Origine et histoire de l'Enceinte de Philippe Auguste
L'enceinte de Philippe-Auguste est un système de fortification urbaine construit à Paris à partir de la fin du XIIe siècle ; elle constitue la deuxième enceinte médiévale et la plus ancienne dont on connaisse le tracé avec précision. Édifiée dans le contexte des luttes entre Philippe Auguste et la dynastie des Plantagenêt, sa construction fut ordonnée pour prémunir la ville contre des attaques, notamment venues du nord et de l'ouest, avant le départ du roi pour la troisième croisade. La rive droite fut fortifiée en premier puis la rive gauche, et l'enceinte englobait un espace de 253 hectares peuplé d'au moins 50 000 habitants à la fin du règne. À l'origine dépourvue de fossé extérieur du fait de la proximité des voiries, elle fut ensuite adaptée par des aménagements défensifs. Le rempart, crénelé et doté d'un chemin de ronde, mesurait entre six et huit mètres de hauteur, parfois neuf avec le parapet, pour une épaisseur de quatre à six mètres à la base. Il était flanqué de 73 tours semi‑cylindriques intégrées à la courtine et de quatre tours majeures au contact de la Seine, destinées à contrôler la navigation fluviale et à servir de points d'attache pour de fortes chaînes. Quatorze portes principales furent aménagées à l'origine, complétées au fil du temps par d'autres portes et de nombreuses poternes ; les portes principales étaient protégées par des tours talutées, des vantaux et des herses. Pour renforcer la défense, on creusa ultérieurement un large fossé au-devant du mur, parfois complété par un arrière‑fossé, on utilisa les déblais pour consolider l'arrière du mur, on inonda certaines sections au niveau de la Seine et l'on ajouta des barbacanes, herses et ponts, ainsi que des chemins de ronde intérieurs permettant la circulation de l'artillerie. Le financement impliqua l'indemnisation des propriétaires expropriés et des charges prises en compte par le Trésor royal ; certains ouvrages furent vraisemblablement financés par des bourgeois, comme l'atteste le nom de la porte Barbette. L'enceinte accompagna le développement urbain : le roi encouragea l'extension des quartiers inclus dans la nouvelle frontière, transféra des foires et attribua des clos pour lotir des habitations, favorisant ainsi l'essor administratif et culturel de Paris. Malgré l'édification au XIVe siècle d'une nouvelle enceinte englobant la rive droite, la muraille de Philippe-Auguste ne fut pas systématiquement démolie et resta encore solide dans certains secteurs. La rive gauche conserva la vieille enceinte jusqu'au XVIe siècle, mais dut être adaptée aux nouvelles techniques de siège par les aménagements déjà mentionnés. À partir de la seconde moitié du XVIe siècle la mise en location et la vente des terrains conduisirent au démantèlement progressif de larges portions du mur ; les fossés, insalubres près de la Seine, furent au XVIIe siècle remplacés par des galeries couvertes puis remblayés, et les dernières portes furent rasées dans les années 1680, rendant l'enceinte largement invisible. Le tracé suivait la Cité comme centre et traversait les actuels 1er, 4e, 5e et 6e arrondissements, renfermant au nord plusieurs bourgs et le quartier des Champeaux et, au sud, le bourg Sainte‑Geneviève. Sur la rive droite, le mur long d'environ 2 850 mètres était interrompu au niveau du Louvre et s'articulait autour de portes telles que Saint‑Honoré, Montmartre, Saint‑Denis et Saint‑Antoine ; un dispositif défensif devait de plus fermer l'Île Saint‑Louis entre tours riveraines. Sur la rive gauche, le tracé se lit encore dans l'orientation des rues extérieures et comprenait à l'origine six portes principales complétées par des ouvertures ajoutées au XIIIe siècle. Les vestiges sont dispersés, souvent intégrés à des constructions postérieures ou situés sur des propriétés privées ; vingt portions sont classées aux monuments historiques depuis 1889 et plusieurs tronçons, tours et courtines restent visibles dans les arrondissements concernés, parfois en sous‑sol ou après des découvertes archéologiques. L'absorption du mur par l'urbanisme successif et la difficulté d'accès rendent ces vestiges parfois discrets, mais leur empreinte sur la voirie et l'architecture urbaine témoigne encore du tracé de la fortification médiévale.