Origine et histoire de l'Église Saint-Pierre
L'église Saint-Pierre de Chaunay (Vienne) repose sur la voie romaine reliant Rome à Périgueux. Le plan primitif, daté du XIIe siècle, comportait une nef unique, deux bras de transept et un chœur à abside ; de l'époque romane subsistent aujourd'hui la nef et quelques éléments de la croisée du transept, ainsi qu'une porte et une baie sur l'élévation nord. L'édifice présente actuellement un plan rectangulaire sans transept et un chevet plat ; la nef compte deux travées voûtées en berceau et le chœur trois travées voûtées sur croisées d'ogives. Une chapelle, accolée au nord du sanctuaire, reprend dans sa première travée l'emplacement de l'ancien bras de transept ; ses deux travées sont également voûtées d'ogives. Côté ouest, le portail à trois voussures est surmonté d'une corniche à modillons ; la tour-clocher, de plan polygonal, s'élève à l'emplacement de la croisée des transepts. Les éléments gothiques sont datés du début du XVIe siècle et d'importants travaux de restauration ont été menés aux XVIIIe et XIXe siècles.
La présence de sépultures et de sarcophages autour de l'église évoque une occupation mérovingienne et suggère l'existence d'un cimetière ancien. Selon les auteurs cités, Chaunay était déjà un centre religieux au Ve siècle et la paroisse aurait pu constituer un archiprêtré dès le VIIe siècle. Au milieu du XIe siècle, deux églises relevaient du domaine de Coloniacus et de l'abbaye de Nouaillé ; elles formaient une seule paroisse sous le même patronage, Saint-Pierre, mais l'église située au centre du domaine, proche des voies de communication, paraît avoir été la principale. Chaunay devint le siège d'un archiprêtré avant 1175, date à laquelle un certain Willelmus est mentionné comme archiprésbiter.
L'édifice primitif fut progressivement détruit et une église romane fut reconstruite dans la seconde moitié du XIe siècle ou à la fin du XIIe siècle selon les avis ; il n'en subsisterait aujourd'hui que la nef, quelques pilastres supportant le clocher et la façade ouest. À l'origine l'église avait la forme d'une croix latine avec une tour à la croisée ; un souterrain s'ouvre au sud, tout contre le pilier du clocher, et a servi de refuge, notamment lors des périodes troublées. Un architecte-sculpteur nommé Jean a travaillé sur l'église au XIIIe siècle.
La collation de la cure fit longtemps l'objet d'un litige entre l'abbé de Nouaillé et l'évêque de Poitiers ; une sentence de 1319 reconnut le droit de l'abbé, mais la collation revint ensuite à l'évêque. Durant la guerre de Cent Ans l'église subit de graves dommages : les troupes anglaises sont signalées dans la région en 1356 et, vers 1357, une partie de la population se réfugia dans l'église assiégée lors du siège du château de Tassay ; le chœur, les voûtes et le clocher furent alors ruinés. Dans les années 1390 les combats entraînèrent la destruction du chœur et l'effondrement du clocher, de sorte qu'il ne restait guère que la nef et le bras sud du transept.
Après le départ des Anglais, la reconstruction fut entreprise par la famille Jousserand, seigneurs de Tassay : Guichard (ou Jacques) Jousserand fit réparer et agrandir l'église, travaux poursuivis au début du XVIe siècle, et le chœur reconstruit vers 1507 porte une clé de voûte aux armes des Jousserand avec une inscription datée de 1507. Une transaction vers 1504 permit d'allonger et d'élargir l'édifice et d'ouvrir la grande fenêtre de façade. Des contestations relatives à la chapelle Notre-Dame, accolée à la nef côté nord, opposèrent encore des seigneurs locaux au moment de ces travaux.
Aux XVIe, XVIIIe et XIXe siècles des interventions modifièrent l'édifice : des contreforts furent renforcés et un pavage posé au XVIIIe siècle, un projet d'embellissement intérieur fut confié au XIXe siècle à l'architecte Jean-Baptiste Perlat, et la voûte de la nef fut restaurée en 1876. Le 28 avril 1878 trois cloches réalisées par le fondeur Georges Bollée furent installées et bénites. À partir de 2009 la commune a engagé une vaste restauration avec le soutien de la Fondation du Patrimoine ; la toiture du chœur et la charpente ont été notamment remises en état, la couverture du clocher a été refaite en ardoises de type « Manoir », et une campagne de restauration des façades a été programmée pour 2012-2013. L'édifice est inscrit au titre des monuments historiques en 1987.
L'ensemble illustre l'évolution d'un bâtiment roman du sud de la Vienne transformé aux XVe et XVIe siècles et restauré aux XVIIIe et XIXe siècles : la silhouette conserve des traits romans — nef unique, puissants contreforts d'angle, façade triangulaire et portail décoré de modillons — tandis que le chœur et le chevet relèvent du gothique flamboyant. La chapelle Notre-Dame, voûtée en ogives avec arceaux moulurés, témoigne des aménagements postérieurs et des interventions des familles seigneuriales locales.