Origine et histoire de l'Église Saint-Pierre-ès-Liens
L’église Saint-Pierre-ès-Liens, autrefois dite Saint-Pierre de Margerie, est un édifice roman de Colonzelle (Drôme) implanté le long de la D231, entre le village et le hameau de Margerie. Le site présente une valeur archéologique notable, avec une occupation quasi-continue de la préhistoire au XVIe siècle et des vestiges d’un établissement agricole autour de l’église. L’église dépendait d’un prieuré clunisien rattaché au prieuré de Saint-Saturnin-du-Port (actuel Pont-Saint-Esprit) ; la mention d’un doyen apparaît en 1146 et les noms des doyens et prieurs sont mieux connus à partir du milieu du XIIIe siècle. Le fief de Colonzelle, dont le doyen était seigneur spirituel et temporel, fut l’objet de revendications dès la fin du XIIIe siècle et passa aux mains du seigneur de Grignan avec l’arrivée d’Adhémar de Grignan ; le prieuré régulier a été sécularisé au début du XIVe siècle et placé sous l’autorité de l’évêque de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Les fouilles du XIXe siècle, confirmées par des prospections et sondages au XXe siècle, ont montré une occupation ininterrompue du haut-Empire jusqu’au VIIe-VIIIe siècle, période d’une nécropole paléochrétienne et de la construction d’une première église à fonction funéraire. Des sépultures en sarcophages attestent ensuite la présence d’une église paroissiale associée à un cimetière du VIIIe au XIIIe siècle. Au milieu ou dans le troisième quart du XIIe siècle, l’église ancienne fut arasée et reconstruite sur le même plan, vraisemblablement en deux campagnes, ce qui explique entre autres qu’un contrefort méridional masque partiellement l’ancienne porte sud aujourd’hui murée. L’édifice actuel se compose d’une nef unique de deux travées et d’un chœur cantonné d’une petite travée droite suivi d’une abside semi-circulaire ; l’accès principal se faisait par l’ouest, où subsistent des traces de porche. L’édifice est bâti en moellons, la pierre de taille étant réservée aux contreforts, aux encadrements des ouvertures et aux chaînages d’angle ; la couverture est en tuiles romaines. Le chœur conserve un décor peint de grande importance, organisé en registres superposés et comprenant notamment les Apôtres, le Christ apparaissant à Madeleine, Daniel dans la fosse aux lions, l’Adoration des Mages et le Christ en majesté ; ces peintures, réalisées au XIVe siècle, étaient recouvertes au XIXe siècle. Le principal intérêt sculpté se concentre sur la porte méridionale et la fenêtre la surmontant : le linteau de la porte est un remploi provenant d’un monument funéraire antique et porte un bas-relief fragmentaire représentant une embarcation et des personnages ; le tympan primitif est aujourd’hui disparu. L’arc de la porte et l’archivolte de la fenêtre présentent des motifs gravés (animaux, décors floraux) et de nombreuses marques de tâcheron, que l’on retrouve aussi sur les contreforts. Au fil du temps, divers aménagements et dommages sont intervenus : un porche voûté, probablement ajouté au XVIIe siècle, s’est effondré au siècle dernier, le linteau du portail ouest a été remplacé par un autre daté de 1835, et le tympan sud orné d’animaux en relief a été volé vers 1980. La toiture a été refaite en 1974 et des tirants ont été posés pour consolider la poussée des voûtes. L’église a été inscrite au titre des monuments historiques en 1926, puis classée le 9 novembre 2009.