Origine et histoire de l'Église Saint-Martin
L'église Saint-Martin, de la commune de Villenave-d'Ornon en Gironde, se situe au centre du vieux bourg et est classée aux Monuments historiques pour son abside, l'ensemble de l'édifice étant inscrit. Fondée au XIe siècle, elle a connu de nombreux remaniements. Les fouilles de 1967 ont mis au jour un sarcophage dans le sol du chœur contenant un squelette et des objets de pèlerinage, ainsi qu'une coquille sculptée au-dessus d'un bénitier, attestant que l'église était un relais sur les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle. L'édifice se compose aujourd'hui d'une nef flanquée de deux bas-côtés, de deux transepts et d'une abside en hémicycle. De l'église initiale subsistent surtout les murs nord et sud en moellons et les deux premières travées de la nef, qui conservent des chapiteaux allongés au décor schématique propre au XIe siècle. Le chevet a été remanié à la fin du XIIe et au début du XIIIe siècle : l'abside principale, en appareil régulier, est voûtée en cul-de-four et le chœur en berceau brisé sur doubleaux, les chapiteaux du chœur ayant été sculptés à la même époque. Le transept actuel date de la fin de l'époque gothique par l'adjonction de chapelles au nord et au sud, respectivement nommées successivement Saint-Michel puis Saint-Jean et Notre-Dame, et le chœur et ces chapelles sont voûtés sur croisées d'ogives. Le clocher appartient à la période classique et la chaire à prêcher, ainsi que le pilier soutenant la tribune à l'ouest, datent du XVIIIe siècle ; l'installation de la chaire a entraîné la destruction d'un grand chapiteau figuré du XIe siècle. La sacristie actuelle, adossée au mur nord de la nef, remplace une ancienne sacristie, et des travaux du XIXe siècle ont ajouté un porche occidental et percé de nouvelles fenêtres. Les restaurations du XXe siècle ont notamment concerné le chœur et son dallage en 1967, la mise en place de vitraux l'année suivante, la remise en état de la toiture et la suppression de voûtes du XIXe siècle pour retrouver la charpente originelle en 1970. L'abside a été classée au titre des Monuments historiques et l'église inscrite à titre complémentaire.
À l'intérieur, on pénètre sous le clocher par une petite porte en plein cintre ; le bas-côté sud compte trois travées si l'on considère le clocher, et des éléments romans indiquent que la façade primitive ne dépassait probablement pas le mur oriental du clocher. L'abside présente une voûte en cul-de-four et des travées droites voûtées en berceau brisé sur doubleaux en appareil régulier ; une grande arcade de communication relie l'abside à la nef. Les vitraux contemporains datent de 1968.
La sculpture romane de l'église relève de deux phases distinctes, XIe siècle et fin XIIe–début XIIIe siècle. Les chapiteaux des quatre grands piliers de la nef appartiennent au XIe siècle et se caractérisent par des corbeilles allongées aux angles abattus et des décors souvent géométriques ou schématiques, avec stries, volutes simplifiées et animaux affrontés. Quelques chapiteaux datent de la reconstruction du chœur et de l'abside à la fin du XIIe siècle et ornent l'arcade romane en plein cintre qui séparait primitivement le chœur des collatéraux. Certains chapiteaux de la nef ont été mutilés lors de l'installation de la chaire ; le chapiteau le plus travaillé présente des scènes figurées avec quadrupèdes, oiseaux et feuillages, tandis que d'autres corbeilles du chœur et de l'abside offrent des motifs de feuilles d'eau, d'astéries et de têtes humaines.
Le mobilier comprend devant l'autel majeur des restes de bas-reliefs en pierre — trois panneaux visibles aujourd'hui et un quatrième incrusté dans le mur nord de la chapelle Saint-Jean — liés au style des drapés daté par les spécialistes de la fin du XIVe siècle ou du début du XVe siècle ; ces panneaux représentent notamment saint Jean-Baptiste, une scène de crucifixion avec la Vierge et saint Jean, et saint Martin partageant son manteau, l'ensemble classé comme objet. Une autre sculpture de saint Martin, partielle, conservée au Musée d'Aquitaine, remonte au milieu du XVe siècle. Dans la chapelle nord dite Saint-Jean se trouvent un bas-relief de la crucifixion du XVe siècle, des statues du XVIIe siècle telles que saint Michel, sainte Catherine et saint Roch (ce dernier classé comme objet), ainsi qu'une cloche de 1738 classée. La chapelle sud dite Notre-Dame abrite une Vierge à l'Enfant du XVIIIe siècle classée, ainsi que des statues de saint Joseph et de sainte Thérèse.
La collection picturale comprend plusieurs toiles inscrites ou classées : un Christ aux liens lié à sainte Thérèse d'Avila, une peinture de Jean Mazoyer représentant saint François d'Assise et saint Bonaventure (1675), une Déploration copie d'Antoon van Dyck, une Vierge à l'Enfant copie d'un Van Dyck, un Ecce Homo d'après Guido Reni peint en 1873 et d'autres œuvres d'inspiration rubénienne ou mignardesque, certaines reprises aux inventaires du patrimoine. Les fonts baptismaux datent du XVIIe siècle et ont été déplacés dans le porche en 1974 ; l'orgue, attribué au facteur bordelais Nicolas Henry vers 1820, a été restauré en 1886 puis modifié en 2006 avec l'adjonction d'un clavier et inauguré en 2007 par Francis Chapelet.
À l'extérieur, l'abside primitive à sept pans a perdu quatre pans lors de l'adjonction des chapelles du transept ; les trois pans subsistants sont séparés verticalement par des contreforts plats et organisés en deux niveaux, un soubassement et un étage ajouré de fenêtres, le tout couronné par une corniche à modillons. Chaque baie axiale est encadrée de colonnettes à chapiteaux sculptés et d'archivoltes ornées d'astéries. La corniche est soutenue par une quinzaine de modillons, dont plusieurs figurés ; ces modillons représentent aussi bien des motifs géométriques que des figures animales, humaines ou grotesques, parmi lesquelles figurent un loup, des joueurs d'instruments, des personnages nus et des bossages. Le clocher carré, placé à l'angle sud-ouest, est essentiellement roman, percé de petites baies en plein cintre et muni d'un cadran solaire daté de 1654 ; l'appareil a été retaillé côté sud. La présence et la disparition de cloches durant la Révolution et les remplacements postérieurs sont attestées par les inscriptions et les fontes mentionnées dans les archives.
Sur le mur sud de la nef subsiste l'inscription au-dessus d'une ancienne porte percée en 1649, vestige d'un porche disparu, et l'emplacement d'une ancienne sacristie du XVIIe siècle détruite à la fin du XIXe siècle ; des vestiges de cadrans canoniaux y sont gravés et indiquaient les heures liturgiques. Le cimetière entourait l'église jusqu'en 1856 et l'enclos actuel correspond à cet ancien périmètre ; des fouilles préventives menées en 2013 ont révélé plusieurs phases d'occupation funéraire, la découverte de deux sarcophages mérovingiens et près de 250 sépultures médiévales à modernes. Enfin, lors des mêmes fouilles ont été mis au jour deux coffrages médiévaux reconstitués et présentés dans le porche, contenant les restes de deux adultes, l'un masculin et l'autre féminin.