Origine et histoire de l'Église Saint-Martin
L'église Saint-Martin-de-Vertou, située au Lion-d'Angers (Maine-et-Loire), associe une nef romane du XIe siècle, l'une des plus anciennes du département, à un chœur néogothique du XIXe siècle et conserve des peintures murales du début du XVIe siècle en lien avec le règne du roi René. Le prieuré et l'église semblent avoir été construits vers 1010-1030 ; l'édifice fut ensuite remis aux moines bénédictins de l'abbaye Saint-Aubin par le trésorier Guy, selon les sources, et un prieuré se développa contigu à la priorale. Des vestiges de cette époque subsistent, notamment les murs de la nef et la partie ouest du transept, tandis que le clocher oriental relève du XIIe siècle. Aux XVe et XIVe siècles, des baies gothiques furent percées dans le transept et une chapelle baptismale fut accolée au flanc sud de la nef ; les baies du transept ont été restaurées en 1976. Le chœur, déjà reconstruit en 1830, fut à nouveau refait en 1875-1876 selon les plans de l'architecte Duchoussay, avec l'adjonction d'un second transept doublant l'ancien, pour un coût d'environ 120 000 F. Le clocher a été réparé en 1885 ; sa flèche, foudroyée et détruite lors d'un incendie le 4 mai 1918, a été reconstruite en 1997. De belles peintures murales datées pour la plupart du XVIe siècle furent redécouvertes en 1852 lors de travaux ; une partie du programme mural a été endommagée et l'ancien chœur détruit en 1875 n'a pas fait l'objet de fouilles. Le logis prieural, situé au nord de l'église, subsiste mais, bien que daté apparemment du XVIIe siècle, il a été fortement remanié et peu étudié.
L'église est connue dès le XIe siècle sous le vocable de Martin de Vertou, auquel plusieurs paroisses anciennes de la région se réfèrent, et l'hypothèse d'une évangélisation ancienne par ce saint est mentionnée par les historiens locaux. Selon la tradition documentaire, l'acte de donation fut constaté par des personnages de l'époque et permit l'installation d'un prieuré dépendant de Saint-Aubin. Les combats des guerres de Religion, la Ligue, la Révolution et la guerre de Vendée n'ont apparemment pas laissé de traces majeures sur l'édifice.
Au XIXe siècle, l'augmentation de la population et le renouveau religieux entraînèrent d'importants travaux et aménagements : l'agrandissement du bâtiment, décidé dans les années 1850 et autorisé en juillet 1875 par l'évêque d'Angers, donna lieu à la réalisation du chœur néogothique, à la fourniture de mobilier liturgique de style néogothique par les ateliers Moisseron et à l'installation de deux orgues, l'un en tribune par les ateliers Cavaillé-Coll en 1883 et l'autre dans le chœur par Louis Debierre en 1893. L'orgue de tribune, offert par la vicomtesse de Trédern, compte 17 jeux sur deux claviers et pédalier et demeure en grande partie dans son état d'origine ; l'orgue de chœur comprend 14 jeux et son buffet s'harmonise avec les stalles réalisées par les mêmes ateliers. Une partie du mobilier néogothique a été démontée en 1966.
L'édifice présente un contraste marqué entre la nef romane en petit appareil de grès roussard et pierres porphyroïdes du XIe siècle et le chœur néogothique de 1875 en tuffeau et calcaire blanc. Orienté selon un axe légèrement incliné nord-ouest/sud-est, l'ensemble mesure environ 60 m de long et 25 m de large au niveau du chœur ; l'ancien prieuré reste contigu au transept nord. La nef se distingue par ses hauts murs dépourvus de contreforts, percés de petites baies en plein cintre et coiffés d'une charpente, et par un portail occidental sans tympanum surmonté d'une archivolte en claveaux de tuffeau aux joints ocres formant un décor géométrique. À l'extrémité orientale de la façade sud se dresse un clocher roman à base carrée ; contre cette façade la chapelle baptismale gothique et, du côté opposé, la grande verrière du transept sud datent du XIVe et XVe siècle.
Les campagnes de restauration ont été régulières : le clocher fut réparé en 1885, la partie romane a bénéficié d'interventions en 2004 et 2006, et la partie néogothique fit l'objet d'un chantier de rénovation de la couverture et des corniches entre 2013 et 2016. En mai 1980 l'église et ses peintures murales ont été classées au titre des monuments historiques, le chœur et les transepts néogothiques étant pour leur part inscrits ; la partie instrumentale de l'orgue de tribune a été classée en 1979.
Les vitraux, au nombre de vingt-deux, témoignent du renouveau du vitrail en Anjou au XIXe et début du XXe siècle : exécutés entre 1911 et 1920 d'après des cartons de René Victor Livache et de son fils Victor René, ils ont été réalisés par Thierry, Mercier, Clamens et les ateliers Livache père et fils ; les verrières du chœur et des chapelles sont de Livache père et l'une d'elles évoque Martin de Vertou, tandis que les verrières de la nef, dues au fils, représentent plusieurs saints.
Le programme monumental de peintures murales, redécouvert en 1852, regroupe des compositions pour l'essentiel du début du XVIe siècle : on y reconnaît notamment une représentation singulière de l'enfer figurée par un diable aux six visages, une grande figure de saint Christophe près de l'entrée, le portement de croix où l'humanité souffrante aide le Christ à porter sa croix, ainsi que des scènes de martyre, saint François recevant les stigmates et saint Gilles avec sa biche. Ces peintures, souvent altérées et partiellement masquées, ont été relevées au XIXe siècle par Diot et Livache, dont les documents servent de base aux restaurations. Une litre seigneuriale du XVIIe ou XVIIIe siècle ceint la nef et les transepts ; la principale porte le blason de la famille Girard de Chanarcé, seigneurs du Lion à partir de 1711, au-dessus de celles des Champagné et des Raccapé.
Le thème du portement de croix, fréquent en Anjou entre la fin du XVe et le début du XVIe siècle et présent dans plusieurs églises et chapelles de la région, est lié à un poème en vers attribué au roi René ; l'attribution fait l'objet de débats parmi les spécialistes, et un relevé copié par un moine de l'abbaye de Clairvaux est conservé à la bibliothèque de Troyes.