Origine et histoire de l'Église Saint-Martin
L'église Saint-Martin de Tollevast, située au bas du bourg de Tollevast dans la Manche, est un édifice catholique dont l'essentiel remonte au deuxième quart du XIIe siècle. Classée au titre des monuments historiques par arrêté du 24 février 1956, elle se distingue par l'importance de son décor sculpté. La seigneurie de Tollevast est liée à la conquête de l'Angleterre : en 1066, le seigneur Henri de Tollevast partit avec le duc Guillaume, se distingua à Hastings et reçut en récompense une propriété dans l'île de Wight. La seigneurie possédait aussi Sainte-Mère-Église, Sainte-Marie-du-Mont et les fiefs de Beaudieuville et du Petit-Tollevast. En 1219, Hugues de Morville, évêque de Coutances, confirma la charte par laquelle Thomas de Tollevast avait donné le patronage de l'église à l'abbaye du Vœu de Cherbourg, et en 1350 un autre Thomas de Tollevast céda à la même abbaye les deux tiers de la dîme, le dernier tiers revenant au prieuré de la Luthumière à Brix. L'édifice, tout en ayant subi des remaniements, conserve des portions très caractéristiques du XIIe siècle.
L'église adopte un plan basilical simple : une nef unique rectangulaire et étroite longue de 18 mètres, divisée en trois travées, suivie d'une travée sous clocher voûtée d'ogives et d'un chœur étroit et profond en deux travées voûtées d'ogives quadripartites. Le chevet est hémicylindrique, coiffé d'un cul-de-four et rythmé par des contreforts plats ; les murs sont en petit appareil irrégulier. Malgré la reconstruction du mur sud en 1757 et le remaniement du clocher au XVe siècle, la façade nord a conservé ses petites baies romanes primitives. Le clocher central, situé au-dessus de la première travée du chœur, est percé d'une étroite baie ogivale et d'une baie ogivale trilobée, plus large, destinée à l'éclairage du chœur. Le portail, placé au milieu d'un mur raidi par deux contreforts, présente trois voussures en plein cintre reposant sur des colonnes engagées dont les chapiteaux sont ornés de palmettes, d'un arbuste brouté par un animal et d'entrelacs végétaux. À l'intérieur, l'intérêt architectural se concentre sur les arcs qui soutiennent le clocher, la voûte du chœur et l'arcade de l'abside.
L'église possède l'un des ensembles sculptés les plus remarquables de l'art roman normand ; le développement des culots à la retombée des ogives préfigure des solutions gothiques. Les modillons de la corniche offrent une grande variété d'ornementation, avec têtes humaines, masques d'animaux, motifs géométriques, un griffon ailé, un âne, un porc, un sagittaire et un personnage près d'un lion. Dans le chœur, les chapiteaux sont historiés par des singes et des animaux s'affrontant ; les huit grands culots présentent des motifs variés, parmi lesquels une tête énorme adossée à une paire de jambes, deux têtes moustachues, des bras naissants tirant une bouche, un personnage portant deux animaux, un buste et un saint devant un homme enroulé par un serpent. Le mobilier comprend notamment deux albâtres du XVe siècle représentant un saint Christophe et une Éducation de la Vierge.