Origine et histoire de l'Église Saint-Pierre-aux-Liens
L'église Saint-Pierre-aux-Liens de Six-Fours-les-Plages (Var) est une ancienne collégiale, classée au titre des monuments historiques en 1840. Elle constitue le seul édifice restant de l'ancien village de Six-Fours, abandonné lorsque l'autorité militaire fit raser le site pour y construire un fort, dont les travaux commencèrent en février 1874 et s'achevèrent en 1879. L'édifice réunit une partie romane orientée est-ouest et une construction néo-gothique orientée nord-sud, greffée au XVIIe siècle sur l'ancienne église. Depuis 2006, la paroisse est confiée aux pères serviteurs de Jésus-Sauveur, assistés des sœurs du même institut.
La partie romane, au sud de l'édifice actuel, date du XIIe siècle ; derrière sa façade ouest se trouve une citerne destinée à recueillir les eaux pluviales, le site étant dépourvu de source, et il ne s'agit pas d'un sanctuaire primitif du Ve siècle. Cette section mesure 25 m de long sur 15,90 m de large ; elle est construite en petit appareil régulier en calcaire d'Évenos, avec une nef de 6,30 m de large voûtée en berceau plein cintre et un chevet plat ; l'entrée principale au sud ouvre sous la tribune qui supporte l'orgue. La chapelle Sainte-Catherine, ancien collatéral droit et dite aussi chapelle de l'Enfant Jésus, abrite un autel primitif et une pierre aux armes de Jean Denans, notaire royal à Six-Fours de 1660 à 1714 et auteur d'un manuscrit conservé aux archives départementales du Var. La chapelle Sainte-Madeleine, ancien collatéral nord, possède un autel identique surmonté d'une statue de sainte Madeleine agenouillée.
Dans le sous-sol du chœur, des fouilles menées en 1965 ont mis au jour un mur semi-circulaire interprété initialement comme une abside primitive du Ve siècle, interprétation aujourd'hui rejetée par les archéologues qui y voient une semelle de fondation liée à la pente du terrain. On y observe également un autel monolithique en calcaire bleu de 2,08 m sur 0,96 m sur 0,20 m, posé sur un bloc de 1,50 m de haut et pesant 1 250 kg ; son attribution au Ve siècle reste sans preuve. Une statue en bois de saint Paul datée du XVIe siècle occupe une fenêtre obstruée du chevet et, de part et d'autre de l'autel, deux alvéoles recevaient autrefois le pain et le vin et la sainte eucharistie pour les absents.
À l'extrémité ouest de la nef romane, la chapelle Sainte-Philomène contient un bassin circulaire reconstitué par François Jouglas dont la margelle associe deux calcaires différents, ce qui rend douteuse son interprétation comme vestige de baptistère. Sur le mur ouest est exposé un polyptyque de Ludovico Brea, classé monument historique et exécuté entre 1520 et 1523 pour l'ancienne église de Saint-Jean-des-Cottes ; cet ensemble de deux rangées de cinq panneaux représente divers saints et la Vierge à l'Enfant au centre, ce dernier tenant un chardonneret.
À la fin du XVe siècle la population croissante rendit l'église romane insuffisante et la communauté fit réaliser un agrandissement selon le projet de l'architecte marseillais Guillaume Borelli : la nouvelle église, encastrée dans l'ancienne et nécessitant la destruction du collatéral nord, fut engagée avec la pose de la première pierre en 1608 et la célébration de la première messe le 10 mars 1614. L'édifice fut consacré le 5 juin 1634 par l'évêque de Toulon, Monseigneur Auguste de Forbin ; par la suite, par délibération du 19 novembre 1648 et acte du 24 janvier 1650, il fut érigé en collégiale, comprenant un collège de onze chanoines et un doyen, avec l'installation d'un ensemble de soixante stalles et d'orgues au-dessus de la porte d'entrée.
La partie gothique, construite perpendiculairement à l'édifice roman, développe une nef unique de 9 m de large en quatre travées voûtées sur croisées d'ogives, flanquée de chapelles latérales et achevée par un chevet pentagonal renforcé par des contreforts d'angle. Cette église gothique mesure 37,5 m de long sur 21 m de large et atteint 14,50 m de hauteur ; elle a été réalisée en schistes locaux, tandis que les piliers sont en calcaire rose du cap Couronne. La nef, orientée nord-sud, se termine par une abside semi-octogonale abritant le maître-autel en marbre blanc de la fin du XIXe siècle ; derrière lui se dresse un retable en bois sculpté, polychrome et doré, réalisé en 1628 par Laurent Lieutaud et Bouchoni et encadrant un tableau de Guillaume-Ernest Grève de 1628 représentant Jésus remettant les clefs à saint Pierre. Sous l'autel, deux caveaux contiennent les restes des prêtres et chanoines, et des stalles en noyer datées de 1656, classées monument historique, bordent le chœur.
À l'est se succèdent les chapelles des Carmes, de Saint-Clair et du Purgatoire : la chapelle des Carmes présente un retable du XVIIIe siècle et une peinture de la Vierge de l'Assomption par Vincent Féraud, copie d'une œuvre de Murillo, ainsi qu'une gloire en bois polychrome du XVIIe siècle et une statue en marbre classée ; la chapelle de Saint-Clair conserve un tabernacle doré de 1719 par Imbert de Toulon et un retable portant un tableau du XVIIe siècle représentant un évêque entouré de deux saints, tandis que la chapelle du Purgatoire possède un retable de 1628 de Laurent Lieutaud encadrant la toile de Grève (1626) sur les âmes du purgatoire, une prédelle à cinq scènes classée et plusieurs bustes et reliques ; quatre dalles donnent accès à des caveaux, l'une ayant été remplacée par une vitre permettant la visibilité des cercueils et ossements.
À l'ouest se trouvent les chapelles consacrées à saint Joseph, au Rosaire et à sainte Anne : la chapelle Saint-Joseph abrite un retable à colonnes torsadées encadrant une Sainte Famille, un reliquaire de saint Louis d'Anjou et une toile de sainte Cécile de la fin du XVIIe siècle ; la chapelle du Rosaire contient la Madone du Rosaire, tableau anonyme classé monument historique et orné de quinze médaillons illustrant les mystères du rosaire, ainsi qu'une Descente de Croix de François Van Der Stella classée monument historique ; enfin, les chapelles de sainte Anne et alentour présentent des tableaux du XVIIIe siècle, une Nativité classée et des bustes reliquaires de sainte Anne et saint Honorat.
Lors de la restauration générale de l'église, la réalisation des vitraux a été confiée en 2014 à l'artiste Adrian Schiess ; ces verrières contemporaines, exécutées par l'atelier du maître verrier Carlo Roccella, ont été conçues avec des verres soufflés fabriqués spécialement et posés sur des armatures métalliques inox découpées au laser.