Origine et histoire de l'Église Saint-Pierre
L'église Saint-Pierre de Loupiac (Gironde) se situe au sud-est du village, au nord de la route départementale D10E8, entre Cadillac et Sainte-Croix-du-Mont. D'époque romane, apparentée à la fin du XIe ou au début du XIIe siècle, elle présente un plan en croix latine avec une nef sans bas-côtés, un transept et trois chapelles semi-circulaires formant des absides voûtées en cul-de-four. La façade occidentale s'articule autour d'un avant-corps : une large porte en plein cintre, aux archivoltes ornées d'entrelacs et de dents de scie, retombe de chaque côté sur quatre colonnes à chapiteaux foliacés. Au-dessus, un bandeau supporte trois arcades portées par des colonnes sculptées et surmontées d'un grand bas-relief frémissant en trois thèmes : Adam et Ève au pied de l'arbre, le Christ en majesté entouré de onze disciples, et l'Agneau mystique entre deux anges. Une corniche à têtes de clou et un fronton triangulaire percé d'une baie plein cintre couronnent la façade, qui conserve l'essentiel du décor roman. Le chœur, élevé de cinq marches au-dessus du sol de la nef, est séparé du transept par un grand arc doubleau reposant sur des colonnes accouplées ; les murs latéraux de l'abside centrale portent une arcade ornée d'un bandeau sculpté d'entrelacs, de feuillages, d'oiseaux et de figures humaines. Un bas-côté nord a été ajouté au XVIIIe siècle et des remaniements ont été réalisés après un incendie. À l'origine, le clocher central était un pignon ajouré élevé sur un arc ; lors des guerres de Religion il fut transformé en tour carrée à vocation défensive. Au XVIe siècle la nef fut flanquée d'une tour carrée au sud, puis l'édifice a subi d'importantes interventions au XIXe siècle : des travaux menés autour de 1843–1845 sous la direction de l'architecte Girard d'après un projet de Michel Henri Duphot, puis une restauration conduite entre 1850 et 1859 par Paul Abadie, qui a notamment abattu le bas-côté pour restituer le plan supposé primitif, reconstruit les absidioles, ajouté un transept, élevé et voûté la nef et édifié un nouveau clocher. La façade, le chevet et l'essentiel du décor roman ont toutefois été préservés, tandis que le reste de l'édifice prend un caractère néo-gothique lié aux transformations du XIXe siècle. Le portail actuel n'est pas entièrement authentique : Paul Abadie a remplacé les sculptures des chapiteaux et des voussures, un seul chapiteau nord ayant été conservé comme témoin. L'iconographie sculptée de la façade et du chevet est riche et pédagogique : la frise du haut résume le Salut, la corniche repose sur dix-huit modillons dont treize figurés représentant tour à tour vices et exemples moraux (ivresse, colère, tentation charnelle, prière, avarice, diverses figures démoniaques et symboles liés au péché). Les chapiteaux et corbeilles offrent une variété de sujets : musiciens, monstres régurgitant des rinceaux, l'Agneau et le tétramorphe, une scène morale opposant un saint et un « eschacier » unijambiste, des oiseaux entourant une pigne de pin et une scène de danse centrée sur une acrobatie devant des spectateurs richement vêtus. Le chevet pentagonal est presque intact et présente une corniche ornée de cavets, dents de scie, chapiteaux, modillons figurés et métopes à rais cerclés ; la qualité des sculptures varie, signe probable de l'intervention de plusieurs ateliers. Certains chapiteaux historiés sont érodés et difficiles à interpréter, mais évoquent des thèmes symboliques liés au Paradis perdu, aux péchés et à la morale chrétienne. Les reliefs supérieurs et plusieurs panneaux sont inscrits à l'inventaire général du patrimoine culturel. L'église Saint-Pierre a été classée au titre des monuments historiques par arrêté de 1840.
