Origine et histoire de l'Église Sainte-Valérie
L'église Sainte-Valérie, dite église du Moutier, est située à Felletin, dans la Creuse. Construite après 1125 comme église priorale dépendant de l'abbaye Sainte-Valérie de Chambon-sur-Voueize, elle desservait un prieuré bénédictin implanté dans un bourg fortifié. De la phase romane subsistent le chœur, le bras sud du transept avec son absidiole et trois piliers de la croisée; quelques éléments des murs gouttereaux de la nef sont peut‑être anciens. Une partie de l'édifice s'est effondrée en 1451, puis une campagne de reconstruction engagée vers 1477 sous l'impulsion du prieur Jean Mourin d'Arfeuille allongea l'édifice vers l'ouest et fit édifier un nouveau clocher; une chapelle carrée de la seconde moitié du XVe siècle remplace probablement une première chapelle à la dernière travée de la nef. Les moines bénédictins quittèrent le sanctuaire en 1581 et l'église, devenue curiale, connut des conflits persistants avec la communauté de l'église Saint‑Blaise de Beaumont malgré un concordat de 1602. Des réparations et aménagements intérieurs eurent lieu aux XVIIe et XVIIIe siècles; au milieu du XVIIIe l'état de l'édifice devint critique, ce qui conduisit à des travaux et à la mise en interdit par l'évêque de Limoges en 1776. Par décret royal du 23 juillet 1791 l'église du Moutier devint l'église principale de Felletin. Au XIXe siècle plusieurs campagnes de restauration furent menées, notamment après un incendie en 1834 pour la tour, puis des travaux de 1866 à 1872 selon les plans d'Élie Pauly; d'autres interventions sont documentées en 1896. L'édifice fut classé au titre des monuments historiques en 1910. Au XXe siècle on relève en 1950 le remplacement des verrières hautes de la nef par l'architecte en chef des Monuments historiques Jean Creuzot, puis une importante campagne de restauration architecturale et mobilière menée de 1993 à 1998.
L'église présente un plan en croix latine formé d'une nef à vaisseau unique de trois travées, de transepts avec absidioles de chaque côté et d'un chœur de deux travées terminé par un chevet carré. La nef, aux travées presque carrées, s'ouvre sur des chapelles latérales séparées par des murs alignés sur les contreforts; ses voûtes gothiques retombent sur des culots figurés. Le chœur roman, couvert d'une voûte en berceau brisé, est profondément engagé pour accueillir la communauté monastique et comporte des baies percées à différentes époques dont quelques‑unes sont d'origine romane. Le bras sud du transept est voûté en berceau plein cintre; son absidiole abrite une chapelle dédiée à l'Immaculée Conception dont la voûte est ornée d'anges du XIVe siècle. Trois piliers de la croisée conservent des élévations romanes; le reste de l'édifice relève essentiellement des campagnes de la fin du XVe siècle et des périodes postérieures. La tour-porche occidentale, ajoutée lors de la reconstruction, comporte trois étages en léger retrait; son premier niveau atteint la hauteur de la nef, des contreforts marquent les angles et une tour d'escalier, d'abord carrée puis octogonale, s'appuie au sud‑est. La porte occidentale, de style gothique flamboyant, est surmontée d'une grande baie en arc brisé ornée d'un réseau de fleurs de lys; les étages supérieurs du beffroi sont largement ouverts et le dernier niveau est décoré de statues de saints aux angles et entre les baies. La nef conserve des traces de peintures murales découvertes lors de la restauration de 1991‑1993, notamment des représentations de saint Laurent et de saint Martin coupant son manteau. Le maître‑autel, réalisé par François Duhamel en 1673, porte un retable avec une Vierge à l'Enfant, des statues de sainte Anne et sainte Barbe et une figure du Christ ressuscité au‑dessus du tabernacle; les stalles actuelles datent du XIXe siècle. Dans le bras nord du transept, la chapelle Sainte‑Valérie occupe une absidiole et a été décorée à la fin du XIXe siècle par des ouvriers lissiers qui ont notamment peint un paysage avec un château; des vestiges de peintures du XVIIIe siècle subsistent dans ce secteur et à la croisée du transept. La chapelle dite « des Lissiers », plus vaste que les autres et située près du bras nord, a reçu des décors lissiers au XIXe siècle; elle conserve par ailleurs des éléments du XVIIe siècle, dont quatre statues, un tableau de la Crucifixion et un autel avec tabernacle, et fut consacrée au Sacré‑Cœur vers 1892. Le clocher, le chœur, la nef, les chapelles intérieures, les peintures et le mobilier forment les principaux éléments remarquables de l'édifice.