture gothique dans la région.