Origine et histoire de l'Église Saint-Sulpice
L'église Saint‑Sulpice de Gennes‑sur‑Seiche (Ille‑et‑Vilaine) est un édifice à trois nefs couvertes de voûtes en bois, chaque travée se marquant par un comble particulier et un pignon de façade. La nef est précédée d'un porche accolé au clocher ; le porche occidental actuel, reconstruit en 1882 par l'entrepreneur Gandon sous la direction d'Arthur Regnault, réemploie des éléments du porche de la seconde moitié du XVIe siècle. L'édifice prioral est mentionné dès le XIe siècle comme dépendant de l'abbaye Saint‑Serge d'Angers, et l'église actuelle résulte d'une reconstruction progressive aux XVIe et XVIIe siècles, avec notamment la tour‑porche, les chapelles latérales, le portail sud et la sacristie à étage portant les dates 1660 et 1662. Inscrite au titre des monuments historiques par arrêté du 14 octobre 1926, l'église se situe au sud du bourg de Gennes‑sur‑Seiche, sur une parcelle cadastrée B 467 d'environ 1 028 m2, à une centaine de mètres au nord de la Seiche. Le terrain, bordé à l'ouest par la rue Jean de Gennes et au sud et à l'est par la rue de l'église, est séparé au nord d'habitations par une étroite venelle. L'église est campée sur une butte artificielle correspondant à l'ancien cimetière ; la croix hosannière du placître, taillée dans le grès et posée sur un court fût de granite, rappelle cet usage. Cette croix fleuronnée du XVe siècle présente un quadrilobe orné à l'orient d'une Vierge à l'Enfant accompagnée d'une femme agenouillée et à l'occident d'un Christ en Croix surmontant la représentation d'un chevalier en prière sculptée sous le médaillon. La parcelle affiche une forte déclivité rattrapée par plusieurs escaliers : un escalier de huit degrés face à l'entrée principale, deux autres percés dans le mur de soutènement du placître de onze et six marches, une pente douce au nord‑ouest et une entrée au chevet donnant sur la venelle du flanc nord.
Sous l'Ancien Régime, Gennes‑sur‑Seiche formait une paroisse du doyenné de La Guerche, de l'archidiaconé du Désert dans le diocèse de Rennes, la cure relevant de la collation de l'abbaye angevine de Saint‑Serge. Le cartulaire de Saint‑Serge et Saint‑Bachus d'Angers livre la première mention d'une église dédiée à saint Sulpice et d'un cimetière : vers 1065 les moines Béranger et Morien reçurent l'église de Geoffroy et Rivallon, fils de Gerbaud, transaction approuvée par l'évêque de Rennes Main, avec la condition que le prêtre séculier Hildeman demeure desservant à vie. Les droits de l'abbaye angevine furent confirmés par l'évêque Marbode en 1108, mais dès 1300 le petit prieuré, qui ne comptait que deux moines, fut réuni à celui de Brielles par l'évêque Gilles. Avec la période concordataire, la paroisse fut rattachée au doyenné d'Argentré‑du‑Plessis relevant de l'archidiaconé de Dol, et aujourd'hui l'église Saint‑Sulpice dépend de la paroisse Notre‑Dame d'Espérance au sud de Vitré, au doyenné Notre‑Dame.
Aucun écrit ne permet de suivre pas à pas l'histoire de l'actuelle église ; son histoire architecturale a donc été restituée par l'examen du bâti et la comparaison avec des édifices voisins. Saint‑Sulpice s'inscrit dans un modèle local d'église à pignons multiples apparenté aux églises Notre‑Dame de Vitré et collégiale Notre‑Dame de La Guerche, et sa construction progressive semble s'être étalée de la seconde moitié du XVIe siècle aux années 1660, en lien avec le développement de l'industrie toilière et la culture du chanvre dans la région. La tour‑clocher paraît avoir été élevée pendant les Guerres de la Ligue ; la diversité des gabarits des chapelles méridionales, le désaxement des files de colonnes et l'autonomie relative du clocher témoignent d'un phasage des travaux et, possiblement, d'adjonctions ultérieures visant à régulariser un édifice initialement à deux nefs. Un pinacle millésimé du collatéral nord porte la date de 1660, un cartouche au pignon de la sacristie indique 1662, et le retable du maître‑autel porte la date de 1678 qui marque le terminus ante quem du gros‑œuvre. Les interventions postérieures n'ont guère modifié la structure générale ; l'architecte Arthur Regnault fit reconstruire en 1882 le grand porche et renouveler le programme sculpté de la façade méridionale, puis restaura en 1891 le labris couvrant la nef principale.
L'église compte un ensemble homogène de onze vitraux, dont les grandes fenêtres ogivales des collatéraux, réalisées par le maître‑verrier Joseph Chauvel en 1863, 1865 et 1866, présentent sur fond de quadrilobes ou de rosaces une niche à dais de style gothique fleuri abritant une figure de saint, chaque vitrail étant signé, daté et portant le nom du bienheureux sur un socle doré. Au nord, d'est en ouest, ces vitraux figurent l'Immaculée Conception, sainte Anne, saint François d'Assise et saint Sulpice ; au sud, du levant au couchant, ils représentent saint Pierre, saint Joseph, saint Jean‑Baptiste et saint Louis. La dernière baie du collatéral méridional est composite : en 1874 Édouard Rathuis, de l'atelier du Carmel du Mans, inséra dans une verrière mécanique de Chauvel une figure de saint Thomas, patron de l'abbé Certenais, recteur de 1843 à 1882. La façade ouest abrite deux autres baies liées à la restauration du grand porche en 1882 : une rosace à huit pétales de facture mécanique éclairant la nef et un vitrail‑tableau en deux lancettes surmontées de mouchettes, réalisé par les ateliers Lecomte et Collin de Rennes, représentant le Baptême de Clovis.
Le mobilier comprend plusieurs retables et une chaire classée au titre des objets par arrêté du 19 avril 1966, adossée au pilier séparant la troisième et la quatrième arcades nord de la nef. La chaire, probablement érigée dans la première moitié du XVIIIe siècle et remployant des panneaux sculptés plus anciens, est hexagonale et desservie par un escalier unique prenant naissance dans le collatéral nord ; sa cuve comporte quatre bas‑reliefs représentant saint Jacques le Majeur, saint Pierre, le Christ et saint Paul. L'ouvrage présente des panneaux losangés simples encadrés par deux frises — l'une à rinceaux rocaille, l'autre à feuilles d'acanthe — et un abat‑voix orné de la colombe du Saint‑Esprit, d'une frise festonnée, d'une corniche à feuilles d'acanthe et d'une composition de volutes soutenant une sphère dorée sur laquelle repose un ange de la renommée.