Origine et histoire de l'Église Saint-Nicolas
L’église Saint-Nicolas de Barfleur, édifice catholique implanté sur un promontoire à l’ouest de la commune de Barfleur (Manche, Normandie), est inscrite au titre des monuments historiques par arrêté du 21 octobre 1988. Elle se trouve à l’emplacement de sanctuaires plus anciens : une église romane dédiée à saint Nicolas, qui a succédé à un édifice antérieur détruit au VIIIe siècle lors des raids vikings ou en raison de la montée des eaux. Au cours du second millénaire, les droits sur la paroisse ont été disputés entre divers seigneurs et institutions ecclésiastiques, entraînant partages de dîmes et conflits de patronage. De cette église médiévale il ne subsiste rien ; ses pierres furent réemployées dans des maisons du bourg et des vestiges ont été signalés à proximité de l’emplacement actuel.
L’édifice a connu de nombreuses destructions : pillages et incendie en 1346 lors de la guerre de Cent Ans, puis nouvelles dévastations aux guerres de Religion, si bien que les offices furent tenus jusque vers 1599 dans la chapelle Saint‑Côme du couvent des Augustins. Après la construction d’un fort en 1592, démantelé quelques années plus tard, la reconstruction paroissiale fut décidée vers 1626 et conduite par étapes entre 1629 et 1695, sans parvenir alors à l’achèvement complet. Le chœur, commencé en 1637 par le curé Thomas Guiffard grâce aux matériaux du fort et aux libéralités de l’abbé du Vœu et de François de Matignon, devint la première partie achevée ; en 1649 furent élevées les piles de la tour et le mur du transept, et le clocher et le transept furent achevés en 1695. Faute de ressources la nef resta longtemps inachevée et l’arc triomphal fut obturé.
Vendue pendant la Révolution, l’église fut cependant défendue par les marins et pêcheurs de Barfleur qui demandèrent sa conservation comme édifice paroissial et comme amer. Sous l’impulsion de l’abbé Pierre‑Jean Anthouard, nommé en 1827 et finançant en partie les travaux, la nef fut enfin bâtie de 1839 à 1844, la chapelle axiale et la sacristie furent édifiées en 1853, marquant l’achèvement de la reconstruction entamée en 1637. L’église a reçu un ensemble de verrières par Charles Lorin en 1892, restaurées en 1980, et a fait l’objet de travaux de restauration de 1994 à 1997.
Bâtie en plusieurs campagnes, l’église, ramassée et entourée de son cimetière marin établi directement sur le roc, conserve comme parties les plus anciennes le chœur, les piles de la tour et les murs du transept datés de 1649, la tour et le transept étant définitivement clos en 1695. Un plan ancien visible à l’intérieur précise les étapes de construction : chœur, transept et tour aux XVIIe siècle, puis nef et chapelle axiale au XIXe siècle avec une façade néo‑romane. Quarante et une pierres à triglyphes, pour la plupart retaillées, ont été réemployées en guise de chapiteaux, vestiges du fort et de l’ancienne église.
La courte nef, aussi large que longue, présente trois arcades ouvrant sur des bas‑côtés en arc surbaissé, l’ensemble relevant du XIXe siècle ; l’éclairage provient de fenêtres au style roman dont les remplages incluent des motifs gothiques insérés ultérieurement, et les parties hautes portent des peintures au pochoir. Le chœur, de plan trapézoïdal délimité par cinq arcades, est pourvu d’un déambulatoire. La tour‑clocher, massive et carrée, était à l’origine couronnée d’une pyramide en ardoise ; son entretien ayant été jugé coûteux, on y a élevé au milieu du XVIIIe siècle une plate‑forme en granit dallée et entourée d’une balustrade. L’ensemble est couvert d’une toiture en schiste vert et les charpentes qui coiffent le chœur, les chapelles et la nef sont en bois à une époque récente.
Le mobilier conserve plusieurs pièces remarquables, dont sept objets classés au titre des monuments historiques : un tableau de la Visitation attribué à l’atelier de Maerten de Vos l’ancien (fin du XVIe siècle) et une Vierge de Pitié mutilée en chêne du XVIe siècle. De nombreuses statues occupent les chapelles et le chœur : une pietà dans le transept sud, des statues en bois peint représentant saint Pierre Nolasque, un marin captif et saint Victor datées des XVIIe‑XVIIIe siècles, ainsi que dans le chœur des statues de saint Romphaire et de saint Nicolas du XVIIIe siècle et une Vierge polychrome du XVe siècle. Sur un pilier de la tour, à la croisée du transept, se trouve un bas‑relief en bois stuqué peint du XVIIe siècle représentant saint Sébastien et saint Roch en pèlerin.
Un retable d’autel est signalé en 1761 et la chapelle axiale abrite un autel néo‑roman du XIXe siècle flanqué de la statue du bienheureux Nicolas Cléret, natif de Barfleur, mort en 1792 et béatifié en 1926. La nef contient un orgue de la fin du XIXe siècle et une chaire en chêne sculptée en 1761 par Guillaume Godefroy, dont les panneaux et l’abat‑voix sont richement ornés. Les fonts baptismaux en calcaire d’Yvetot‑Bocage, situés dans le transept nord, datent du milieu du XVIIIe siècle ; c’est là que fut baptisée Julie Postel, future sainte Marie‑Madeleine Postel. Parmi les ex‑voto et éléments mémoriels figurent une maquette de baleinier réalisée dans les années 1840 et un obit en ardoise provenant du couvent des Augustins.