Origine et histoire de l'Église Saint-Porchaire
L’église Saint-Porchaire, dédiée à saint Porchaire, se situe dans le centre historique de Poitiers, dans le département de la Vienne, rue Gambetta, voie piétonne et commerçante. La tour, datée du quatrième quart du XIe siècle et du XIIe siècle, et la nef du XVIe siècle sont inscrites au titre des monuments historiques. L’origine du culte remonte à Porchaire, abbé de Saint-Hilaire-le-Grand, dont le corps fut d’abord déposé à Saint-Sauveur; à la fin du IXe siècle, Thibaut, trésorier de Saint-Hilaire, fit édifier un sanctuaire près du palais et y transféra les reliques, suscitant la dévotion. En 1068, l’édifice fut rattaché à l’abbaye de Bourgueil et, au cœur d’un quartier marchand, le prieuré Saint-Porchaire jouxte l’un des principaux cimetières de la ville. De l’église carolingienne subsistent la façade occidentale, aujourd’hui encadrée par le clocher-porche du XIe siècle et la nef du XVIe siècle, ainsi qu’une petite crypte inaccessible. En 1431, la cloche de l’Université fut installée dans le clocher pour annoncer les assemblées universitaires et s’y trouve toujours. À la fin du XVe siècle, l’église menaçant ruine, la paroisse entreprit la construction d’un nouvel édifice dont les travaux commencèrent en février 1509 et s’achevèrent en 1520; la nouvelle nef, plus large mais moins longue, inclut des chapelles latérales ajoutées au milieu du XVIe siècle, qui ont livré des fresques redécouvertes en 1951 mais aujourd’hui illisibles. En 1702, saint Louis-Marie Grignion de Montfort rencontra Marie-Louise Trichet dans le confessionnal de cette église, et en 1710 le prieuré fut rattaché au petit séminaire Saint-Charles tout en conservant sa fonction paroissiale. Pendant la Révolution, l’église servit au culte décadaire, puis retrouva sa mission paroissiale sous le Concordat en 1802. En 1843, un projet municipal de démolition du clocher pour élargir la rue fut annulé après l’intervention d’antiquaires et une ordonnance du 4 juin 1843; le clocher-porche fut classé monuments historiques en 1846 grâce à l’appui de Prosper Mérimée, la nef l’étant en 1908. D’importants travaux de consolidation et de restauration du clocher-porche ont été menés de mars 2011 à juin 2012, comprenant la pose de chaînages en armatures de fibre de verre noyées dans un mortier époxy, la dépose et la repose de l’escalier en vis, le nettoyage et la réparation des parements par micro-gommage, micro-abrasion et laser, le remplacement de pierres très altérées, le rejointoiement à la chaux, la pose de protections en plomb sur les corniches, la rénovation des abat-sons et la consolidation du beffroi. L’entrée du porche a été remise en valeur pour l’accessibilité, avec reprise totale du dallage au rez-de-chaussée, refonte des enduits, installation d’un nouveau tambour conforme aux règles de sécurité et mise en place d’un éclairage fonctionnel et de mise en valeur. Le clocher-porche, bordé de maisons et en saillie sur la voie piétonne, est un chef-d’œuvre d’arcatures et d’arcades qui signale le sanctuaire dans la ville; il présente un plan carré de 24 mètres répartis sur trois niveaux, des contreforts plats et des demi-colonnes, ainsi qu’un riche décor de chapiteaux sculptés représentant lions stylisés, un calice où s’abreuvent des oiseaux et la scène de Daniel parmi les lions. Le rez-de-chaussée forme un portail à deux voussures, surmonté d’un relief figurant un Christ en gloire; le niveau médian, percé de baies étroites encadrées d’arcatures géminées, éclaire une salle qui a pu servir de chapelle; le troisième niveau, ouvert par des couples de baies à colonnettes, abrite la chambre des cloches et son beffroi en charpente, conçu pour supporter et absorber les vibrations des cloches, et des trompes d’angles indiquent qu’une flèche était prévue. L’accès excentré depuis le porche mène à une double nef gothique, résultat de la reconstruction réalisée entre 1508 et 1520 : la nef, tronquée à l’est et élargie en reportant le mur sud, s’organise en deux vaisseaux séparés par trois piles cylindriques prolongées par des nervures prismatiques qui rayonnent en voûtes évoquant un palmier ou un parapluie. Six chapelles latérales sont ménagées dans l’épaisseur des murs et le chevet, plat et formant un double chœur, est éclairé par des baies à remplage flamboyant; la double nef peut s’expliquer par la double affectation prieurale et paroissiale, dans la lignée d’exemples comme l’église des Jacobins de Toulouse. Sous le porche se voit une pierre tombale du XVIe siècle attribuée à Macé, échevin et instigateur d’une halle aux poissons, ornée d’un personnage et d’écus à poissons; sur les murs des nefs subsistent des traces du décor peint du XVIe siècle représentant les apôtres, découvertes en 1951 mais aujourd’hui devenues illisibles. Les vitraux du chevet, réalisés par Henri Carot en 1912-1913, représentent l’apparition du Christ à Marie-Madeleine et la Nativité et adoptent un traitement de style Renaissance pour harmoniser décor et architecture; les vitraux des nefs, datés des années 1950, sont l’œuvre de l’atelier de Francis Chigot. Chaque chœur possède un retable : au nord, un retable baroque de 1680 richement orné provenant de Lhommaizé et montrant le Christ sur la porte du tabernacle entouré des quatre évangélistes et de deux anges; au sud, un retable plus sobre surmonté d’une statue de la Vierge à l’Enfant du XVIIIe siècle. Le reliquaire en pierre de saint Porchaire, en forme de sarcophage et restauré, semble remonter à la translation des reliques dans une nouvelle église au Xe siècle; sorti de la crypte en 1951, il fut placé au centre du chœur et porte l’inscription latine « In hoc tumulo requiescit scs Porcharius ». Le mobilier comprend une Vierge à l’Enfant en bois polychrome du XVIIe siècle provenant de l’ancienne église Saint-Didier, un lutrin du XVIIIe siècle, une table de communion de style Louis XV, une chaire adossée au mur nord du XVIIe siècle et un Christ en bois du XVIIIe siècle; la nef abrite aussi des statues de la Vierge, de sainte Thérèse de Lisieux, de sainte Radegonde de Poitiers, de saint Hilaire et de saint Porchaire. Le beffroi supporte trois cloches, dont Anne, fondue en 1451 et commandée par la ville pour l’Université de Poitiers ; incapables de la loger, les responsables universitaires la placèrent dans le clocher de Saint-Porchaire où elle devait rester, en contrepartie de son entretien. Anne porte les blasons de la ville et du recteur, une inscription en lettres gothiques, et est classée au titre des Monuments historiques depuis 1905. Les autres cloches datent de 1771, avec une invocation à saint Michel et une fonction de protection contre l’orage, et de 1805, dite Marie, partiellement fondue avec le métal du bourdon Balthazar provenant du Gros-Horlorge; l’ensemble a fait l’objet d’une restauration par l’atelier Bodet qui a renforcé et nettoyé le bronze, conservé les jougs et ferrures d’origine pour partie restaurés au XIXe siècle, refait à l’identique le battant d’Anne, modernisé les systèmes électriques et accordé les cloches pour retrouver leur harmonie d’origine, Anne retrouvant aussi son système de sonnerie à la corde.