Origine et histoire de l'Église Saint-Nicolas
L'église paroissiale Saint‑Nicolas de Tavant, en Indre‑et‑Loire, est un édifice roman dont la construction remonte à la fin du XIe ou au premier quart du XIIe siècle et qui est mentionné pour la première fois dans un texte de 1223. Sa dédicace à saint Nicolas s'inscrit dans le contexte du développement du culte de ce saint en Occident. L'édifice, d'influences limousines et berrichonnes, s'organise selon un plan en croix latine et s'ouvre à l'ouest par une large façade percée d'un portail en plein cintre à triple rouleau, décoré de cordes, pommes de pin et pointes de diamant, encadré par deux arcatures aveugles. La nef, initialement à trois vaisseaux voûtés en berceau sur cinq travées, a perdu ses bas‑côtés ; leurs ouvertures et les arrachements sont encore visibles et ont été consolidés par des contreforts. À la croisée du transept se trouve une coupole sur trompe à base carrée correspondant au clocher roman arasé, complété par un clocher octogonal postérieur coiffé d'ardoises et surmonté d'une girouette en forme de gabare. Le chœur, composé d'une travée et d'une abside en cul‑de‑four, a été surélevé d'environ un mètre, ce qui masque la base des colonnes et se révèle lors des travaux de dégagement de la crypte. La crypte occupe toute la surface du chœur et comprend trois travées et trois vaisseaux voûtés d'arêtes ; sa construction au milieu du XIIe siècle intervient après celle du chœur, comme l'atteste la reprise d'une base de colonne du chœur dans la maçonnerie d'un voûtain de la crypte. Des vestiges d'enduit peint sous la corniche du mur gouttereau nord et une photographie de 1894 montrant une peinture entre les modillons témoignent d'un décor extérieur dès l'époque médiévale. L'intérieur a connu plusieurs interventions : la charpente du chœur et la couverture en tuiles ont été refaites en 1826, la voûte de la nef restaurée en 1896 par l'architecte départemental Favreau, l'enduit à la chaux repris la même année avec un décor de faux joints à l'ocre, des fissures du chœur réparées en 1990 et une restauration de la crypte en avril 2012 visant à assainir les supports et raviver les couleurs. La commune a racheté l'absidiole nord en 1957 ; l'absidiole sud du transept et les bas‑côtés de la nef ont disparu à une date indéterminée. L'église est classée au titre des monuments historiques depuis le 7 mai 1908. Le décor peint, homogène et roman, est daté par consensus de la première moitié du XIIe siècle et se distingue particulièrement dans le chœur et la crypte. Dans le chœur, un cycle peint raconte l'Enfance du Christ : un Christ en majesté dans une mandorle entouré du tétramorphe et d'anges occupe le centre, tandis que les registres latéraux présentent l'Annonciation, la Visitation, la Nativité, des vestiges du Massacre des Innocents, ainsi que des fragments représentant l'annonce aux bergers et la fuite en Égypte ; le sommet de la voûte relie ces scènes par un motif d'ondulations et d'astres. Ces peintures, probablement masquées au XVIIe siècle, ont été redécouvertes sous un badigeon en 1945 ; la nef et le transept, autrefois peints, ont perdu leur décor, sauf quelques éléments géométriques. La crypte conserve un ensemble exceptionnel de peintures murales, sans trace certaine d'avoir été recouvertes, reproduites en grandeur nature en 1941 par Marthe Flandrin et Simone Flandrin‑Latron et présentées à la Cité de l'architecture et du patrimoine ; ces copies et la qualité des fresques ont également inspiré deux timbres postaux en 1997. Les peintures de la crypte, visibles au niveau des yeux du visiteur, offrent des scènes animées et variées : un Christ en majesté au fond, le roi David musicien, les supplices des apôtres Pierre et André, des saintes tenant un symbole arborescent à l'entrée, deux hommes portant une poutre, ainsi que des scènes innovantes comme la Vierge soutenant le corps du Christ, annonciatrice des pietà du XIVe siècle. Les colonnes et chapiteaux, parfois peints pour imiter des roches, présentent des motifs simples et non figuratifs pour la plupart ; quelques chapiteaux figurés montrent sirènes à deux queues, griffons, oiseaux affrontés buvant dans un vase, un monstre dévorant et, à un angle de la nef, la tentation d'Adam et Ève. Dans la crypte, les chapiteaux sont épannelés et polychromes ; seuls deux à l'entrée sont sculptés, l'un de rinceaux et palmettes, l'autre figuratif et apparemment inachevé. Le mobilier comprend un baptistère roman daté de la fin du XIe‑XIIe siècle et un gisant provenant du cimetière, identifié comme celui de Jehan Guydier, curé, dont l'épigraphie laisse une incertitude entre 1334 et 1534 pour la date de décès. La qualité et l'originalité des peintures de Tavant ont attiré l'attention des chercheurs et des critiques : Henri Focillon les mentionne en 1938 comme l'un des chefs‑d'œuvre de la peinture romane en France et André Malraux les intègre à son Musée imaginaire. L'ensemble de l'édifice, son décor peint et son mobilier témoignent de la riche histoire artistique et religieuse de Tavant et justifient l'intérêt porté à la conservation de ce patrimoine.