Origine et histoire de l'Église Saint-Pierre
L’église Saint-Pierre de Champagne (Ardèche) est une abbatiale catholique qui remplit aujourd’hui aussi les fonctions d’église paroissiale, accueillant baptêmes, mariages et funérailles. Classée au titre des monuments historiques en 1862, elle se situe sur la commune de Champagne, en région Auvergne-Rhône-Alpes.
Les origines de l’édifice restent obscures, mais plusieurs documents médiévaux témoignent de son existence et de ses dépendances ecclésiastiques : une charte liée à l’abbaye de Cluny mentionnée par Noël Thiollier, une bulle du pape Urbain II de 1088 et des bulles de Calixte II (1119 et 1120) ainsi qu’une confirmation d’Adrien IV en 1157. Ces textes montrent l’attachement de Champagne à l’archevêché de Vienne et laissent supposer, selon les historiens, des tentatives d’usurpation féodale aux XIIe siècle. En 1214 l’église devient un prieuré dépendant de l’abbaye de Saint-Chef, lors d’un acte par lequel le comte Guigues VII cède ou restitue certains droits seigneuriaux au prieur Aynard.
La construction de l’église actuelle fait l’objet d’attributions divergentes : Noël Thiollier y voit une œuvre des comtes d’Albon, R. Arnaud l’attribue à Guy de Bourgogne, futur pape Calixte II, et d’autres spécialistes la situent au milieu du XIIe siècle. L’édifice aurait remplacé une église du XIe siècle, dont des chapiteaux à palmettes ont été remployés, et la découverte en 1972 d’une tombe datée de la seconde moitié du XIe siècle suggère la présence d’un fondateur contemporain. Les historiens de l’art notent des ressemblances entre le chevet de Champagne et celui de l’abbatiale de Saint-Chef : le plan, apparu vers 1130 et diffusé dans la seconde moitié du XIIe siècle, se traduit ici par un chevet muni d’un déambulatoire sans chapelles rayonnantes, des extrémités de transept pourvues de chapelles hautes au-dessus d’absidioles et prolongées par des tours rectangulaires.
Une particularité remarquable est le couvrement de la nef par des coupoles sur trompes ; selon Thiollier, trois églises en France présentent ce dispositif (Le Puy, Saint-Hilaire de Poitiers et Champagne), et à Champagne une coupole recouvre exceptionnellement deux travées. La façade occidentale était précédée jusqu’en 1848 par un haut porche-tour de plan carré dont la trace reste visible ; sa partie haute aurait été démolie en 1749.
Au début du XIVe siècle, par deux bulles de Jean XXII (1320 et 1328), le prieuré de Champagne revient sous l’autorité de l’archevêque de Vienne, devient paroissial en 1328 et voit s’ériger à cette époque le fort du prieuré avec une enceinte englobant l’église et les bâtiments claustraux. L’histoire démographique et militaire de la paroisse est marquée par la pauvreté signalée en 1437 et par les dévastations des XVe et XVIe siècles, notamment le passage des Routiers et les destructions liées aux guerres de religion qui entraînèrent la démolition partielle des tours, l’effondrement des voûtes de la nef et l’iconoclasme du portail. Des travaux importants au XVIIe siècle ont reconstruit les coupoles de la nef et remplacé la voûte romane en berceau, mais l’édifice a connu une dégradation au XVIIIe siècle.
Une restauration menée entre 1888 et 1894 a supprimé les adjonctions postérieures à l’époque romane et a repris les parements extérieurs endommagés. À l’oratoire et au chœur, plusieurs éléments liturgiques créés en 2000 par l’artiste Goudji — le siège de présidence, la Croix du Christ, l’ambon, l’autel et le tabernacle — ont été installés lors du passage au troisième millénaire.
Sur le plan pastoral, la paroisse a longtemps été confiée à un curé unique, parfois absent entre 1954 et 1968 en raison de la crise des vocations ; depuis 1976 les abbés sont choisis parmi les chanoines réguliers de saint Augustin. À partir de 1994, une équipe de « curés in solidum », composée de chanoines réguliers, a assuré la responsabilité de plusieurs paroisses, et depuis 2003 la communauté de Champagne dépend de la paroisse « Sainte-Croix du Rhône », administrée par une équipe pastorale mixte de laïcs en mission et de prêtres chanoines réguliers.