Origine et histoire de l'Église Sainte-Radegonde
L'église Sainte-Radegonde est une paroissiale catholique de Talmont-sur-Gironde (Charente-Maritime, Nouvelle-Aquitaine), perchée sur une falaise dominant l'estuaire de la Gironde. Considérée parfois comme l'archétype du roman saintongeais, elle relève de la paroisse Notre-Dame de l'Estuaire, basée à Cozes. L'équipe de l'église tient une présence sur Instagram et Twitter depuis juillet 2021.
L'édifice a été élevé à partir du XIe siècle par les bénédictins de l'abbaye de Saint-Jean-d'Angély, qui en firent une halte possible sur une des voies de Saint-Jacques-de-Compostelle. Après la Via Turonensis jusqu'à Saintes, certains pèlerins auraient embarqué à Talmont pour gagner la basilique de Soulac et poursuivre vers Compostelle. Une plaque placée par la Société des amis de Saint-Jacques rappelle ce rôle, mais l'importance ou la réalité du pèlerinage manque de preuves antérieures au milieu du XXe siècle. La transformation du village en bastide par le roi d'Angleterre Édouard Ier entraîna la fortification d'une partie de l'église et la construction d'un chemin de ronde au-dessus de l'abside. Ce n'est pas la guerre mais une violente tempête qui provoqua l'effondrement d'une portion de la falaise, emportant les deux premières travées de la nef et une part de la crypte. Des travaux de consolidation suivirent et une façade gothique fut édifiée à l'ouest. L'église est classée monument historique depuis le 30 août 1890.
Des fouilles menées au début des années 1930 ont dégagé une crypte-ossuaire découverte lors de travaux devant le flanc ouest ; selon un article de La Croix de 1928 elle a une forme de navire (9 m sur 4 m), contenant des monnaies carolingiennes et reposant sur un rocher de 12 mètres dont quatre faces sont à un mètre de la mer, les sondages s'arrêtant à 4 m laissant présager une seconde crypte. Les ossements trouvés furent placés dans un ossuaire aménagé à cet effet. En 1935 la coupole et la base du clocher furent réparées, mais l'érosion de la falaise à l'issue de la guerre menaçait encore l'édifice. En 1946 Pierre-Henri Simon évoqua l'église comme « la nef ancrée sur les flots », image de l'éternel au cœur de l'histoire. Le sauvetage est lié à l'intervention d'André Malraux et à la loi de programme dite loi Malraux, qui permirent des travaux de consolidation de la falaise puis une restauration dirigée par l'architecte des Monuments historiques Michel Mastorakis. Ces opérations suscitèrent des polémiques : des éléments postérieurs au XIIe siècle furent supprimés, le chemin de ronde démoli, la base du clocher dégagée et certaines sculptures refaites dans le style du XIIe siècle pour harmoniser l'ensemble.
À l'extérieur, la façade latérale nord exemplifie le roman saintongeais et contraste avec la sobriété de la façade occidentale de style gothique et avec la face sud exposée aux intempéries. La façade nord se structure en trois registres : au bas un portail à trois voussures flanqué de deux arcades, au milieu une série de sept arcades supportées par des colonnettes et en haut un pignon percé d'un oculus. Les sculptures du portail fonctionnent comme des sermons illustrés : la voussure supérieure montre des hommes tirant un animal prisonnier, la voussure centrale représente des hommes portés les uns par les autres — image possible de la communauté chrétienne — et la voussure inférieure des anges honorant l'Agneau pascal. Les arcades latérales opposent l'enfer et le paradis : à gauche des dragons ailés amphicéphales, à droite des pampres de vigne symbolisant la vie nouvelle. Le chevet est divisé en cinq registres horizontaux par des contreforts-colonnes ; une partie du décor, notamment les modillons, a été refaite lors des restaurations engagées depuis les années 1960, et un cadran solaire gravé sur une colonnette porte la date de 1586.
L'intérieur est sobre ; l'édifice, qui présentait à l'origine un plan en croix latine, se compose aujourd'hui d'une nef d'une seule travée, d'un transept flanqué de deux absidioles, d'un avant-chœur de huit mètres et d'une abside voûtée en cul-de-four longue de 4,80 mètres. À la croisée du transept s'élève une coupole sur pendentifs et deux escaliers de part et d'autre de la nef donnent accès à une crypte sur deux niveaux, le niveau inférieur accueillant l'ossuaire surmonté d'une chapelle funéraire. Le mobilier comprend un Christ en bois restauré en 1995 après vandalisme, un antependium du XVIIe siècle et une frégate ex-voto du XIXe siècle dans l'absidiole nord.
La cloche visible sur le faîtage de la nef, nommée "Gabrielle", donne un Si3, pèse environ 325 kg et a été fondue en 1962 par la fonderie Paccard d'Annecy ; elle est électrifiée et son tableau de commande se situe derrière l'autel dédié à Marie, près de l'entrée nord, et elle sonne une demi-heure avant chaque messe.
Le cimetière marin borde le flanc nord de l'église ; héritier du « Clouzit » médiéval, il conserve des tombes du XVIIIe siècle et, jusqu'au début des années 1950, était divisé en deux enclos distincts pour catholiques et protestants, reliés par l'ancienne rue dite « Rue des canons » qui débouchait sur le parvis. Il abrite de nombreux cénotaphes liés au renouveau de l'art funéraire au XVIIIe siècle, dont l'un fut déplacé dans la cour du musée en 1996 et porte une épitaphe latine en mémoire de l'épouse d'un capitaine décédée en 1845. Le cimetière, comme le village, se pare de roses trémières en saison estivale et il est classé monument historique depuis le 21 février 1934.