Origine et histoire de l'Église Saint-Pierre
L'église Saint-Pierre de Martres, en Gironde, se situe au cœur du bourg, à proximité de la route départementale D119. L'édifice, d'origine romane, date du XIIe siècle ; il a été remanié aux XIVe et fortifié au XVIe siècle, puis réparé aux XVIIIe et XIXe siècles. Le plan comprend une nef unique non voûtée et lambrissée, un chœur de plan carré et une abside semi-circulaire voûtés, éclairée par une petite baie axiale. La façade ouest présente un portail roman muni de colonnettes à chapiteaux historiés et surmonté d'un clocher-mur percé de deux baies. L'ensemble est bâti en pierres de taille ; certaines pierres du mur sud portent des marques de tâcherons. Une partie du mur nord a été refaite et le bâtiment est flanqué d'une série de contreforts plats, plus saillants au nord qu'au sud. Les remaniements extérieurs liés aux guerres de Religion comprennent la construction, sans doute au XVIe siècle, d'une échauguette sur le flanc nord, partiellement appuyée sur un contrefort et pourvue de trous de visée pour armes à feu. Sur le flanc sud, une petite porte ouverte au XVe siècle est surmontée d'une bretèche servant d'assommoir et d'emplacement de tir ; cette porte, remaniée au XVIIIe siècle, porte le monogramme IHS. À l'intérieur, la nef est dépourvue d'ornementation et deux autels latéraux ont été installés à l'extrémité orientale ; le chevet est couvert par une voûte surhaussée reposant sur un arc triomphal en anse de panier. Les sculptures romanes, attribuées à un atelier actif au milieu du XIIe siècle et inspiré notamment par l'abbaye de Saint-Ferme, ornent le portail et le sanctuaire. Le portail s'ouvre dans un avant-corps à quatre voussures ; trois d'entre elles reposent sur des colonnettes modernes dont les chapiteaux portent un tailloir et une frise continue de billettes. Parmi les six chapiteaux du portail, quatre sont d'époque romane et historiés ; trois d'entre eux sont encore identifiables : le chapiteau nord montre deux grands félins squelettiques accolés, l'un des chapiteaux sud représente des oiseaux buvant à un calice eucharistique et le second illustre la fuite en Égypte avec la Vierge à l'âne. Sous la corniche du chevet, les modillons présentent des têtes de loup ou de monstre et des motifs géométriques, sans grande leçon moralisatrice explicite. Les chapiteaux du sanctuaire offrent des scènes plus narratives et symboliques : le premier chapiteau nord évoque la vocation des premiers disciples par une embarcation et des rameurs, avec la présence d'un personnage auréolé, tandis qu'un lion et un oiseau figurent en arrière-plan ; ce type de composition renvoie aux évangiles et trouve un parallèle à l'église Saint-Sulpice de Daubèze. Le second chapiteau nord représente deux dogues déchirant une tête humaine sur la face visible des fidèles, et, sur la face cachée, un rapace fondant sur un lièvre, image allégorique de la lutte contre la luxure. Le chapiteau sud 1 montre deux lions affrontés séparés par un entrelacs central. Le chapiteau sud 2 illustre la condamnation des « hommes invertis » : deux figures accroupies ont la tête en proie à un lion et tiennent des becs de rapace ; la présence d'un médaillon dorsal associe cette scène, dans l'iconographie romane locale, à une dénonciation de l'homosexualité. L'édifice est inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 21 novembre 1925.