Origine et histoire de l'Église Saint-Sulpice
L'église Saint-Sulpice de Fougères, située au pied du château dans le quartier médiéval des tanneurs en Ille-et-Vilaine, fut la première église paroissiale de la ville et présente une masse irrégulière résultant de quatre siècles de construction. Fondée au XIe siècle, elle a été largement reconstruite à partir du XVe siècle : la nef, d'inspiration gothique flamboyant, fut remaniée progressivement, tandis que le chœur, commencé au XVIe siècle, ne fut achevé qu'en 1760. L'édifice se dresse entre les douves du château et l'ancien cours du Nançon, dans l'enclos Étienne de Fougères, ancien cimetière, et la paroisse accueille encore le culte catholique, avec une messe le samedi à 11h et des confessions de 10h à 11h. La fondation de la paroisse est liée à l'essor de la ville autour du château ; les seigneurs favorisèrent l'implantation de l'église sous le patronage de Sulpice Sévère et permirent l'installation d'un prieuré dépendant de l'abbaye de Marmoutiers, dont l'abbé présenta la cure pendant l'Ancien Régime. La construction actuelle, étalée de 1380 à 1760, résulte d'une série d'agrandissements et de remplacements successifs : chapelles latérales, clocher d'angle et pignons occidentaux furent ajoutés autour d'une nef initiale, tandis que le chœur fut prolongé et remanié selon des phases interrompues par des crises comme la peste. Malgré cette évolution irrégulière, la qualité de la stéréotomie et l'abondance de la sculpture en granite et en ardoise assurent une forte unité matérielle et décorative. À l'extérieur, la partie occidentale conserve le modèle des églises haut-bretonnes des XIVe–XVe siècles avec un large vaisseau aveugle et collatéraux à pignons multiples tandis que le chœur, à trois travées et chevet plat, est couvert sous un toit continu et orné d'un petit campanile hexagonal. Des sculptures remarquables ponctuent les façades et les contreforts : représentations des sept péchés capitaux, la fée Mélusine sur la porte sud et une gargouille dite « le satyre » figurent parmi les motifs sculptés. L'intérieur oppose une nef de quatre travées avec collatéraux et une élévation à un étage à un chœur à trois travées surélevé et séparé par un arc triomphal ; les collatéraux sont interrompus par deux imposants retables en granite du XVIe siècle. L'église conserve deux des derniers retables médiévaux de Bretagne, dont le retable nord associé au duc de Bretagne, et le retable des tanneurs, riche en iconographie de la Passion ; ces retables ont été classés au titre des immeubles en 1906. Le mobilier est surtout abondant aux XVIIe et XVIIIe siècles : le chœur a été meublé dans un style rocaille sur l'initiative de Jean Vallée entre 1757 et 1774, avec un maître-autel dessiné par La Fontaine-Jehanne et exécuté en marbres par Jean Rousseau, un tabernacle sculpté et un retable de Thomas Thory. Les stalles et les lambris contribuent à la théâtralisation de l'espace sacerdotal, tandis que plusieurs peintures et statues attribuées à l'École de Coypel et à Antonin Viollard complètent l'ensemble. Les vitraux datent principalement de 1885 à 1926, à l'exception de fragments de 1558 attribués au maître-verrier Pierre Symon, et l'église possède notamment un vitrail patriotique de Jeanne d'Arc offert par des familles locales après la Première Guerre mondiale. La statue de Notre-Dame-des-Marais, objet d'une dévotion ancienne et entourée d'une tradition locale, a connu de multiples translations et restaurations, a été couronnée en 1923 et faisait l'objet d'un pardon annuel ; elle a malheureusement été détruite le 28 février 2021. Les grandes-orgues, dont l'existence est attestée dès 1447, ont été reconstruites de 1919 à 1921 par Georges Gloton et modifiées au XXe siècle ; elles sont installées au fond du chœur, derrière une tenture, sans buffet visible. Monument majeur du patrimoine fougerais, l'église Saint-Sulpice a fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques le 26 septembre 1910.