Origine et histoire de l'Église Sainte-Quitterie
L'église Sainte‑Quitterie, dite aussi Saint‑Pierre, se dresse sur la colline du Mas au sud‑ouest d'Aire‑sur‑l'Adour, dans les Landes. Elle est principalement de style gothique des XIIIe–XIVe siècles, le chevet relevant de la fin du XIe ou du début du XIIe siècle. L'édifice figure sur la liste des monuments historiques de 1840 et a été inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1998 au titre des chemins de Saint‑Jacques‑de‑Compostelle. Construite sur l'emplacement d'un ancien temple romain dédié à Mars, comme l'atteste une dalle ornée de lauriers, l'église succède à un baptistère aménagé par les évêques des Tarusates ; la présence d'une source, d'origine païenne, a favorisé la vénération du lieu et son association à la martyre Quitterie. Au XIe siècle, des moines bénédictins, peut‑être venus de La Chaise‑Dieu, reçurent l'église en donation et établirent une abbaye voisine pour entretenir le culte. Les bâtiments conventuels furent dévastés par les troupes de Gabriel Ier de Montgomery en 1569 puis remaniés, et l'église fut reconstruite en style gothique dès la fin du XIIIe siècle. Le rayonnement religieux diminua avec les guerres de Religion ; l'abbaye, mutilée, fut transformée en 1661 en séminaire puis laïcisée, les bâtiments accueillant aujourd'hui un lycée professionnel tandis que l'ancien évêché abrite la mairie. La façade, percée d'un porche à arc brisé, s'ouvre sur un portail gothique à trumeau dont les sculptures ont été largement mutilées pendant les guerres de Religion. Le tympan présente le Christ en majesté flanqué de la Vierge et de saint Jean agenouillés, et le linteau, en deux registres, oppose la représentation de l'Enfer et celle du Paradis ou du Péché originel. Les voussures et les ébrasements réunissent des séries de personnages — anges, apôtres et prophètes — au sein d'arcatures superposées ; entre les deux compartiments de la porte, une colonne de marbre veiné de rouge, peut‑être remployée, portait autrefois la statue de saint Pierre. La façade est couronnée d'un clocher carré percé de trois rangées d'ouvertures. Le chevet prolonge une vaste crypte composée d'une abside flanquée de deux chapelles latérales, accessible par l'absidiole sud ; la crypte, probablement du IXe ou du Xe siècle, conserve des vestiges de fresques du XIVe siècle et deux petits réduits souterrains où, selon la tradition, étaient placés pendant neuf jours les fous que Sainte‑Quitterie devait guérir. Face à l'abside se trouve un sarcophage chrétien sculpté, traditionnellement considéré comme le tombeau de la sainte. Le chœur offre de remarquables arcatures romanes à chapiteaux historiés ornés de rinceaux et de scènes moralisantes ; certaines représentations de lions évoquent Saint‑Sever et la crypte de Saint‑Girons à Hagetmau, tandis que d'autres scènes semblent s'inspirer de la basilique Saint‑Sernin de Toulouse. Plusieurs chapiteaux figurent le péché et son châtiment — démons tenant des basilics, serpents châtiant une femme adultère, personnages assis à l'envers sur des lions — et les chapiteaux les plus aboutis, à colonnes géminées sur stylobate et voussures décorées, encadrent l'abside ; les frères Mazzetti ont réalisé les retables en marbre du chœur et du bas‑côté. Le sarcophage dit de sainte Quitterie, en marbre blanc de Saint‑Béat et long de 2,12 m, est orné de bas‑reliefs représentant des scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament ; ces sculptures sont attribuées, par tradition, aux IVe ou Ve siècles, et le sarcophage aurait conservé les reliques jusqu'au XVIe siècle ; il a été classé au titre des objets en 1903 et figure dans la base Palissy. Enfin, l'église constitue une étape de la via Podiensis et attire depuis le Moyen Âge des pèlerins venus vénérer la sainte ; autrefois, ils entraient dans la cité par un pont à péage sur l'Adour, étaient hébergés dans deux hospices — l'hospitalis de Adurra près du fleuve et l'hospitalis de Manso, dit hospice du Mas ou de Sainte‑Quitterie — et bénéficiaient du secours d'une chapellenie Saint‑Jacques.
